UNE AFFAIRE DE PRINCIPE (Critique)

AFFAIRE PRINCIPE (Critique)

AFFAIRE PRINCIPE (Critique)Bruxelles, 2012. Quand le commissaire à la santé est limogé du jour au lendemain, dans la plus grande opacité, le député européen José Bové et ses assistants parlementaires décident de mener l'enquête. Ils vont alors découvrir un véritable complot menaçant de déstabiliser les instances européennes, jusqu'à leur sommet.
Tiré de faits réels.

" J'espère que mon film va susciter un désir d'Europe " dit son réalisateur Antoine Raimbault, dont on avait déjà pu largement entrevoir les hautes qualités de cinéaste dans Une intime conviction en 2019. Ici, il a tout de suite saisi l'aspect romanesque du combat qu'a mené José Bové au parlement Européen. Un film qui est une adaptation de Hold-up à Bruxelles, les lobbies au cœur de l'Europe, livre publié en 2014 de José Bové, qui narre les combats du député Européen dans cette affaire qui est venue ébranler les institutions européennes jusqu'au sommet de la pyramide. La rencontre s'est faite entre la figure de l'altermondialisme à la Française et le réalisateur. Une envie d'Europe, de justice et de cinéma et voilà donc que débarque sur grand écran Une affaire de principe.

AFFAIRE PRINCIPE (Critique)
" Le problème, c'est pas les institutions, c'est ceux qui les font " dit à un moment Fabrice, l'assistant parlementaire de José Bové. L'essentiel se pose en cette phrase, tant Une affaire de principe ne tombe jamais dans le piège du poujadisme gratuit, et porte même à travers cette lutte pour la vérité du chevalier moustachu et ses acolytes, une forme d'espoir. Si le film dans ce combat pot de fer contre pot de terre n'apporte pas une cinglante originalité, il n'est jamais dupe de sa propre caricature et se joue même des stéréotypes, non sans humour. Ce qui est une vraie originalité pour le coup, car si le sujet est grave et universel à propos des complaisances ou pire de la complicité du pouvoir européen avec l'industrie du tabac, le ton de Une affaire de principe oscille entre la gravité nécessaire et une forme de légèreté, de fraicheur, qui s'incarne dans la force de ses personnages.

AFFAIRE PRINCIPE (Critique)
En effet, José Bové et Fabrice, avec leurs tenues simples et sans artifices sont tout en contraste dans le clinquant des institutions européennes où tout brille et rien de dépasse. La dernière de la bande, Clémence ressemble davantage dans le style à une animatrice du périscolaire qu'à une stagiaire de grande école. Et pourtant, ce trio bienveillant très humain et généreux, véritable poil à gratter des cols blancs, ne va rien lâcher pour dénoncer ce scandale démocratique, financier et éthique. Et l'air de rien, c'est tout ce que l'on sait souvent, mais qui est ici déployé en ellipse, sans jugement mais martelé quand même comme une évidence, entre la lâcheté de certains groupes politiques, toujours prompts à l'utopie sur les plateaux TV où l'on cause, mais tellement moins dans les salles de commissions où l'on décide, et l'inconscience sociale et écologique au moins plus assumée des autres, qui cèdent sans arrêt aux multiples lobbystes. Au cœur, les choix éditoriaux des grands médias, toujours assez étonnants, où un fait divers peut occuper toutes les premières pages, devant un scandale d'état et une crise démocratique qui engage pourtant tout un peuple. Mais à nouveau, tout est dans le titre dans Une affaire de principe, car si le film n'appelle pas à une insurrection aveugle et sourde, il expose l'opposition entre la technocratie froide et comptable de la machinerie Européenne à la quête légitime de vérité. Tout se joue notamment quand Bové croise Barroso, alors président de la commission Européenne. Ce dernier traite le fantasque parlementaire de populiste avec ce qui s'apparente surtout à un mépris pour le peuple, sans qui pourtant il n'est rien. José lui rétorquera alors que le populisme se nourrit justement de cette déperdition démocratique. A l'aulne d'un scrutin européen, la démonstration est salutaire et vient en creux expliquer le désarroi de citoyens prêts à se réfugier dans des choix électoraux obscurs et dangereux. La mise en scène joue elle aussi sur un contraste entre les codes haletants du triller politique où l'éclatement de la vérité est à un poil de moustache et la détermination matinée de fantaisie de notre trio de sympathiques chevaliers. Les trains et les avions défilent, et la scène suivante, José et Fabrice sont filmés dans des scènes de vie de délégués syndicaux agricoles, leurs originelles identités, qui ne les quittent jamais.

AFFAIRE PRINCIPE (Critique)
Le casting particulièrement percutant porte également le film. Et à ce jeu-là, l'ami Bouli Lanners est toujours aussi impressionnant. Il est un José Bové, jamais dans l'imitation mais dans l'incarnation. Il lui apporte sa générosité et son humanisme. Bouli Thomas VDB lui rend parfaitement la réplique, tant le duo joue pleinement la carte de la complicité et non du rapport de subordination. Il donne à son rôle d'assistant parlementaire une humanité, une différence que l'acteur trublion porte en lui. Il donne l'impression de s'éclater et nous partage ici son plaisir de comédien. Pour compléter le trio, si le personnage de Clémence bénéficie d'une écriture moins originale, Céleste Brunnquell lui apporte une complexité qui la rend tout aussi indispensable que ses deux comparses, relançant ainsi leurs utopies contrariées. Elle incarne ici l'espoir. Au final Lanners fait parti de ceux qui ne jouent pas mais qui sont. C'est un plaisir fou de cinéma de contempler ses gesticulations dans l'univers de n'importe quel cinéaste. Un génie du quotidien. , Une affaire de principe est un vrai plaisir de cinéma, et s'avère être un objet précieux aussi bien dans son aspiration cinématographique que dans son rôle d'utilité publique, avec un dénouement qui apporte de l'espoir, denrée rare et précieuses par les temps qui courent.

AFFAIRE PRINCIPE (Critique)

Titre Original: UNE AFFAIRE DE PRINCIPE

Réalisé par: Antoine Raimbault

Genre: Drame, Thriller

Sortie le: 1er mai 2024

AFFAIRE PRINCIPE (Critique)TRÈS BIEN