Visions (2023) de Yann Gozlan

Après ses films "Captifs" (2010), "Un Homme Idéal" (2015), "Burn Out" (2017) et "Boîte Noire" (2021) Yann Gozlan revient avec une histoire ayant à nouveau un lien avec l'aéronautique, mais surtout il a voulu s'intéresser au thème du contrôle et du dérèglement : "Je suis convaincu qu'on reste malgré tout, sous la surface, des êtres animés de pulsions. On a beau vouloir raisonner et se présenter comme des personnes civilisées, notre part animale est toujours là, prête à faire éclater les digues qu'on s'est construites pour contenir nos instincts..." Mais à la même période, le scénariste de "Ridicule" (1995) de Patrice Leconte, "Man to Man" (2004) de Régis Wargnier ou "Le Portrait Interdit" (2017) de Charles De Meaux, Michel Fessler lui propose un autre sujet, le rêve prémonitoire avec l'histoire d'une femme hantée par un rêve. Le réalisateur-scénariste déclare : "J'ai décidé alors de fusionner mon envie de départ sur le thène du contrôle avec ce début de récit qui m'intriguait autour des prémonitions." Les deux hommes ont ensuite écrit avec Aurélie Valat scénariste de "La Mécanique de l'Ombre" (2016) de Thomas Kruithof, Audrey Diwan fidèle de Cédric Jimenez qui a aussi écrit "L'Amour et les Forêts" (2023) de Valérie Donzelli juste après avoir réalisé son magnifique film "L'Evénement" (2021), puis enfin le scénario a été conclut par Jean-Baptiste Delafon scénariste du film "Les Promesses" (2022) de Thomas Kruithof. Le cinéaste avoue s'être inspiré pour le climat du film à "Images" (1972) et "Trois Femmes" (1977) tous deux de Robert Altman... 

Visions (2023) de Yann Gozlan

Pilote de ligne confirmée Estelle mène une vie idéale et heureuse avec Guillaume son époux, entre deux vols long-courriers. Un jour pourtant, par hasard, dans un couloir d'aéroport elle recroise Ana, photographe qui a été sa maîtresse vingt ans plus tôt. Bientôt Estelle commence à avoir des cauchemars... Estelle est incarnée par Diane Kruger vue dernièrement dans "355" (2022) de Simon Kinberg, "Désir Fatal" (2022) de Neil LaBute ou "Marlowe" (2022) de Neil Jordan, mais qui retrouve surtout la France des années après "Tout nous Sépare" (2017) de Thierry Klifa. Son époux est joué par Mathieu Kassovitz, réalisateur qui n'a pas tourné depuis son film "L'Ordre et la Morale" (2011) et qui a depuis surtout fait l'acteur jusqu'au tout récent "L'Astronaute" (2023) de et avec Nicolas Giraud. L'ancienne maîtresse est incarnée par l'actrice espagnole Marta Nieto vue dans "Madre" (2019) de Rodrigo Sorogoyen ou "A Perfect Enemy" (2020) de Kike Maillo. Citons ensuite Amira Casar vue notamment dans "Curiosa" (2019) de Lou Jeunet ou "Cigare au Miel" (2020) de Kamir Aïnouz, Elodie Navarre vue dans "Les Femmes du Square" (2022) de Julien Rambaldi et "Notre-Dame de Paris" (2022) de Jean-Jacques Annaud, Aleksandra Yermak aperçue entre autre dans "Cold War" (2018) de Pawel Pawlikowski et "Arthur Rambo" (2022) de Laurent Cantet, Grégory Fitoussi vu dans "L'Ecole est Finie" (2018) de Anne Depétrini et "Vaincre ou Mourir"(2023) de Vincent Mottez et Paul Mignot, Yun Lai aperçu dans "Corporate" (2017) de Nicolas Sihol et "Alien Crystal Palace" (2019) de et avec Arielle Domsbale, puis Adrien Malvoisin aperçu dans "Menteur" (2022) de Olivier Baroux... On remarque avant tout que le réalisateur se penche sur des thématiques qu'il a déjà abordé auparavant, le monde de l'aéronautique (après "Boîte Noire"), mais aussi et surtout sur des individus qui ont un contrôle certain ou une assurance en soi qui se retrouvent à perdre leurs repères et finissent par sombrer. Dès le début on est séduit voir même envoûté par le générique en "trompe l'oeil" inspiré et particulièrement beau qui impose aussi une dimension énigmatique autour du sens visuel. L'esthétisme repose trop sur le luxe de la maison (pilote et médecin on peut) domotique intégrale en prime.

Visions (2023) de Yann Gozlan

Mais on remarque surtout un couple un peu mortifère, apathique tout en tentant de nous montrer qu'ils s'aiment et veulent concrétiser avec un enfant. Mais on y croit pas franchement, elle semble en dépression alors que normalement pas encore, l'époux est coincé et peu affable, tandis qu'ils sont a priori heureux depuis leurs études. Mais on plonge pourtant avec intérêt dans cette histoire très hitchckockienne (le choix de la blonde Diane Kruger n'est pas un hasard), où la femme désormais quarantenaire retrouve les émois de sa jeunesse en retrouvant son amante d'il y a 20 ans. Une liaison au moment où tout semble aller au mieux dans son couple et dans son travail. Une liaison qui va pourtant se terminer presque aussi brusquement qu'il y a 20 ans. Se mêle alors la réalité du présent, des cauchemars qui semblent prémonitoires ou est-ce l'inverse ?! La construction narrative peut parfois paraître confuse mais elle est au contraire aussi savoureuse que judicieuse pour nous emmener dans les méandres de la mémoire. Le montage est parfait et sous ses airs de complexité est parfaitement limpide, imposant un suspense certe limité mais logique et prenant. Par contre le twist, la révélation qui éclaircit un premier pan de l'histoire est complètement biaisé et d'une incohérence qui casse un peu l'élan... ATTENTION SPOILERS !... en effet comment croire et comprendre que le médecin empoisonne aussi fortement et dangereusement son épouse dont il est amoureux et qui est enceinte ?!... FIN SPOILERS !... L'autre bémol reste le personnage de l'époux, un Kassovitz sous-exploité dans un rôle qui se résume à demande à sa femme comment elle va ou à qui elle téléphone ou où elle était alors qu'il y avait un peu mieux à faire notamment et pourquoi pas avec un frère invisible et pourtant assez essentiel. Par contre le couple Kruger/Nieto est incandescent et compense les facilités de mise en scène ou les maladresses du scénario. Néanmoins, niveau thriller psychologique on est dans une intrigue assez fascinante pour nous séduire. Note indulgente.

Note :  

Visions (2023) Yann GozlanVisions (2023) Yann Gozlan

12/20