Après avoir logiquement explorer le monde médical avec "Hippocrate" (2014), "Médecin de Campagne" (2016) et "Première Année" (2018) l'ex-médecin Thomas Lilti revient en abordant un autre univers : "Un métier sérieux, film de groupe, narrativement un peu éclaté, ressemble à mes précédents longs métrages car j'aborde la fiction par le réel. Mais aussi et surtout par ma volonté de continuer à interroger la question de l'engagement à travers un métier. L'engagement des soignants a été au coeur de mon travail depuis plus de dix ans, j'ai voulu m'intéresser aux enseignants. Comment trouver du sens dans l'exercice d'une profession de plus en plus décriée, paupérisée, déclassée ? Raconter la vie d'un groupe de professeurs dans un collège s'est alors imposé à moi avec le désir de les observer pour mieux comprendre ce qui fait le sel de leur profession. Où puisent-ils leur motivation à enseigner dans cette adversité, dans une institution fragilisée ? Quels élèves ont-ils été ? Quels parents sont-ils devenus ? Qu'en est-il de leur vocation ?" Pour son projet le réalisateur-scénariste s'est beaucoup documenté, essentiellement en regroupant de nombreux témoignages.
C'est la rentrée scolaire, Benjamin jeune doctorant qui n'a pas obtenu de bourse d'études se voit contraint d'accepter un poste de professeur de mathématiques dans un collège. Sans expérience dans un métier qu'il n'avait pas prévu il va intégrer un groupe pédagogique où il a découvrir les aléas du métier au sein d'une institution fragile... Le jeune prof est incarné par Vincent Lacoste vu récemment dans "Le Lycéen" (2022) de Christophe Honoré et "Le Parfum Vert" (2023) de Nicolas Pariser, et qui retrouve surtout son réalisateur après "Hippocrate" (2014) et "Première Année" (2018), à l'instar pour ce dernier film de son partenaire William Lebghil vu dans "Les Complices" (2023) de Cécilia Rouaud et "Hawaï" (2023) de Mélissa Drigeard, puis aussi à l'instar de François Cluzet qui était dans "Médecin de Campagne" (2016) et vu entre autre dans "Mascarade" (2022) de Nicolas Bedos et "Canailles" (2022) de Christophe Offenstein. Citons Adèle Exarchopoulos qui retrouve Vincent Lacoste après "Fumer fait Tousser" (2022) de Quentin Dupieux et vu récemment dans "Passages" (2023) de Ira Sachs et "Je verrai toujours vos Visages" (2023) de Jeanne Herry, Louise Bourgoin vue dans "C'est mon Homme" (2023) de Guillaume Bureau et "Anti-Squat" (2023) de Nicolas Silhol, Bouli Lanners vu dans "L'Ombre d'un Mensonge" (2021) de lui-même, "La Nuit du 12" (2022) de Dominik Moll et "Un Coup de Maître" (2023) de Rémi Bezançon, et enfin Lucie Zhang révélation du film "Les Olympiades" (2022) de Jacques Audiard... Le milieu scolaire a toujours beaucoup inspiré le cinéma, mais à y regarder de plus près c'est presque toujours via le regard d'un ou des élèves, et la relation avec le corps professoral est souvent limité à une prof, et si on va plus loin il s'agit souvent de comédies, ou de drames qui traversent d'ailleurs souvent l'encenite de l'école. Ainsi, regarder dans les coulisses de la salle des professeurs est rare voir très rare, récemment on pense au dyptique potache "Les Profs" (2013-2015) de Pierre-François Martin-Laval, on pense aussi à la variation CP-pion avec "La Vie Scolaire" (2019) de Grands Corps Malade et Mehdir Idir avant de comprendre que personne n'avait aborder le sujet depuis "P.R.O.F.S." (1985) de Patrick Schulmann ! Il était peut-être temps...
Le sujet est évidemment large et complexe, le genre force à un certain académisme ne serait-ce que par le panel obligé du groupe de professeurs (le vétéran expérimenté, la jeune prof ex-cancre, celle qui n'y croit plus, celui qui y croit toujours, celle issue d'une "minorité visible"... etc...). Le film décrit bien les différentes relations possibles entre une classe et un prof, on reste parfois interloqué comme quand les conseils se résument à démerde toi avec les tutos youtube, on sourit devant la cool attitude plein de vocation du prof d'anglais, on est choqué par des élèves qu'on a envie de secouer mais on se dit aussi et surtout que ces élèves sont infects aussi et surtout parce qu'il y a forcément un déficit du côté parental (l'école instruit les parents éduquent...). Le film montre, démontre, dénonce mais fait parfois un peu démago ou prend des raccourcis... ATTENTION SPOILERS !... Qui peut croire à un corps professoral aussi amicalement soudé ?! Le réalisateur n'a pas dû visiter les salle des profs. Qui peut croire qu'un élève soit viré définitivement pour "si peu", qui peut croire à autant d'idylles dans un si petit groupe... FIN SPOILERS !... Ces petites maladresses sont un peu gênantes surtout parce que le film se veut réaliste et un point de vue aussi pertinent que les précédents films médicaux. Néanmoins, ces facilités permettent aussi un peu de légèreté, de fantaisie qui compensent 2-3 passages plus douloureux qui rappellent aussi que les profs ont une vie privée (comme les médecins ou les flics !) qui ne les éloignent pas de leurs élèves mais bien au contraire les rapprochent. Les acteurs sont magnifiques et au diapason. Ca reste un film cohérent et nécessaire, qui offre un autre angle de la vie au collège avec "La Vie Scolaire" (2019), et qu'il fait un digne successeur à "P.R.O.F.S." (1985).
Note :