Conann (2023) de Bertrand Mandico

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Artiste singulier, ayant tourné une multitude de clips et courts métrages depuis "La Chanson du Jardinier Fou" (1997), le réalisateur-scénariste Bertrand Mandico revient pour son troisième long métrage après "Les Garçons Sauvages" (2017) et "After Blue (Paradis Sale)" (2021) alors même que ce projet n'était pas prévu pour le cinéma. En effet, l'idée est née sous l'impulsion de Philippe Quesne directeur du théâtre des Amandiers qui a proposé au cinéaste de monter un spectacle et il a proposé aussitôt une variation autour de Conan le Cimmérien" (1932) de Robert E. Howard et popularisé au cinéma par la très libre adaptation de "Conan le Barbare" (1982) de John Milius. Mais le Covid et le départ de Philippe Quesne du théâtre ont causé l'annulation du spectacle. Finalement Bertrand Mandico continua son exploration de cet univers, d'abord avec les deux courts métrages "Nous les Barbares" (2023) et "Rainer, a Vicious Dog in Skull Valley" (2023) qui amena naturellement à un long métrage. Le réalisateur-scénariste réécrit l'histoire de façon très libre et avec une dimension féministe assumée. Le film est interdit au moins de 12 ans avec avertissement... Parcourant les abîmes, Rainer le chien des enfers raconte les six vies de Conann à travers les époques et les mythes, d'esclave de Sanja et de sa horde barbare jusqu'à son accession aux sommets de la cruauté du monde... 

Conann est incarnée par différentes actrices au fil des ans, à 15 ans par Claire Duburcq aperçue dans "1917" (2019) de Christopher Nolan, qui retrouve son réalisateur après "After Blue (Paradis Sale)" (2021) et vue récemment dans "Le Vourdalak" (2023) de Adien Beau, à 25 ans par Christa Théret vue dans "Renoir" (2013) de Gilles Bourdos, "Gaspard va au Mariage" (2018) de Anthony Cordier ou "Luise" (2023) de Matthias Luthardt, à 35 ans par Sandra Parfait apparue dans "Alice et le Maire" (2019) de Nicolas Pariser et "La Pièce Rapportée" (2020) de Antonin Peretjatko, à 45 ans par Agata Buzek vue dans "Les Innocentes" (2015) et "Blanche comme Neige" (2019) tous deux de Anne Fontaine et qui retrouve aussi son réalisateur après "After Blue (Paradis Sale)" (2021), à 55 ans par Nathalie Richard qui jouait dans les deux précédents longs de Mandico et qui joue là dans un de ses huit films de l'années depuis "Jeanne du Barry" (2023) de et avec Maïwenn jusqu'au récent "Le Règne Animal" (2023) de Thomas Cailley, elle retrouve aussi après "Le Divorce" (2003) de James Ivory sa partenaire alias Conann Reine soit François Brion vue entre autre dans "Le Bel Âge" (1960) de Pierre Kast, "La Traque" (1975) de Serge Leroy, "Nelly et Monsieur Arnaud" (1995) de Claude Sautet ou "Le Premier Jour du reste de la ma Vie" (2008) de Rémi Bezançon. Rainer le chien des enfers est joué par Elina Löwensohn vue dans "La Sagesse des Crocodiles" (2000) de Po-Chih Leong, "Dark Water" (2005) de Walter Salles, "La Guerre est Déclarée" (2011) de et avec Valérie Donzelli, et retrouve Mandico et plusieurs partenaires après "Les Garçons Sauvages" (2018) et "After Blue (Paradis Sale)" (2021), à l'instar de Christophe Bier acteur fétiche de Jean-Pierre Mocky dans une douzaine de films et qui retrouve le cinéaste et plusieurs acteurs après "Les Garçons Sauvages" (2017) mais aussi après les deux courts métrages "Nous les Barbares" (2023) et "Rainer, a Vicious Dog in Skull Valley" (2023). Citons ensuite Audrey Bonnet vue entre autre dans "Augustine" (2012) de Alice Winocour, "Personnal Shopper" (2016) de Olivier Assayas ou "Un Peuple et son Roi" (2018) de Pierre Schoeller, Yuming Hey aperçue dans "Osmosis" (2019) de Audrey Fouché et "38°5 Quai des Orfèvres" (2023) de Benjamin Lehrer, puis enfin Karoline Rose Sun connue comme artiste de la chanson sous le nom SUN vue dans "Tom Medina" (2021) de Tony Gatlif et "Vincent doit Mourir" (2023) de Stefan Castang... Un des soucis du film vient directement de son pseudo-féminisme vanté, Mandico insistant sur le "Conan" de Milius comme "un emblème de la virilité, de la testostérone", et donn son originalité serait d'interchanger le sexe, simplement. Problème, si les personnages sont des femmes toutes leurs actions et réactions sont bel et bien copiés à celles des barbares mâles. Déjà sur ce point il aurait fallu une féminité plus assumée, par exemple dans une style plus d'une combattante plus féline ou dans un minimum de compassion. Un détail peut-être. La voix Off surexplicative ennuie, puis lasse avant d'agacer pleinement même si il participe au climax surréaliste et fantastique pour faire simple, ou plutôt un mix entre herioc fantasy low cost et semblant de erotico-gore pour être plus précis.

On reste un peu perplexe par des décors en carton-pâte avec fond en peinture du bâtiment et matériau grossier jusque dans les costumes dignes d'une friperie ; si c'était un film des seventies pourquoi pas, en 2023 avec un financement public plus problématique surtout que le réalisateur use et abuse de tous les effets possibles (Noir et Blanc, couleur, focale de toutes les tailles, travelling... etc...) pour faire croire qu'il a des idées. Non c'est juste qu'il compense un visuel qui n'a pas la capacité de ses ambitions. Ce n'est pas du talent, c'est de la prétention. Avec un budget plus confortable y aurait-il de l'espoir ?! On en doute, et c'est vis à vis du scénario et de ses personnages qu'on le décèle. Une Conann primitive dont on ne décèle jamais aucun forme d'intelligence ou même d'espérance, malgré ses charmes elle reste un barbare aux réflexes tout ce qu'il y a de machiste et bas du front. Le scénario n'est qu'une suite de massacres plus ou moins assumés, car oui la plupart reste hors champs, non pas par soucis du grand public ou pour favoriser une quelconque pensée psychologique mais bien pour éviter des effets spéciaux qui seraient trop contraignants. Le jeu des actrices est souvent tout aussi primaire, théâtralisée ce qui empêche toute flamboyance, tout panache, tout espoir de souffle épique. Un comble pour de l'heroic-fantasy même de type "Art et Essai". Surtout qu'on constate que le récit est très premier degré, sans une once de fantaisie ou d'humour, noir ou non. Le réalisateur-scénariste ose des choix radicaux, bravo au premier abord, mais très vite on s'aperçoit que c'est bien vain, inepte sur le fond et laid dans la forme malgré quelques plans qui sont comme des illusions. Finalement, la plus belle réussite du film reste sa très belle affiche. Un OFNI (Objet Filmé Non Identifié) plein de promesses que le réalisateur est incapables de tenir. 

Note :  

05/20