SYNOPSIS : Dog et Mirales sont amis d'enfance. Ils vivent dans un petit village du sud de la France et passent la majeure partie de leurs journées à traîner dans les rues. Pour tuer le temps, Mirales a pris l'habitude de taquiner Dog plus que de raison. Leur amitié va être mise à mal par l'arrivée au village d'une jeune fille, Elsa, avec qui Dog va vivre une histoire d'amour. Rongé par la jalousie, Mirales va devoir se défaire de son passé pour pouvoir grandir, et trouver sa place.

Le réalisateur de Chien de la casse, Jean-Baptiste Durand, explique ainsi le titre de son film, qui va déplier tout l'arc narratif : " Le chien de la casse, c'est celui qui fait les choses pour lui, malgré ses amis. Chacun considère que l'autre est un chien de la casse. " Au-delà ce qu'il va déployer dans l'anthropologie du lien de domination entre deux potes et plus encore, il livre ici une fine description d'une thématique chère à son art dans ces portraits de jeunes péri-urbains, qui traînent et s'ennuient ensemble, picolent et fument du shit. Comme si la violence était partout, dans ce qu'ils font mais surtout dans ce qu'ils sont. Il y a parfois comme du Ben Affleck dans Will Hunting (1997) quand Mirales attend devant chez Dog après avoir toquer à la porte. Cette attitude corporelle, ces mains dans les poches hautes et cet ennui du présent qui inscrit l'incertitude de l'avenir.

Les dialogues sont drôlement percutants, notamment dans cette violence de Mirales et le caractère insupportable de voir son ami lui échapper. Tout l'enjeu réside dans la toxicité d'une amitié trop écrasante. Une thématique assez peu traitée sur grand écran. Les liens nocifs entre amants, entre enfants et parents sont régulièrement déployés, mais s'intéresser à ce niveau de haine dans la tyrannie amicale est un geste cinématographique passionnant. C'est aussi comme une réhabilitation de la puissance de l'amitié, trop souvent dévoyée, tant obnubilés que nous sommes par le mythe de la prédominance de vivre une belle histoire d'amour, qui viendrait balayer tout le reste. Sauf que Mirales ici est pleinement tyrannique. Il utilise sa culture et sa science de l'autre à des fins d'écrasement notamment de son pote. Comme s'il ne comprenait pas que Dog, qu'il aime finalement très mal, trouve des voies d'émancipation ailleurs, et surtout dans l'amour, qui semble précisément échapper à Mirales. C'est ce que décrit le réalisateur : " Mirales est névrosé, cabossé et ne sait pas aimer car même s'il aime profondément son pote, il veut le changer, l'insulte et n'œuvre pas pour son bien. Pareil pour son univers : il est mal dans sa peau, mal dans sa place et porte un regard abimé sur son monde qu'il aimerait aussi transformer, ou quitter. " La mise en scène est au rythme de l'écriture tant elle se concentre sur les tourments de ces personnages. Nous sommes avec eux, dans le village, sur le banc et c'est alors toute la vérité du film qui prend vie.

Le casting est passionnément engagé. Raphaël Quenard est tout simplement incroyable. Tout ce qu'il montre en ce moment est renversant. Il est bluffant car on ne sait pas trop quand il peut s'arrêter, jusqu'où il peut aller. Du candide benêt qu'il sait interpréter à merveille au salaud ordinaire comme c'est le cas ici, se dégage la même puissance d'authenticité, un lâcher-prise sidérant qui lui permet une interprétation toujours puissamment juste. Ici comme ailleurs, il explose l'écran de son talent. Anthony Bajon n'est pas en reste. Son réalisateur parle de son intelligence animale. Dans ce rôle de Dog , il se situe dans le champ de l'intériorité tant il semble passer son temps à écouter le verbiage permanent de Mirales. Un rôle dur tant son personnage s'efface et se soumet aux désirs de l'autre. Son silence est aussi parlant que la dialectique permanente de son diabolique acolyte.

Galatea Bellugi dans le rôle d' Elsa, est celle qui va se dresser contre le dresseur. Elle fera face avec force à Mirales pour s'autoriser à vivre son histoire avec Dog. Elle va alterner avec une grande subtilité son envie d'aimer et cette nécessité rageuse de tirer son amant vers le haut. Chien de la casse nous parle notamment d'inconditionnalité du lien. Qu'est ce qui nous unit aux autres et comment on s'y prend avec eux? C'est juste le sel de la vie, et ici c'est juste une intelligente et remarquable démonstration.

Titre original: CHIEN DE LA CASSE

Réalisé par: Jean-Baptiste Durand

Casting: Anthony Bajon, Raphaël Quenard, Galatea Bellugi...

Genre: Comédie dramatique

Sortie le: 19 Avril 2023

Distribué par : Bac Films

TRÈS BIEN