4ème long métrage de Vincent Pérez après "Peau d'Ange" (2002), "Si j'étais Toi" (2007) et "Seul dans Berlin" (2016) avec un film sur le duel, un projet qu'il a en tête depuis longtemps : "Dans ma carrière d'acteur j'ai fait plus d'une trentaine de combats, à l'épée, au sabre et fleuret, notamment dans Le Bossu, La Reine Margot et Fanfan la Tulipe. J'ai travaillé avec des cascadeurs chinois, russes, américains. Parmi eux de très grands maîtres d'armes dont William Hobbs, qui a signé les plus beaux duels du cinéma, dont ceux des Duellistes de Ridley Scott, jusqu'au fameux Game of Thrones. Sur le tournage de J'Accuse, dans une discussion, Jean Dujardin m'a dit que je devrais faire un film sur le sujet du combat. Il a alors réouvert cette boîte de Pandore que j'avais fermée. Je me suis rendu compte que le désir de réaliser un film sur le sujet était resté intact. Mais cette fois-ci je me sentais prêt. Je me suis immédiatement mis à effectuer des recherches." Le réalisateur-scénariste-acteur s'est particulièrement servi du livre "L'Annuaire du Duel, 1880-1889" par Ferréus, puis "L'Art du Duel" (1886) de Adolphe Eugène Tavernier. Vincent Pérez co-signe le scénario avec son épouse à la ville, Karine Silla réalisatrice de "Un Baiser Papillon" (2011), co-autrice de "Peau d'Ange" (2002) et accessoirement actrice notamment en caméo dans le récent "Les Amandiers" (2022) de Valeria Bruni-Tedeschi.
Paris en 1887, le pays est en pleine révolution, industrielle mais aussi des moeurs, la liberté de presse a ouvert aussi la voie aux injures publiques ce qui a aussi relancé la mode du duel. Clément Lacaze, maître d'arme va se retrouver dans une spirale de violence à partir du moment où il va accepter d'enseigner l'art du duel à Marie-José Astié, une féministe en avance sur son époque... Le maître d'arme est incarné par Roschdy Zem qui a déjà été escrimeur dans "Blanche" (2002) de Bernie Monvoisin et qui revient au 19ème siècle après "Monsieur N" (2003) de Antoine De Caunes, il retrouve après "Le Jeu" (2018) de Fred Cavayé sa partenaire féministe Doria Tillier vue dernièrement dans "L'Origine du Mal" (2022) de Sébastien Marnier, "Fumer fait Tousser" (2022) de Quentin Dupieux et "Canailles" (2022) de Christophe Offenstein. Citons ensuite Vincent Pérez lui-même qui a croisé le fer dans "Cyrano de Bergerac" (1990) de Jean-Paul Rappeneau, "La Reine Margot" (1994) de Patrice Chéreau, "Le Bossu" (1997) de Philippe De Broca, "Fanfan la Tulipe" (2003) de Gérard Krawczyk, sans compter le méconnu mais excellent "Demain dès l'Aube" (2009) de Denis Dercourt, et retrouve après "J'Accuse" (2019) de Roman Polanski son partenaire Damien Bonnard qui retrouve la même époque que "Curiosa" (2019) de Lou Jeunet et retrouve également après "The French Dispatch" (2021) de Wes Anderson l'acteur Guillaume Gallienne qui était aussi dans "Fanfan la Tulipe" (2003), vu récemment dans un autre type de film historique avec "Kaamelott : Premier Volet" (2021) de et avec Alexandre Astier, Pepe Lorente aperçu dans les films "La Résurrection du Christ" (2016) de Kevin Reynolds ou "Ignace de Loyola" (2017) de Paolo Dy et Cathy Azanza, Noham Edje aperçu dans "Les Amandiers" (2022), puis enfin Myriem Akheddiou vue dans "Titane" (2021) de Julia Ducournau, "16 Ans" (2022) de Philippe Lioret, "Avant l'Effondrement" (2023) de Alice et Benoît Zeniter puis "Sages-Femmes" (2023) de Léa Fehner... Le film s'ouvre sur un duel, un duel d'escrime forcément mais aussi un duel d'ego dans un monde foncièrement viril où les femmes demeurent des bijoux d'apparat. En quelques instants le réalisateur impose une atmosphère mais surtout met en valeur tout le cérémonial et les codes inhérents à un jugement d'honneur souvent mal placé. En parallèle il y a cette femme, militante féministe Marie-Mouise Astié (Tout savoir sur elle ICI !) qui donne du crédit au contexte historique, mais qui permet aussi il faut bien l'avouer d'ajouter du charme sans oublier le message qui est toujours d'actualité.
Ainsi, entre les conséquences post-traumatique à la guerre de 1870, le combat féministe encore à ses prémices, le sursaut d'honneur par le duel Vincent Pérez réussit un film historique passionnant d'autant plus remarquable qu'il ne se fait jamais trop surexplicatif, merci pour nous humble spectateur. Le réalisateur aussi scénariste et acteur, signe un récit à la fois simple et linéaire, mais aussi subtil dans ses différents niveau de lecture. L'attrait homosexuel est juste esquissé, le trauma 1870 se résume à un tableau, l'honneur et vengeance se mêlent, amitié et politique ont toujours été de faux amis, la salle d'armes dans les locaux d'un journal comme la salle de pause dans une start-up et surtout le scénario évite l'écueil trop habituel du sursaut de trop ou du rebondissement mal venu. Enfin si les hommes sont de leur temps, machistes voir misogynes le personnage de Astié/Tillier est d'une modernité judicieuse vis à vis du lien entre 1887 et aujourd'hui. Et enfin on salue le travail sur le duel et sa technicité, Vincent Pérez ayant entre autre fait appel au maître d'arme Michel Carliez qui l'a suivi sur sa carrière depuis un certain "Cyrano de Bergerac" (1990) de Jean-Paul Rappeneau. Le film évite l'effet clippesque, par exemple, des deux récents "Les Trois Mousquetaires" (2023) de Martin Bourboulon pour des duels réalistes et lisibles tout en gardant l'ampleur des enjeux. Un film magnifique donc, sur le fond comme sur la forme et d'une cohérence solide de bout en bout. Un très bon moment à ocnseiller.
Note :