De Christine Angot
Chronique : Certes, la portée cinématographique de son procédé narratif alternant archives de films familiaux et entretiens filmés est limitée. Mais Une Famille n’en est pas moins puissant, dérangeant et essentiel.
C’est un film de confrontation. Il est audacieux, thérapeutique pour son autrice sans doute. Et violent, indéniablement.
Christine Angot force littéralement ses interlocuteurs à affronter l’inceste qu’elle a subie et à confronter leur attitude de l’époque.
Est-ce la bonne méthode ? Est-ce que répéter ad nauseam des questions jusqu’à entendre les réponses qu’on attend leur donne autant de valeur que des confessions spontanées ?
Sans doute pas. Mais le procédé rappelle frontalement que le viol bousille profondément et irrémédiablement la vie de la victime, tout comme il ravage son entourage, même (surtout) lorsqu’il s’est enfermé dans le déni. Rien n’est plus comme avant.
Angot est une personnalité clivante, un personnage dur, peu aimable. Malgré le drame abominable qu’elle a vécu, elle suscite peu l’empathie. On pourrait penser que c’est la limite d’Une Famille, c’est au contraire sa force.
Le documentaire touche à l’universalité et son côté forceur amplifie l’urgence et la nécessité de la libération de la parole de la victime.
Avec cet exercice personnel, intime, impudique même, Angot pousse ses proches à regarder l’horreur en face, à verbaliser ce qu’ils se refusaient à voir. Mais au-delà de son cercle proche, elle incite son spectateur et plus encore la société à regarder le mal dans les yeux, à le citer et le dénoncer.
Ce n’est pas agréable. Mais c’est nécessaire. Et ça vous reste dans la tête longtemps après le générique de fin.
Synopsis : L’écrivaine Christine Angot est invitée pour des raisons professionnelles à Strasbourg, où son père a vécu jusqu’à sa mort en 1999. C’est la ville où elle l’a rencontré pour la première fois à treize ans, et où il a commencé à la violer. Sa femme et ses enfants y vivent toujours.
Angot prend une caméra, et frappe aux portes de la famille.