Code Inconnu (2000) de Michael Haneke

Par Seleniecinema @SelenieCinema

5ème long métrage cinéma pour le réalisateur autrichien Michael Haneke après sa "trilogie de la glaciation" (1989-1994) et surtout "Funny Games" (1997). Ce nouveau projet est un tournant dans le cinéma du cinéaste car cette fois il n'aborde pas ses sujets de prédilection comme la violence, le faits divers, la force des images, et de surcroît il quitte son Autriche natale pour la France et Paris. Le réalisateur-scénariste explique son idée : "La seule chose qui me reste à dire après l'achèvement du film, et qui pourrait intéresser tel ou tel, ce sont les questions qui ont été pour moi le déclencheur et le moteur du projet car mon film n'est rien d'autre qu'une tentative de tester des réponses possibles à ces questions. Toutes ces interrogations ne sont pas nouvelles, mais n'en restent pas moins d'actualité au vu du paysage médiatique qui nous entoure. Bien entendu, elles ont été choisies de façon arbitraire et lacunaire, mais j'espère qu'elles peuvent évoquer un peu le climat intellectuel et à fait naître Code Inconnu." Un film définit comme "un récit incomplet de divers voyages"... Paris, fin des années 90. Jean qui a fugué parce qu'il ne veut pas reprendre la ferme familiale arrive à Paris où il espère trouver refuge chez son frère aîné Georges. Mais ce dernier vit chez sa conjointe, Anne dont la carrière d'actrice prend son envol. Jean croise Anne, mais juste après Jean est pris à partie par Amadou après qu'il ait été humiliant avec une SDF. Résultat, Amadou est emmené par la Police et la SDF est renvoyée dans son pays. Ces personnages vont se croiser, s'entrecroiser dans Paris et ailleurs avec d'autres...

Anne est incarnée par Juliette Binoche vue la même année dans "La Chocolat" (2000) de Lasse Hallström et "La Veuve de Saint-Pierre" (2000) de Patrice Leconte et retrouvera Haneke pôur "Caché" (2005), son conjoint est joué par Thierry Neuvic pour sa première apparition sur grand écran et vu plus tard dans "Ne le dis à Personne" (2006) de Guillaume Canet, "L'Affaire SK1" (2014) de Frédéric Tellier ou "Antigang" (2015) de Benjamin Rocher. Citons ensuite Josef Bierbichler remarqué dans "Coeur de Pierre" (1976) et "Woyzeck" (1979) tous deux de Werner Herzog et qui retrouvera Haneke pour "Le Ruban Blanc" (2009), Maimouna Hélène Diarra vue plus tard dans "Moolaadé" (2002) de Ousmane Sembene ou "Bamako" (2006) de Abderrahmane Sissako retrouvant ainsi Aïssa Maïga remarquée dans "Saraka Bô" (1997) de Denis Amar et qui sera dans "Caché" (2005), Luminita Gheorghiu qui retrouvera aussi Haneke dans "Le Temps du Loup" (2003) et surtout connue plus tard pour "4 Mois, 3 Semaines, 2 Semaines" (2007) et "Au-Delà des Collines" (2012) tous deux de Cristian Mungiu, Bruno Todeschini vu entre autre dans "La Reine Margot" (1994) et "Ceux qui m'aiment prendront le Train" (1997) tous deux de Patrice Chéreau, Paulus Manker acteur fétiche de Haneke depuis le téléfilm "Lemminge" (1979), Didier Flamand vu cette même année dans "Les Rivières Pourpres" (2000) de Mathieu Kassovitz et "Les Destinées Sentimentales" (2000) de Olivier Assayas et qui retrouvera dans "Les Rois Mages" (2001) de et avec Didier Bourdon et Bernard Campan son partenaire Walid Afkir révélé par "Code Inconnu" qui retrouvera Haneke et quelques camarades dans "Caché" (2005) et "Amour" (2012) et encore Juliette Binoche dans "Un Beau Soleil Intérieur" (2017) de Claire Denis, Maurice Bénichou qui sera également dans "Le Temps du Loup" (2002) et "Caché" (2005) de Haneke, Carlo Brandt vu dans "Indochine" (1991) de Régis Wargnier, "Louis, Enfant Roi" (1993) de Roger Planchon ou "Ridicule" (1996) de Patrice Leconte. Marc Duret déjà aperçu en flic entre autre dans "La Haine" (19945) de Mathieu Kassovitz ou "Dobermann" (1997) de Jan Kounen, Arsinée Khanjian épouse à la ville et muse du réalisateur Atom Egoyan, Florence Loiret-Caille vue la même année dans "Trouble Every Day" (2000) de Claire Denis et qui retrouvera une partie de l'équipe dans "Le Temps du Loup" (2003), à l'instar de Nathalie Richard qui sera dans "Caché" (2005) et "Happy End" (2017), puis enfin Andrée Tainsy qui tourne alors depuis "Le Moulin des Andes" (1944) de Jacques Demy jusqu'à son ultime film "Rois et Reine" (2004) de Arnaud Desplechin... le titre renvoie à la difficulté de communiquer, ce qui est le sujet qui hante toutes les scènes du film. Le réalisateur reprend un peu la construction narrative de son film "71 Fragments d'une Chronologie du Hasard" (1994), soit un film choral où plusieurs protagonistes vont se croiser et s'entrecroiser dans un Paris où personne ne se parle correctement, où chacun vaque à ses occupations, où il est difficile de s'expliquer calmement. 

Mais on constate vite que le récit est un peu vain, dans le sens où il n'y a pas d'intrigues, pas de réelles évolutions des choses ou des personnages (contrairement justement à "71 Fragments...") et très vite l'ennui s'installe. Le pire reste sans doute un montage à la serpe qui accentue la sensation de sketchs et qui souligne le fait qu'aucun segment ne semble lier à l'autre. Comme tout film à segments un décalage s'ouvre entre les parties réussies et les autres, les séquences qui amènent à un minimum d'émotions et celles qui laissent un sentiment de néant. Dans les meilleures scènes on peut citer le jeune homme qui tente d'expliquer l'humiliation gratuite d'une SDF par un ado, la fillette devant sa classe qui s'avère être composée de sourd-muets ou la passagère du métro qui se fait cracher dessus. A contrario certains passages sont grotesques voir invraisemblables comme l'intervention des policiers qui tient du fantasme ou de la caricature (un comble pour un Haneke), ou des passages un peu trop redondants comme le tournage. En conclusion Haneke signe un film qui n'a pas grand chose à dire, l'ironie du sort pour un film sur le manque de communication. La première déception pour un Haneke.

Note :                 

10/20