Cyrano de Bergerac (1990) de Jean-Paul Rappeneau

Enième adaptation de la célèbre pièce de théâtre éponyme (1897) de Edmond Rostand après déjà une quinzaine de films depuis "Cyrano de Bergerac" (1900) de Clément Maurice jusqu'à la version hollywoodienne "Cyrano" (2022) de Joe Wright avec une mention spéciale pour le film "Edmond" (2019) de Alexis Michalik. Le projet permet au réalisateur-scénariste Jean-Paul Rappeneau de retrouver le film historique et le Cape et d'Epée après "Les Mariés de l'An II" (1971) et qui retrouvera une grande partie de son équipe pour "Le Hussard sur le Toit" (1995) dont justement son co-scénariste Jean-Claude Carrière, un des plus grands auteurs du cinéma français sur plus de 150 films depuis "Le Soupirant" (1963). Le scénariste avouera que ce travail d'adaptation a été une gageure car il a fallu passer d'une pièce de 4 heures à un film de 2h17. Le film est un succès public et critique, avec plus de 4 millions d'entrées France notamment et surtout 10 Césars, en prime un prix d'interprétation à Cannes pour l'acteur principal, un Goloden Globe mais râte l'Oscar que beaucoup attribue à l'interview polémique de Gérard Depardieu (Tout savoir ICI !), mais on peut noter l'Oscar pour les costumes. Dans l'équipe technique, outre le Directeur photo Pierre Lhomme fidèle du réalisateur depuis "La Vie de Château" (1966), citons le compositeur Jean-Claude Petit remarqué aussi pour la musique du dyptique "Jean de Florette" et "Manon des Sources" (1986) de Claude Berri, Les chefs décorateurs Ezio Frigerio et Jacques Rouxel, la Cheffe costumière Franca Squarciapino qui tous se retrouveront pour "Le Hussard sur le Toit" (1995)... 1640, le cadet de Gascogne Cyrano de Bergerac est contraint de souffrir en secret en aidant un jeune camarade à séduire sa belle cousine Roxane dont elle est amoureuse. Mais il faut aussi compter sur le comte de Guiche, prétendant riche et puissant qui, vexé, se venge en envoyant les cadets de Gascogne au siège d'Arras... 

Cyrano est incarné par Gérard Depardieu également à l'affiche cette même année dans "Green Card" (1990) de Peter Weir et "Uranus" (1990) de Claude Berri et retrouvera l'équipe du film pour "Le Hussard sur le Toit" (1995) et plus tard dans "Bon Voyage" (2003), et retrouvera juste après dans "Tous les Matins du Monde" (1991) de Alain Corneau sa partenaire Anne Brochet qui débute alors après "Masques" (1987) de Claude Chabrol et "La Maison Assassinée" (1988) de Georges Lautner. Le jeune prétendant est joué par Vincent Pérez qui aimera revenir au Cape et d'Epée avec entre autre "La Reine Margot" (1994) de Patrice Chéreau, "Le Bossu" (1997) de Philippe De Broca ou plus récemment son propre film "Une Affaire d'Honneur" (2023), tandis que le comte de Guiche est joué par Jacques Weber qui a la particularité d'avoir lui-même incarné Cyrano au théâtre plus de 500 fois entre 1979 et 1985, à l'instar aussi de Michel Vuillermoz qui vient alors de débuter dans "La Bande des Quatre" (1988) de Jacques Rivette et "Un Père et Passe" (1989) de Sébastien Grall et qui interprètera Cyrano plus de 280 fois au théâtre entre 2006 et 2017. Citons ensuite Pierre Maguelon vu cette même année das "La Gloire de mon Père" (1990) et "Le Château de ma Mère" (1990) tous deux de Yves Robert et retrouve après "Le Pull-Over Rouge" (1979) de Michel Drach son partenaire Roland Bertin vu sur la même période dans "Le Mari de la Coiffeuse" (1990) de Patrice Leconte, Philippe Volter vu dans "Le Maître de Musique" (1988) de Gérard Corbiau et "Les Bois Noirs" (1989) de Jacques Deray et retrouvera dans "Trois Couleurs : Bleu" (1993) de Krzysztof Kieslowski l'acteur Philippe Morier-Genoud qui retrouvera aussi dans "Les Enfants du Siècle" (1999) de Diane Kurys la toute jeune Ludivine Sagnier qui sera réellement révélée avec "Gouttes d'Eau sur Pierres Brûlantes" (2000) de François Ozon. Citons encore Josiane Stoléru vue juste avant dans "Fréquence Meurtre" (1988) de Elizabeth Rappeneau soeur du réalisateur, Jean-Marie Winling qui retrouvera d'ailleurs Jean-Paul Rappeneau dans "Le Hussard sur le Toit" (1995) et "Belles Familles" (2015), Alain Rimoux vu notamment dans "La Petite Bande" (1983) de Michel Deville et "La Diagonale du Fou" (1984) de Richard Dembo, Louis Navarre vu dans "Le Distrait" (1970) de et avec Pierre Richard, "Le Magnifique" (1973) de Philippe De Broca ou "Ronde de Nuit" (1984) de Jean-Claude Missiaen, Catherine Ferran soeur de la réalisatrice Pascale Ferran pour qui elle tournera dans "Petits Arrangements avec les Morts" (1994), Hervé Pauchon acteur fétiche de Jean-Pierre Mocky sur 8 films de "À Mort l'Arbitre" (1984) à "Les Insomniaques" (2011), puis enfin Sandrine Kiberlain alors en début de carrière et qui sera surtout remarquée dans "Les Patriotes" (1994) de Eric Rochant... Les droits de la pièce de théâtre originale sont tombés dans le domaine public, ce qui a permis à la production de monter un budget à plus de 15 millions d'euros, avec un soin tout particulier pour les costumes (rappelons oscarisés et césarisé), et les décors dont on peut citer les lieux emblématiques comme l'abbaye de Fontenay, la cité Plantagenêt au Mans ou encore Fontainebleau. Rappelons enfin que Cyrano a réellement existé, ainsi que Roxane qui était vraiment sa cousine, les prétendants Christian de Neuvilette et le comte de Guiche ont aussi existé même si les noms ont été modifiés et si l'histoire est une fiction Edmond Rostand a repris de nombreux faits réels et a respecté la chronologie historique notamment vis à vis du siège d'Arras et de la mort de Cyrano en 1655. On peut voir dans cette évocation un biopic romancé de Cyrano de Bergerac (Tout savoir ICI !). Ce mix entre la grande Histoire, le théâtre et surtout le verbe en vers est ce qui offre toute la singularité du film. 

Il y a de nombreuses références historiques qui donne du corps et une véracité au récit, bien aidé par les décors et les costumes, les vers du texte ont été aussi remaniés, raccourcis parfois, coupés réécrit parfois, une nécessité par la durée du film mais aussi pour éviter toute lourdeur poétique tout en gardant la verve de Edmond Rostand, et enfin il y a la mise en scène fluide et mobile de Rappeneau qui évite ainsi le "théâtre filmé" en multipliant aussi les décors et en insistant sur le panache de ses personnages, et pas seulement celui de Cyrano. On est bel et bien dans un film, on pourrait juste s'attarder sur la scène du balcon qui demeure trop théâtralisée (comment Roxane peut-elle être aussi bernée par les deux cadets juste en-dessous ?!) mais cela rappelle aussi qu'on est dans une fable romanesque. Le matériau d'origine est évidemment une richesse qu'on savoure, toute la gourmandise de Depardieu pour le verbe reste jouissive, et si on rit au début c'est pour aller vers une émotion aussi douce que tragique à la fin. Cette version est de loin la plus réussie des adaptations du genre, un chef d'oeuvre plein de fougue où jamais le geste n'a été aussi raccord avec le verbe. Un monument de cinéma à voir, revoir et à conseiller.

Avis de Llowenn ICI

Note :  

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19/20