Mad Fate (2024) de Soi Cheang

Nouveau long métrage du réalisateur chinois (né à Macao mais hong-konais) Soi Cheang après entre autre "Love Battlefield" (2004), "Motorway" (2012), la trilogie "The Monkey King" (2014-2018) et surtout son excellent "Limbo" (2023). Il met en scène un scénario co-écrit par Melvin Li qu'il retrouve après "Dog Bite Dog" (2006) qui était une production de Johnnie To d'ailleurs également producteur de "Mad Fate", en lien justement avec le second scénariste, Nai-Hoi Yau fidèle collaborateur de To sur notamment "The Mission" (1999), "PTU" (2003), le dyptique "Election" (2005-2006) ou "Dru War" (2012). Le film a été primé au Hong Kong Film Awards 2024 avec les trophées de la Meilleure réalisation, Meilleur scénario et Meilleur montage. Film interdit au moins de 12 ans...

Par une nuit d'orage, un maître de fen shui tente de sauver une prostituée d'une mort certaine mais elle est malheureusement victime d'un tueur en série. Un livreur arrive sur les lieux du crime qui semble comme hypotisé par la scène. Le maître de feng shui lui prédit un avenir sombre et sanglant tandis que le policier chargé de l'enquête est convaincu que ce livreur est un psychopathe inné... Le maître de feng shui est incarné par Gordon Lam qui retrouve son réalisateur de "Limbo" (2023), remarqué sur la franchise "Infernal Affaits" (2002) de Andrew Lau et Alan Mak, et surtout acteur fétiche de Johnnie To dans une quinzaine de films depuis depuis les "Election" (2005-2006) retrouvant ainsi après des films comme "Triangle" (2007) et "Vengeance" (2009) son partenaire Ting Yip Ng qui était aussi dans "Filatures" (2006) unique film en tant que réalisateur du scénariste Nai-Hoi Yau, puis dans le magnifique "The Grandmaster" (2013) de Wong Kar-Wai. Citons ensuite Lok Man Yeung vu dans "Kwong Mo pai" (2013) et "The Way we keep Dancing" (2020) tous deux de Adam Wong, Ng Wing Sze actrice remarquée dans "Head-to-Tail" (2018) de Luther Ng et "The Abortionist" (2019) de Fruit Chan, puis enfin Charm Man Chan vu notamment dans "Everyphone Everywhere" (2023) de Amos Why, "Time still Turns the Pages" (2023) de Nick Cheuk et "In Broad Daylight" (2023) de Lawrence Kwan et Chun Kan... Le scénario reprend des paramètres inhérents au genre du thriller psychologique avec un tueur en série et un flic coriace, mais ce qui fait l'originalité de cette histoire est qu'on y ajoute un tiers qui aurait tout du "copieur" en puissance de serial killer, puis un maître du Feng Shui qui prend très au sérieux sa mission qui est en quelque sorte le medium à l'américaine. Le "copieur" est un paramètre passionnant puisqu'il est traité alors même qu'il n'a encore rien fait, par contre le Feng Shui (tout savoir ICI !) est un paramètre certe intéressant mais qui semble déformé dans sa dimension philosophique et qui devient plus un élément de sorcellerie pure poussant le film dans un contexte fantastique qui ne colle pas franchement à une enquête qui s'avère très cartésienne à la base, jusqu'à ce dernier acte un peu farfelu.

On a droit également aux paramètres récurrents comme la pluie et la grisaille, qui sont ici peu mis en valeur par une photographie trop terne qui s'engonce dans un surréalisme céleste qui pousse aussi et encore le film dans un autre genre, à croire que des fantômes ou des esprits maléfiques vont descendre des cieux. Le surjeu du livreur psychopathe n'aide pas surtout qu'il est en contradiction avec la finesse du tueur en série et le flic plutôt ancré dans la réalité des choses. Le chassé croisé entre les quatre personnages principaux (serial killer, livreur, flic et maître Feng Shui) est bien mené, avec du rythme et des rebondissements qui ne laissent pas place à l'ennui. c'est prenant et même assez fascinant jusqu'au milieu du film. Malheureusement la fin vire petit à petit dans le grotesque et un final farfelu et capillotracté... ATTENTION SPOILERS !... D'abord les coups de surin dans le cou semble peu mortels finalement, le côté fantastique prend largement le dessus et on perd le sens même du terme Feng Shui, les twists dans tous les sens font surtout un final confus voir incohérent car comment chaque esprit peut-il aussi facilement changé de corps ?!... FIN SPOILERS !... Pourtant on aurait aimé plus le film, rien que par certaines audaces. Heureusement la vie nocturne, les bas fonds offrent un climax idéal, les meurtres sont assez gores pour accentuer les émotions comme la naïveté de la prostituée ou la détresse des proches du livreur. La mise en scène ne manque pas d'idées et le film reste assez singulier pour oser faire un détour.

Note :                 

Fate (2024) CheangFate (2024) Cheang

12/20