Les Barbares (2024) de Julie Delpy

Retour de Julie Delpy derrière la caméra après "My Zoe" (2021) et revient à la comédie chorale mais après la cellule familiale de "Skylab" (2011) elle part à la rencontre de la communauté d'un petit village breton. Réalisatrice-scénariste elle co-écrit avec le duo Matthieu Rumani et Nicolas Slomka qui ont écrit pour la série TV "Family Business" (2020-2021) et surtout la récente comédie "Les Chèvres !" (2024) de Fred Cavayé... A Paimpont l'harmonie règne parmi les habitants. C'est ainsi que dans un élan de solidarité suite à la guerre pas si lointaine, les citoyens acceptent avec enthousiasme d'accueillir des réfugiés ukrainiens. Mais le jour J les habitants voient débarquer des réfugiés syriens. Ce changement n'est pas du goût de tous... 

Les citoyens de Paimpont sont joués par Julie Delpy elle-même vue au cinéma uniquement dans "The Lesson" (2023) de Alice Troughton depuis son propre film "My Zoe" (2019), Sandrine Kiberlain vue dans "Le Parfum Vert" (2023) de Nicolas Pariser et "La Petite Vadrouille" (2024) de et avec Bruno Podalydès, Laurent Lafitte vu récemment dans "Le Molière Imaginaire" (2024) de Olivier Py et "Le Comte de Monte Cristo" (2024) de Mathieu Delaporte et Alexandre de La Patellière, India Hair vue dans "Les Petites Victoires" (2023) de Mélanie Auffret et "Jeanne du Barry" (2023) de et avec Maïwenn et retrouve après "Rien à Perdre" (2023) de Delphine Deloget son partenaire Mathieu Demy vu dernièrement dans "Club Zero" (2023) de Jessica Hausner et "Le Procès du Chien" (2024) de et avec Laetitia Dosch, Monsieur Fraize aperçu dans "Astérix et Obélix : l'Empire du Milieu" (2023) de et avec Guillaume Canet et "Daaaaaali !" (2023) de Quentin Dupieux, Emilie Gavois-Kahn vu dans "Le Dernier Voyage" (2020) et "Apaches" (2023) tous deux de Romain Quirot, Albert Delpy qui retrouve sa fille après "Two Days in Paris" (2006), "Le Skylab" (2011) et "Two Days in New-York" (2012) et Brigitte Roüan vu dans "Voir le Jour" (2020) de Marion Lane u "Choeur de Rockers" (2022) de Ida Techer et Luc Bricault. Les syriens sont joués par Ziad Bakri vue dans "Le Temps qu'il Reste" (2009) de Elia Suleiman, "Miral" (2010) de Julian Schnabel ou "Self Made" (2014) de Shira Geffen et retrouve son partenaire Fares Helou après le film "Le Traducteur" (2020) de Rana Kazkaz et Anas Khalaf... Forcément vu le speech on ne peut que penser au tout récent "The Old Aak" (2023) de Ken Loach, ce dernier signant une comédie dramatique et social militant comme à son habitude, tandis que chez nous Julie Delpy offre une comédie sociale toute aussi militante mais dont l'humour quitte peu à peu le récit pour tomber dans l'écueil du politiquement correct et sérieux avec sa dose de bons sentiments pour faire avaler la pilule du vivre ensemble. La réalisatrice précise : "J'avais envie de décrire toute la palette du racisme, ses différents degrés, jusqu'à son inverse, la bienveillance ou la culpabilité. Le contexte d'un village, à la fois lieu clos mais aussi empli d'une variété était idéal..." Sur ce point elle réussit son pari, le panel est pertinent mais dans le même coup, à force de vouloir être consensuel dans son message politique la cinéaste démontre aussi un certain manichéïsme. En effet les provinciaux français sont des caricatures, de la bienveillance du maire au policier psychologiquement fragile, à l'alcoolisme (mais si c'est une femme il doit forcément y avoir une raison machiste derrière ?!), en passant par les identitaires bretons violents, sans oublier les guéguerres de chapelle et les commérages, il ne faut pas non plus oublier #MeToo dont le porte-drapeaux Julie Delpy se pose en féministe sectaire car les femmes sont victimes quoi qu'il arrive et les hommes sont tous des rustres, goujats, trompeurs, menteurs ou lâches... sauf (!)...

les syriens, hommes comme femmes, enfants ou non qui forment la seule entité du village sans tares ni vices, ils sont donc dignes, courageux, polis, travailleurs, les femmes aiment même le sexe et sont jolies, par contre avoir choisit des syriens permet de monter très habilement que musulmans (non pratiquants a priori) ne veut pas dire islamistes. Alors oui, Julie Delpy ne fait pas dans le subtil, et dans un sens c'est heureux, ça aurait pu et dû être encore plus heureux puisqu'on promettait et désirait une vraie comédie mais comme souvent dans la comédie française de ce nouveau siècle on nous interdit de rire aux éclats, on nous interdit de rire dans un film du début à la fin. Le début est excellent, c'est drôle, pertinent, jubilatoire, savoureux, parce que les dialogues sont ciselés autant que les acteurs sont investis et inspirés. Mais au fil du récit ça s'essoufle, les clichés commencent à revenir (idylle adolescente, le twist émotion, le twist du pardon...) et à partir du milieu du film on devine bien que le scénario reprend la route du canevas éculé du genre et devient sans surprise, et pire, devient moins drôle car il faut émouvoir et si besoin faire réfléchir le pauvre spectateur inculte et irréfléchi à coups de forceps. Dommage... Heureusement, la sincérité de l'entreprise, les personnages français bien croqués  (dommage encore qu'il y tant de différence de traitement entre le français caricaturé et le syrien bien sous tous rapports et sérieux), dont le raciste Laurent Lafitte impayable, la cocue alcoolique touchante Sandrine Bonnaire, le pauvre maire trop gentil Jean-Charles Clichet, et le toujours succulent père Delpy... et plusieurs séquences très réussies dont la grande majorité se regroupe dans la première moitié du film. Un film maladroit et bancal mais optimiste et bienveillant. Note indulgente.

Note :                 

Barbares (2024) Julie DelpyBarbares (2024) Julie Delpy

12/20