Le Fil (2024) de Daniel Auteuil

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Nouveau long métrage en tant que réalisateur pour la star Daniel Auteuil après ses débuts via l'oeuvre de Marcel Pagnol avec "La Fille du Puisatier" (2011), "Marius" et "Fanny" (2013) et la comédie oubliable et oubliée "Amoureux de ma Femme" (2018). Le réalisateur-scénariste-acteur a eu l'idée du film après que sa fille Nelly lui ait fait découvrir le blog Maître Mô, alias de l'avocat Jean-Yves Moyart (mort en 2021). Le cinéaste explique : "Ce qui constitue toute la beauté de ce métier : rendre compte de l'indicible, au-delà du décorum. Au fil de ma lecture, j'ai été fasciné par cette réflexion autour de la notion de vérité qui diffère selon les uns et les autres. La vérité qui devient une intime conviction, quelque chose d'impalpable. La découverte de ce blog m'a conduit au coeur de l'humanité, dans toute sa force et sa fragilité mêlées. J'ai donc eu envie de faire un film pour raconter cette quête de vérité." Daniel Auteuil a assisté à un procès sur une affaire similaire afin de préparer son film et qui a eu une importance capitale dans sa vision des choses : "J'ai été sidéré de voir l'absence totale des faits dans les échanges entre l'accusation et la défense. J'ai donc eu envie de raconter ce procès comme je l'avais ressenti avec un sentiment d'effroi. De montrer qu'au fond, souvent, les témoins n'ont rien vu de précis, il n'y a pas de preuve flagrante, ni de mobile." Daniel Auteuil co-écrit son scénario avec Steven Mitz, auteur méconnu ayant co-écrit les films inédits "Connemara" (2022) et "Ma Famille Chérie" (2024) tous deux de Isild Le Besco... 

Depuis qu'il a fait innocenter un meurtrier récidiviste, maître Jean Monier ne prend plus de dossiers criminels. La rencontre avec Nicolas Milik, père de famille accusé du meurtre de sa femme, le touche et fait vaciller ses certitudes. Convaincu de l'innocence de son client, il est prêt à tout pour lui faire gagner son procès aux Assises, retrouvant ainsi le sens de sa vocation... L'avocat est incarné par le réalisateur lui-même, Daniel Auteuil vu récemment dans "Un Silence" (2024) de Joachim Lafosse et "La Petite Vadrouille" (2024) de et avec Bruno Podalydès. Son nouveau client est joué par Grégory Gadebois vu dernièrement dans "Paternel" (2024) de Ronan Tronchot et "Les Chèvres !" (2024) de Fred Cavayé. Ils sont entourés par Sidse Babett Knudsen qui retrouve indirectement la robe après "L'Hermine" (2015) de Christian Vincent et vue récemment dans "Juste Ciel !" (2023) de Laurent Tirard et surtout "Sons" (2024) de Gustav Möller, Alice Belaïdi qui retrouve Daniel Auteuil après "Le Nouveau Jouet" (2022) de James Huth et vue récemment dans l'incroyable succès "Un P'tit Truc en Plus" (2024) de et avec Artus, Suliane Brahim vu dans "La Nuée" (2020) et "Acide" (2023) tous deux de Just Philippot ou "Je verrai Toujours vos Visages" (2023) de Jeanne Herry et retrouve après "Libre et Assoupi" (2014) de Benjamin Guedj sa partenaire Isabelle Candelier actrice fétiche de Bruno Podalydès depuis "Versailles Rive-Gauche" (1992) à l'instar de son camarade Jean-Noël Brouté depuis "Dieu seul me Voit" (1998) et qui retrouvent tous deux Daniel Auteuil après "La Petite Vadrouille" (2024), Gaëtan Roussel leader du groupe Louise Attaque dans son premier vrai rôle après sa rencontre avec Daniel Auteuil qui jouait dans son clip "Je me jette à ton cou" (2021), puis enfin Aurore Auteuil, fille de, aperçue entre autre dans "Confidences trop Intimes" (2004) de Patrice Leconte ou "Comme t'y es Belle !" (2006) de Lisa Azuelos... Daniel Auteuil a choisi le sous-genre du film judiciaire qui est revenu à la mode en France ces derniers temps avec quelques très bons films "La Fille au Bracelet" (2020) de Stephane Demoustier, "Les Choses Humaines" (2021) de Yvan Attal, "Le Procès Goldman" (2023) de Cédric Khan ou "Anatomie d'une Chute" (2023) de Justine Triet. Auteuil choisit un genre hyper codifié sur lequel il est facile de se laisser aller à un académisme qui sied naturellement à l'austérité des tribunaux. Si dès le départ on nous précise qu'il s'agit d'une histoire vraie, il est facile de se valoir de l'avocat Jean-Yves Moyart tout en donnant un autre nom au personnage principal, en occultant Maître Mô et son rôle d'influenceur sur les réseaux sociaux, tandis qu'on note qu'on apprend quasi rien sur cet avocat outre son absence des Cours d'Assises depuis 15 ans. Pourtant le film repose essentiellement sur lui, puis sur son lien avec son client Milik/Gadebois.

Si ce sont deux acteurs magnifiques et talentueux, il n'en demeure pas moins que le scénario délaisse de façon flagrant tous les autres rôles, les seconds rôles également dont des rôles féminins sous-exploités malgré des actrices de renom pour les incarner ; on est triste pour Sidse Babett Knudsen, mais aussi pour Alice Belaïdi pourtant convaincante, et même Suliane Brahim résumée à deux répliques. Le réalisateur Auteuil opte pour un visuel qui paraît un peu désuet avec une lumière nimbée et une sorte de gris blafard, sans oublier la pluie et le manque de luminosité jusque dans la salle d'audience. Pourquoi pas... Par contre il choisit une métaphore lourdingue et poussive avec la tauromachie qui est autant une faute de goût qu'un choix hasardeux voir superflu. Pourtant l'intrigue est prenante, nous amenant au doute tout en nous montrant du doigt le "vrai" coupable. Si la plupart du temps le suspense s'évente au fil du récit, cette fois-ci Auteuil arrive à faire l'inverse, de nos certitudes du départ on doute de plus en plus jusqu'au twist final. En conclusion, un film solide sur le déroulement pur du procès, sur le face à face avocat-client, sur les questionnements pros comme perso de l'avocat, mais malheureusement pêche sur la forme, ça manque d'interactions plus probantes avec les autres protagonistes (dont les femmes) et surtout aurait dû s'abstenir sur le partie tauromachie.

Note :                 

13/20