Personnages, thèmes, action : la trinité de l'harmonie dans l'écriture d'un scénario. Autant il faut faire attention à la qualité de chacun de ces trois axes, l'important, néanmoins, est de les combiner afin que votre récit fasse un tout.
Le premier point d'importance : les thèmes
Les trajectoires des personnages, les nœuds dramatiques qui organisent le récit et jusqu'aux dialogues, tous devraient avoir un rapport plus ou moins confus avec l'un des trois ou quatre thèmes dont traitent le récit. Cette unité thématique comme par exemple la question de la rédemption parlera par exemple de notre liberté de choisir. Nous pourrions poser la question (les thèmes se formulent aisément lorsqu'ils questionnent) : notre liberté nous empêche t-elle de connaître la rédemption ?
Bien sûr, cette question fondamentale d'un récit en projet sera une thématique : tirées de la première question, le récit soulèvera d'autres questions telles que la rédemption nécessite t'elle une soumission ? ; N'implique t'elle pas de renoncer à une partie de soi-même ? ; Jusqu'où notre liberté individuelle empêche la reconnaissance de nos fautes ?
Par l'unité thématique, le lecteur/spectateur perçoit le récit de manière intelligible tout en participant aux réponses, qu'il apprécie plus ou moins, que nous lui donnerons.
La causalité
Voilà bien un problème qui occupe l'autrice et l'auteur. Admettons qu'un récit soit plus facile à écrire lorsque les événements et les décisions découlent les uns des autres. Cette logique veut qu'une action provoque une réaction. Comme dans la vraie vie, face à un interlocuteur, vous lui avouez ses quatre vérités, il est constant qu'il réagira : colère, pleurs, révélation...
S'il n'y a pas ce lien causal, nous devrons gérer la fragmentation. Le récit n'en sera pas moins efficace mais plus difficile à comprendre pour le lecteur/spectateur. Il devra faire lui-même l'effort de comprendre comment & pourquoi les personnages évoluent comme ils le font. Devons-nous vraiment expliquer la confusion d'un personnage ? Ou hésiter à placer des ellipses ? Ou encore refuser des points de vue multiples sur notre récit ?
Fragmenté ou non, votre récit engagera son lecteur/spectateur ; du moins, si ce récit accepte de ne pas faire entrer la providence ou des coïncidences pour expliquer ce qu'il s'y passe. Le philosophe Kierkegaard décrit le vertige des possibilités qui s'offre à nous quant à nos choix. Donc, quant à l'effet et à sa cause, pourquoi systématiquement vouloir établir un lien fort ?
Une structure reflétera cette incertitude que Kierkegaard nomme angoisse devant l'infinité de nos choix et de nos possibles. Les personnages agissent comme ils sont libres de le faire. Et vous aussi, en tant qu'autrice et auteur, vous possédez cette volonté libre. Les aléas d'un parcours dans l'obtention d'un désir ou bien des réactions spontanées aident à la vraisemblance. Nos motivations sont changeantes et même parfois irrationnelles. Pourquoi en priver nos personnages ?
Donc, selon le moment, nous jouerons avec la causalité et à d'autres moments avec la spontanéité.
L'arc dramatique
La Jetée (1962). L'Homme se confronte à des décisions qui n'ont pas de liens apparents. Il est à la fois l'acteur et le spectateur de sa propre destinée. Or cette liberté semble paradoxale : le personnage est libre mais la structure du récit le ramène toujours à une conclusion inexorable comme si le passé limitait notre liberté. La question est de savoir quelle est la part de notre liberté et celle de la fatalité dans notre destinée.
Bagdad Café (1987) de Percy Adlon. Chacun des personnages dans ce récit a besoin de se réinventer. Jasmin cherche un nouveau sens à sa vie depuis sa séparation mais Brenda lutte aussi pour se trouver un sens à son existence, ne serait-ce que de maintenir le Bagdad Café !
L'important n'est pas tant l'arc de chacune de ces personnes mais, bien entendu, l'évolution de leur relation qui vise précisément le thème de la transformation, de trouver en soi l'autre si longtemps réprimé.
La scène
Lorsque nous écrivons une scène, il est bon de se demander si elle sert l'intrigue ou bien si elle permet de découvrir des aspects d'un personnage jusqu'à présent cachés. Préservons l'intelligence de notre lecteur/spectateur. Dit autrement, faites la chasse aux détails superflus et aux scènes dont le récit peut se passer sans que cela lui nuise.