Lee Miller (2024) de Ellen Kuras

Ce projet est avant tout celui d'une star, Kate Winslet, qui en 2015 suite à une vente aux enchères entend parler d'une mannequin égérie du surréalisme devenue reporte de guerre, Elizabeth Lee Miller (Tout savoir ICI !) et qui décide d'en savoir plus sur elle, se demandant par là même comment un tel destin n'a-t-il jamais été porté à l'écran ? Fascinée par ce destin hors du commun l'actrice prend contact avec Antony Penrose, fils de cette dernière qui avait auparavant refusé plusieurs scénarios écrit par des hommes. Leur collaboration a ainsi débuté, l'actrice a pu avoir accès aux archives familiales tandis qu'elle décide de porter le projet. Malgré son statut, l'actrice va avoir bien des difficultés à trouver le financement allant jusqu'à payer de sa poche les membres de l'équipe du film durant deux semaines de tournages. Actrice devenue productrice elle a également téléphoné elle-même aux acteurs-actrices qu'elle désirait pour le film et ce, bien avant de trouver son réalisateur. Ce sera plus logiquement une réalisatrice, Elle Kuras pour son premier film en tant que réalisatrice étant au départ Directrice Photo renommée notamment sur "Summer of Sam" (1999) de Spike Lee, "The Ballad of Jack and Rose" (2005) de Rebecca Miller ou "Away We Go" (2009) de Sam Mendes et aussi sur le magnifique "Eternal Sunshine of the Spotless Mind" (2004) de Michel Gondry après lequel elle retrouve donc Kate Winslet. Le choix a été fait de se focaliser sur une décennie, pour être au centre de la période 39-45. Le scénario est écrit par John Collee à qui on doit entre autre les scénarios de "Master and Commander" (2003) de Peter Weir, "Tarzan" (2016) de David Yates ou "Monkey Man" (2024) de et avec Dev Patel, Marion Hume qui avait collaboré au documentaire "Lee Miller : Mannequin et Photographe de Guerre" (2020) de Teresa Griffiths, puis Liz Hannah qui a écrit entre autre "Pentagon Papers" (2017) de Steven Spielberg et "Séduis-Moi si tu Peux" (2019) de Jonathan Levine, en prenant comme base la biographie "Les Vies de Lee Miller" (1985) de Antony Penrose. Le film retrace la vie de Lee Miller, égérie du surréalisme qui revient à Paris en 1937 et après en avoir été une des mannequins elle devient reporter photo pour le magazine Vogue. La Seconde Guerre Mondiale éclate et très vite Lee Miller veut devenir reporter de guerre que sa condition de femme ne facilite guère. Elle va devenir une des premières femmes reporter et une des premières à être témoin des Camps de la Mort, jusqu'à une photographie mythique en 1945 dans une baignoire qui n'a rien d'anodine... 

La Productrice-actrice Kate Winslet incarne logiquement Lee Miller après avoir déjà été artiste dans "Ammonite" (2021) de Francis Lee et après un passage dans le blockbuster "Avatar : la Voie de l'Eau" (2022) de James Cameron. Parmi les hommes de sa vie citons Alexander Skarsgard vu dans "Clair-Obscur" (2021) de Rebecca Hall et "The Northman" (2022) de Robert Eggers, puis Andy Samberg vu notamment dans "I Love You" (2009) de John Hamburg ou "Crazy Dad" (2012) de Sean Anders, sans oublier le fils joué par Josh O'Connor vu dans "The Riot Club" (2014) de Lone Scherfig, "Emma" (2020) de Autumn de Wilde ou "Challengers" (2024) de Luca Guadagnino. Citons encore Andrea Riseborough vue dans "Shadow Dancer" (2012) de James Marsh, "La Mort de Staline" (2018) de Armando Iannucci ou "Amsterdam" (2022) de David O. Russell, Samuel Barnett aperçu dans "Bright Star" (2009) de Jane Campion, "Jupiter, le Destin de l'Univers" (2015) des Wachowski ou "The Lady in the Van" (2015) de Nicholas Hytner, puis citons les frenchies avec Marion Cotillard qui retrouve Kate Winslet après "Contagion" (2011) de Steven Soderbergh et vue récemment dans "Little Girl Blue" (2023) de Mona Achache, Vincent Lacombe apparu entre autre dans "Mon Roi" (2014) et "Jeanne du Barry" (2022) tous deux de Maïwenn, Noémie Merlant vue tout récemment dans "Une Année Difficile" (2023) du duo Toledano-Nakache et "Emmanuelle" (2024) de Audrey Diwan, Patrick Mille vu dans le dyptique "Les Trois Mousquetaires" (2023) de Martin Bourboulon et "Le Comte de Montre Cristo" (2024) du duo Delaporte-de La Patellière, puis enfin Zita Hanrot vue dernièrement dans "A mon Seul Désir" (2023) de Lucie Borleteau et "L'Homme Debout" (2023) de Florence Vignon... L'investissement de Kate Winslet est essentiel, et notamment en ayant la complète collaboration du fils de Lee Miller, Antony Penrose qui a prêté ses archives pour le tournage dont les milliers de photographies qui apparaissent dans le film. Pour aller le plus loin possible dans l'authenticité on peut aussi noter que les fameux couturier de Saville Row à Londres qui confectionnaient les costumes de la véritable Lee Miller ont été également mis à contribution, faisant tailler sur mesure des reproductions des vêtements Lee Miller dont son uniforme. Il y a aussi le destin, où comment Kate Winslet s'est assez gravement blessé au dos le premier jour de tournage l'handicapant assez pour avoir des difficultés à se mouvoir, ce qui au final a servi sa performance puisque Lee Miller souffrait elle-même du dos. Plus contestable car par vraiment cohérent avec le réalisme recherché, est d'avoir intégré à l'histoire le personnage du journaliste interviewant Lee Miller à la fin de sa vie permettant un long flash-back... ATTENTION SPOILERS !... Par contre, si au départ on s'agace de ce journaliste fictif qui impose un lourd processus de flash-backs, il est largement compensé par le twist final qui offre ainsi un instant émotion qui n'est pas franchement attendu ... FIN SPOILERS !... 

Le film débute dans l'insouciance pré-guerre et dans l'esprit artiste bobo surréaliste un peu beaucoup trop images d'épinal (dont la pauvre Zita Hanrot complètement anecdotique voir invisible), mais surtout d'emblée on remarque que le film occulte quelques points de la vie de Lee Miller, dont le plus flagrant : jamais n'est mentionné l'époux de Lee Miller depuis 1934, riche homme d'affaire égyptien jusqu'en 1947. Par là même on s'étonne que le film omet le fait que son équipier David Sherman a été son "amant de guerre". Le scénario est très intéressant du point de vue féministe, où comment elle a dû se battre pour imposer son sexe dans un monde d'hommes. Mais en même temps les ellipses sont nombreuses, les raccourcis faciles et finalement le récit se fait résumé vite fait bien fait sans jamais réellement exploité le sujet, à savoir les camps de la mort. Les photos sont rares, voir même assez sages, et le temps de présence à l'écran des camps de la mort n'est pas si importants sur l'ensemble du film. Quelques passage sont mêmes un peu ridicules comme la reconstitution très factice de la libération de Paris, les quelques secondes entre autre de la place du Trocadéro sont vraiment mal mises en scène, mal incarnées où on perçoit la théâtralité de la scène plutôt qu'une ferveur authentique, on peut aussi noter la fillette mignonne et pouponne dont on ne perçoit pas la faim ou la souffrance malgré ses yeux magnifiquement embués. Des détails qui atténuent forcément l'émotion. Heureusement Kate Winslet est évidemment merveilleuse, les autres acteurs ne sont pas en reste dont une scène de retrouvaille déchirante avec Marion Cotillard, quelques passages restent marquantes dont la séquence de la photo emblématique dans l'appartement de Hitler ; là aussi, le film raconte un moment quasi furtif alors que Lee Miller est resté en réalité avec son équipier-amant plusieurs jours dans le logement. En conclusion, un film hommage qui est mérité, avec une actrice investie et si talentueuse, mais qui manque de souffle, de puissance et d'une partie camp de concentration trop survolée. La forme n'a pas l'audace de son héroïne et qui se repose sur un fond qui reste logiquement passionnante. 

Note :                 

Miller (2024) Ellen KurasMiller (2024) Ellen Kuras

13/20