Qu'il s'agisse de répondre à un besoin, de concrétiser un quelconque désir ou bien le plus souvent de résoudre un problème, ce qui nous meut est une motivation. Avec une motivation, l'idée devient action et direction.
Pour que le lecteur/spectateur comprenne ce qui fait agir un personnage, il doit se saisir de sa motivation. Si celle-ci est confuse, il le sera aussi. Une menace par exemple nous incitera à prendre les mesures nécessaires pour s'en protéger ; une opportunité qui s'offre soudainement à nous et nous voilà lancé dans l'inconnu.
Plus dramatique est une force intérieure comme une insatisfaction ou un manque. La peur du vide est une puissante motivation.
Le vécu d'un personnage (c'est-à-dire ce qu'il s'est passé dans sa vie avant le récit présent) peut expliquer un comportement comme, par exemple, une blessure amoureuse et nous voilà fermé à toutes nouvelles rencontres : mécanisme de défense contre la réminiscence de la souffrance, mais le passé ne justifie pas une motivation. Comme les discours et les analepses brisent l'élan d'une intrigue, il faut les distribuer avec parcimonie.
L'action présente est alors importante dans les décisions qui sont prises en regard d'une motivation. Cette action sera un moment de crise ou un événement actuel qui sont alors les causes qui établissent la motivation. Quand un être cher est blessé par la vie, c'est une raison suffisante et nécessaire pour nous décider à agir et à nous arc-bouter (c'est l'objectif) à le soutenir jusqu'à nous en oublier nous-mêmes.
Le passé n'est pas tout
Les Plus Belles Années de Notre Vie (1946) de William Wyler comprend qu'il est incapable de renouer avec sa vie d'avant et c'est bien cette prise de conscience, événement en regard d'une situation présente, qui le motive à retrouver sa place et à surmonter ses traumatismes.
La personnalité d'un personnage éclaire comment il réagit dans la situation présente. Cependant, ce sera sa motivation qui initie son action et rend celle-ci pertinente pour l'intrigue. Un être tout empreint de solitude affiche un mépris envers autrui ; ce qu'il juge être sa tranquillité. Au détour d'un chemin, il rencontre une âme encore plus solitaire que lui. Mais celle-ci est si désespérée qu'un fort sentiment de compassion s'éveille en lui. Devant l'urgence à sauver cet autre de l'anéantissement, une motivation et un objectif se gravent en lui et, au bout du compte, lui donne un sens à sa vie.
Paradoxalement, c'est son désir de solitude qui rend son action crédible mais c'est bien l'enjeu actuel qui consiste ici à sauver un être en péril qui fascine le lecteur/spectateur. Certes, le personnage n'est pas immédiatement proactif. Il subit encore son passé, le bouleversement de l'incident déclencheur, les obstacles qui ne sont souvent que des petites victoires mais rien vraiment qui l'incite à se motiver avec une intention précise.
Il faut un événement actuel qui remet en cause ses valeurs et le fait s'interroger sur ses choix moraux. Walter dansThe Woodsman (2004) de Nicole Kassell souhaite vivre à l'écart des autres depuis sa libération de prison : en un mot, il veut qu'on lui fiche la paix. Évidemment, c'est trop demander au monde. Mais il rencontre une jeune fille et là, son véritable combat commence : il prend conscience qu'il peut choisir entre faire le mal (ses pulsions) ou faire le bien (c'est-à-dire se contrôler). Il écrira lui-même son propre chemin vers la rédemption s'il ne se perd pas en route.