The Substance (2024) de Coralie Fargeat

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Après ses courts métrages "Le Télégramme" (2003) et "Reality+" (2014) Coralie Fargeat se fait remarquer avec son premier long métrage "Revenge" (2017). Elle attendra pourtant des années avant d'annoncer en 2022 que son prochain projet sera ce qu'elle qualifie de "body horror féministe". L'idée lui serait venu avec l'arrivée de la quarantaine qu'elle a vu comme le début de la fin, et après le constat est venu le temps du réveil comme elle l'explique: "Il faut en venir avec cette merde ! Le cinéma de genre est politique. Pour moi, en tant que cinéaste, le film de genre est un formidable moyen d'affronter des enjeux politiques et personnels à travers le prisme du divertissement, de l'humour, de l'excès." Coralie Fargeat assume les casquettes de Productrice-réalisarice-scénariste-monteuse sur ce film pour lequel il a gagné le Prix du scénario au Festival des Cannes 2024. Un film interdit au moins de 12 ans à sa sortie... Elizabeth Sparkle, vedette d'une émission d'aérobic, est virée le jour de ses 50 ans. Le moral au plus bas  on lui propose une substance miraculeuse pour devenir "la meilleure version d'elle-même, plus jeune, plus belle, plus parfaite". Mais étant donné que la substance agit sur l'ADN, il y a des règles à respecter, impérativement : vous activez une seule fois, vous stabilisez chaque jour, vous permutez tous les sept jours sans exception... 

La présentatrice est incarnée par Demi Moore, star canon de "Ghost" (1990) de Jerry Zucker ou "Proposition Indécente" (1993) de Adrian Lyne, mais devenue quasi has been dont le dernier rôle solide remonte à "Margin Call" (2011) de J.C. Chandor mais aperçue récemment dans "Un Talent en Or Massif" (2022) de Tom Gornican, puis elle est incarnée après substance par Margaret Qualley vue dans "Pauvres Créatures" (2023) et "Kinds of Kindness" (2024) tous deux de Yorgos Lanthimos ou "Drive-Away Dolls" (2024) de Ethan Coen. Citons ensuite surtout Dennis Quaid (qui remplace au pied levé le défunt Ray Liotta) vu ces dernières années dans "Kin : le Commencement" (2018) de Jonathan et Josh Baker, "Midway" (2019) de Roland Emmerich ou "Reagan" (2023) de Sean McNamara. Citons encore Hugo Diego Garcia apparu dernièrement dans "The Killer" (2023) de John Woo, Gore Adams surtout apparu dans la franchise d'horreur "Hell House LLC" (2015-2019) de Stephen Goghetti, Matthew Géczy apparu dans les séries TV "Highlander" (1995) et "Thanksgiving" (2019) ou dans le téléfilm "Laval, le Collaborateur" (2021) de Laurent Neyneman, Philippe Schurer apparu dans "Vénus Noire" (2010) de Abdellatif Kechiche, "La Stragégie de la Poussette" (2013) de Clément Michel ou "Adults in the Room" (2019) de Costa Gravas, puis retrouve après "The King's Daughter" (2023) de Sean McNamara, Olivier Raynal apparu dans "L'Auberge Espagnole" (2002) de Cédric Klapisch, "Aucun Témoin" (2004) de Michael Valverde ou "La Légende" (2017) de Florian Hessique, puis Oscar Lesage aperçue dans "Annie Colère" (2022) de Blandine Lenoir, "Les Amandiers" (2022) de Valerie Bruni Tedeschi" et "Le Comte de Monte Cristo" (2024) de Mathieu Delaporte et Alexandre de La Patellière... Dès le départ on remarque une mise en scène qui s'inspire beaucoup de "Shining" (1980) de Stanley Kubrick (le couloir, symétrie, sang...) avec un soin particulier apporté aux décors, très urbains modernes et sophistiqués mais on décèle pourtant aussi un film ancré dans les eigties, dont évidemment l'icône Jane Fonda et ses fameux cours d'aérobic tandis que la cinéaste use et abuse de la sexualisation de ses actrices, d'ailleurs surtout de la plus jeune ! Ainsi on constate que la cinéaste utilise les armes qu'elle dénonce elle-même, ce qui peut interroger entre l'opportunisme et la facilité. Premier constat, le féminisme avoué du propose laisse perplexe, car sur le même sujet bien d'autres films se sont montrés plus drôles, ou plus subtils, où juste plus concrets. On pense par exemple à "La Mort vous va si Bien" (1992) de Robert Zemeckis, "Nouvelle Cuisine" (2006)  de Fruit Chan ou encore "The Neon Demon" (2016) de Nicolas Winding Refn. Esthétiquement le film est aussi classe qu'élégant ce qui fait un contraste forcément saisissant avec le vice ambiant, et surtout avec la monstruosité qui se prépare.

La vedette se retrouve donc incarnée par deux femmes en une qui doivent alterner ce qui, on s'en doute, va être un soucis de plus en plus insidieux et vénéneux. On se demande pourquoi avoir choisi une métamorphose aussi "organique" et aussi complexe voir même complètement hors sol  alors que l'histoire avait besoin d'être plus ancré dans un certain réalisme ?! L'érotisme fantasmé est montré à outrance, comme si il était fantasmé par les hommes alors même que c'est une femme qui est derrière la caméra et ce, même si les hommes sont montrés de façon tout aussi outrancière comme de gros dégueulasses. Mais la démonstration est justement trop démonstrative et tire une balle dans le pied de Coralie Fargeat dont le propos est arasé, érodé, mais d'un point de vue purement de genre, comme un thriller érotico-psychologique l'effet est plus parlant et commercialement un très bon moment. Le face à face entre la "Belle et la Bête" est assez génial jusqu'au dernier acte qui tombe brusquement dans un final aussi grotesque que ridicule, aussi pathétique que risible dans un truc foutraque à la "Braindead" (1992) de Peter Jackson, regroupant maquillage et effets visuels avec des flots d'hémoglobines digne des années 80. Un final qui crée un anachronisme visuel avec les effets du reste du film. La dernière partie vire le film dans un autre genre alors qu'on aurait aimé une conclusion plus psychologique et subtilement vicieux plutôt que ce jeu de massacre vomitif. Dommage... Disons que le film sur près de 2h mérite 15-16/20, la dernière demi-heure on frôle le nanardland ou plutôt une partie qui aurait pu être coupée pour servir dans un autre film.

Note :                 

11/20