La Poursuite Infernale (1946) de John Fordxd

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Déjà un des plus grands réalisateurs de son temps avec des films comme "Le Mouchard" (1935), "La Chevauchée Fantastique" (1939) ou "Qu'elle était Verte ma Vallée" (1941) John Ford après une "pause" documentaire pour la propagande alliée, tourne entre "Les Sacrifiés" (1945) et "Dieu est Mort" (1947) un western sur la fameuse fusillade de OK Corral (Tout savoir ICI !). Le cinéaste a connu à ses débuts le principal ou plus connu des protagonistes, le véritable Wyatt Earp qui passait sur les plateaux de tournage. Le cinéaste s'est servi de ses souvenirs sur ce que le "héros" voulait bien lui raconter. Mais le scénario écrit par Samuel G. Engel, également co-producteur comme sur "Johnny Appolo" (1940) de Henry Hathaway ou plus tard "La Dernière Rafale" (1948) de William Keighley, puis par Winston Miller qui écrira plus tard d'autres westerns comme "Les Conquérants de Carson City" (1952) de André De Toth, "L'Homme des Plaines" (1954) de Michael Curtiz ou "À l'Ombre des Potences" (1955) de Nicholas Ray, est tiré de la biographie "Wyatt Earp : Frontier Marshal" (1931) de Stuart N. Lake, qui a également été scénariste notamment pour "Le Cavalier du Désert" (1940) de William Wyler ou "Winchester 73" (1950) de Anthony Mann. Néanmoins, entre les souvenirs de Wyatt Earp lui-même, ceux de John Ford et une biographie réputé pour ses largesses prises avec la réalité des faits autant dire que le film n'a aucune base historique valable. Rappelons que les événements de OK Corral ont souvent été porté à l'écran, le plus connu mais pas moins fictif reste "Réglement de Compte à OK Corral" (1957) de John Sturges, mais le plus fidèle aux faits seraient "Tombstone" (1993) de George Pan Cosmatos. Notons que le titre en V.O. est tiré de "Oh my Darling Clementine" (1884) chanson du folklore de l'Ouest américain. Le film est en tous cas un grand succès récoltant au box-office Monde le double de son budget... En 1882, les quatres frères Earp amènent un troupeau vers l'Ouest et passent la nuit à Tombstone. Mais pendant la nuit leur troupeau est volé et leur frère James est assassiné. Le concours de circonstances poussent Wyatt Earp, dont la réputation le poursuit, accepte le poste de shérif et prend ses frères Virgil et Morgan comme adjoint. Wyatt devient ami avec Doc Holliday malgré leurs divergences. Mais bientôt ils vont devoir faire face au clan Clanton... 

Wyatt Earp est incarné par la star Henry Fonda qui retrouve là John Ford pour la 4ème fois de leurs sept films ensemble entre "Vers sa Destinée" (1939) et "Permission jusqu'à l'Aube" (1955), tandis que ses frères sont joués par Tim Holt qui retrouve John Ford après "La Chevauchée Fantastique" (1939) et vu dans "La Splendeur des Amberson" (1942) de Orson Welles et "Le Trésor de la Sierra Madre" (1948) deJohn Huston, puis Ward Bond acteur fétiche du réalisateur avec pas moins de 25 films entre "Salute" (1929) et "L'Aigle vole au Soleil" (1957) avant son dernier film avec "Rio Bravo" (1959) de Howard Hawks. Doc Holliday est incarné par Victor Mature acteur alors en pleine ascension qui va confirmer son statut juste après avec "Le Carrefour de la Mort" (1947) de Henry Hathaway avant d'être surtout connu pour des peplums à grand spectacle comme "Samson et Dalila" (1949) de Cecil B. De Mille ou "Les Gladiateurs" (1954) de Delmer Daves. N'oublions pas la Clementine du titre jouée par Cathy Downs vue dans "La Foire aux Allusions" (1945) de Walter Lang ou "L'Impasse Tragique" (1946) de Henry Hathaway, puis la belle de Holliday interprétée par Linda Darnell remarquée dans "Le Signe de Zorro" (1940) et "Arènes Sanglantes" (1941) tous deux de Rouben Mamoulian et alors en pleine gloire entre "Crime Passionnel" (1945) et "Ambre" (1947) tous deux de Otto Preminger. Le clan Clanton est mené par le patriarche Walter Brennan surtout remarqué dans les films de Howard Hawks retrouvant ainsi Ward Bond dans "Rio Bravo" (1959), et retrouvant après "La Rivière Rouge" (1948) John Ireland alias son fils qui a la particularité de retrouver la même histoire dans "Réglement de Compte à OK Corral" (1957), puis un autre fils joué par Grant Withers ici dans le 2ème des six films avec John Ford entre "Upstream" (1927) et "Le Soleil brille pour tout le Monde" (1953). Citons ensuite Alan Mowbray acteur fidèle à Norman Z. McLeod qui retrouve John Ford entre "Marie Stuart" (1936) et "Le Convoi des Braves" (1950), Roy Roberts vu entre autre dans "Le Charlatan" (1947) de Edmund Goulding, "Le Mur Invisible" (1947) de Elia Kazan ou "Il marchait dans la Nuit" (1948) de Alfred L. Werker et Anthony Mann, Jane Darwell qui débuta dans "The Capture of Aguinaldo" (1913) de Francis Ford qui n'est autre que le frère de John Ford avec qui elle tournera six films entre "Les Raisins de la Colère" (1940) et "La Dernière Fanfare" (1958), puis enfin deux seconds rôles fordiens, Russell Simpson et ses plus de 200 films depuis "The Virginian" (1914) de Cecil B. De Mille dont dix films sous la direction de John Ford entre "Le Monde en Marche" (1934) et "Les Cavaliers" (1959), à l'instar de son partenaire J. Farrell MacDonald et ses plus de 300 films depuis 1911 dont pas moins de 26 avec John Ford entre "La Vengeance de Black Billy" (1919) et "Planqué malgré Lui" (1950)... Précisons que comme à son habitude le producteur Darryl F. Zanuck a modifié légèrement le film de John Ford, ainsi sans prévenir son réalisateur il a  fait tourné la scène de la tombe du frère par Lloyd Bacon, puis a coupé plusieurs minutes faisant baisser la durée du film à moins de 2h. Mais a contrario, le nabab a laissé son réalisateur tourné à Monument Valley (alors que Tombstone est à la frontière mexicaine) où il a donc fallu bâtir une ville pour un coût de 250000 dollars ! Comme quoi Zanuck savait mettre la main à la poche.

Rappelons-le le plus gros défaut du film est d'être historiquement faux sur quasiment toute la ligne, mais la véracité n'a jamais été d'une grande importance pour le réalisateur qui ne rappellera en lettre d'or dans la fameuse tirade "Quand la légende devient la vérité, on imprime la légende" dans le chef d'oeuvre "L'Homme qui tua Liberty Valance" (1962). Le plus important pour Ford c'est d'abord de mettre en avant ses principes fondamentaux de fraternité autour de la famille et de l'amitié, l'honneur aussi et de rappeler les principes fondateurs de son Amérique. Ainsi comme souvent les deux amis se confrontent mais se rejoignent, l'un (Doc Holliday) est mourant et symbolise la fin d'une époque, l'autre (Earp) vit dans son temps mais sait que l'avenir est encore à façonner. Ford signe un récit certe dramatique mais il place des séquences plus légères (l'ivresse où la bagarre générale), plus oniriques (Shakespeare) ou plus idylliques (littéralement) qui sont plus ou moins heureuses. Les parties "comiques" fonctionnent bien, la partie théâtrale un instant hors sol d'une beauté surprenante, tandis que la romance reste trop sirupeuse, pas aidée par une Cathy Downs très jolie mais sous-exploitée et un peu fade face à Linda Darnell. Le lyrisme ambiant fonctionne bien et reste même un atout primordial, du pur Ford. Un grand film à voir.

Note :                 

17/20