Après deux grands classiques, "Nosferatu le Vampire" (1922) de F.W. Murnau et "Nosferatu, Fantôme de la Nuit" (1979) de Werner Herzog, voici donc une nouvelle adaptation du célèbre vampire, ersatz d'un certain Dracula. En effet, rappelons que le producteur du premier, Albin Grau avait imposé les changements de noms et des modifications afin de ne pas avoir à payer des droits vis à vis du fameux roman "Dracula" (1897) de Bram Stoker créant alors un nouveau mythe. Précisons qu'entre autre la séduction de Dracula laisse place au physique disgracieux de Nosferatu, ou par exemple Dracula n'a nullement peur de la lumière du jour alors qu'elle est fatale pour Nosferatu, même si les deux facettes des deux vampires se mêlent dans certaines adaptations cinéma. Vu le sujet on est pas du tout surpris que le réalisateur Robert Eggers a voulu se lancer dans ce projet, dès 2015, mais qu'il a repoussé parce qu'il ne se sentait pas encore légitime. Le cinéaste a donc entre temps revisité d'autres genres, la sorcellerie dans le chef d'oeuvre "The Witch" (2015), le thriller psychologique dans "The Lighthouse" (2019) et le monde viking dans "The Northman" (2022)... 1838, Thomas Hutter est envoyé en Transylvanie pour affaires avec un certain comte Orlok. Après un voyage éprouvant et sinistre il est trompé et est enfermé dans le château de Orlok tandis que celui-ci part en Allemagne pour rencontrer et s'emparer de Ellen, l'épouse de Thomas. Orlok semble réagir à un appel inconscient de Ellen qui veut assumer ses désirs sexuels...
Au départ, le rôle de Ellen devait être tenu par Ana Taylor-Joy, actrice fétiche du réalisateur mais suite à un conflit d'emploi du temps elle a dû être remplacé par Lily-Rose Depp, célèbre fille de, vue notamment dans "La Danseuse" (2016) de Stephanie Du Giusto, "Planetarium" (2016) de Rebecca Zlotowksi, "Le Roi" (2019) de David Michôd ou "Voyagers" (2021) de Neil Burger. Son époux Thomas est joué par Nicholas Hoult vu dernièrement dans "Juré n°2" (2024) de Clint Eastwood et retrouve l'univers des vampires après "Renfield" (2023) de Chris McKay puis retrouve après "Deadpool 2" (2018) de David Leitch son partenaire Bill Skarsgard alias Orlok/ Nosferatu qui se fait une spécialité des monstres après le dyptique "Ca" (2017-2019) de Andrès Muschietti et le remake "The Crow" (2024) de Rupert Sanders. Citons ensuite Aaron Taylor-Johnson vu cette année dans "The Fall Guy" (2024) de David Leitch et "Kraven le Chasseur" (2024) de J.C. Chandor, Emma Corrin remarquée dans la série TV "The Crown" (2020) et vue dans "Miss Revolution" (2020) de Philippa Lowthorpe ou "Deadpool et Wolverine" (2024) de Shawn Levy, Willem Dafoe vu récemment dans "Beetlejuice Beetlejuice" (2024) de Tim Burton et retrouve son réalisateur après "The Northman" (2022) et surtout retrouve l'univers de Nosferatu après avoir participé aux coulisses du tournage de 1922 dans "L'Ombre du Vampire" (2000) de E. Elias Merhige, Simon McBurney apparu entre autre dans "La Taupe" (2011) de Tomas Alfredson ou "The Pale Blue Eye" (2022) de Scott Cooper, Ralph Ineson qui retrouve également son réalisateur après "The Witch" (2015) et "The Northman" (2022) et vu plus récemment dans "Misanthrope" (2023) de Damian Szifron et "La Malédiction : l'Origine" (2024) de Arkasha Stevenson... Evidemment le film démarre avec un léger handicap, celui d'être une des histoires les plus mythiques et connues des arts et surtout du Septième Art. A tel point que l'intérêt premier est de savoir comment Robert Eggers va-t-il faire pour sortir du lot. La première chose qui frappe est la photographie, un visuel grisâtre poisseux qui n'est pas sans rappeler la version de Werner Herzog qui était beaucoup dans un style réaliste mortifère, au détail près que Eggers insiste plus sur l'entité fantastique et en insistant plus sur un gothique légendaire. Outre le travail sur la couleur et le visuel qui accentue les effets horrifiques, le travail sur les décors et les costumes est tout aussi impressionnant.
Le scénario reprend la trame classique du fameux vampire (visite de l'agent, voyage en Transylvanie, le Demeter, l'épidémie...) dans une version qui pourrait être l'anti-thèse du "Dracula" (1992) de Francis Ford Coppola. Des tons délavés et désaturés, des nuances sépia qui permettent de distinguer certains passages des autres en Noir et Blanc. N'oublions pas non plus que Nosferatu n'a jamais la séduction vénéneuse de Dracula, Nosferatu a littéralement le physique du Mal, repoussant à souhait. Nosferatu/Skarsgard est un Nosferatu aussi charismatique qu'hideux, un physique singulier dans une sorte de Raspoutine lépreux. Le film est envoûtant et fascine, la magie (noire) opère sans difficulté mais on tique sur un montage coupé parfois à la serpe surtout dans la première partie qui n'est pas toujours heureux. Mais le réalisateur-scénariste fait la différence sur un côté psycho-horrifique plus appuyé, un côté lubrique plus assumé même si on se dit qu'il aurait pu aller plus loin encore. Au vu de la filmo du réalisateur on est légèrement en-deça des attentes, mais au vu du mythe il offre une version assez singulière pour apprécier, notamment et surtout grâce à un Nosferatu icônique. Un très bon moment.
Note :
16/20