
1971 au Brésil, c’est la dictature militaire, les opposants réels ou supposés sont arrêtés ; certains disparaitront sans certificat de décès. C’est dans ce climat que Walter Salles, avec un roman adapté comme source d’inspiration, plante le décor d’un film bien personnel sur une période sombre de son pays. Une famille très aisée vit à Rio dans une belle et grande maison en bord de plage ; lui est ancien député, chef d’entreprise, et ne donne jamais l’impression de pouvoir être inquiété. La première partie du film est magique ; Salles filme superbement cette famille heureuse, entre fête, vie amicale et familiale ; on aimerait tellement vivre au cœur de tout ce bonheur insouciant alors que le tonnerre gronde autour d’eux. En effet, d’un récit léger dans son entame, Salles convoque petit à petit à l’écran : des militaires, des chars, des hélicoptères,… On sent bien que la pression autoritaire monte et que des événements gravent se préparent. Dans sa seconde partie, beaucoup plus sombre mais surtout très classique, on va essayer de comprendre avec cette famille ce qui s’est passé pour ce père disparu et assister à leur reconstruction sur des décennies. C’est donc un film politique condamnant le régime criminel mais c’est aussi un film tellement humain. Concentré sur le personnage de mère courage interprété par une formidable Fernanda Torres, droite et combative, le film ne se veut jamais larmoyant, comme son héroïne ; elle fait preuve de beaucoup de dignité pour faire face. Elle est la mémoire d’une famille brisée. Comme bien d’autres films du genre, rien de neuf, les mécanismes de la terreur politique sont disséqués ; Costa Gavras l’avait très bien fait des décennies auparavant. De fait, cette seconde partie revêt un intérêt plus limité, scénaristiquement et cinématiquement.
Aurélien Cabrol : « Pour décrire cette page noire de l'histoire du Brésil, Walter Salles choisit de mêler chronique intime et récit collectif, destins individuels et aspects politiques. Le tout avec une redoutable efficacité narrative, sans que jamais l'émotion trop facile ne prenne le pas sur la description glaçante d'un pays sous dictature. »
Ce film est donc destiné à devenir un classique au Brésil; une catharsis de son histoire; pour nous, la distance est malgré tout présente.
PS : dans la dernière ligne droite du film ; j’ai trouvé si juste de faire jouer la même comédienne pour incarner le personnage principal au crépuscule de sa vie ; le maquillage tellement juste et réussi. En rentrant, j’ai constaté que c’est la maman de Fernanda Torres, elle-même comédienne, qui jouait le rôle de la nonagénaire. Troublant.
Sorti en 2025
Ma note: 14/20