Remarquée avec "Ce qui compte à la Fin" (2007) et surtout "Et Demain le Monde Entier" (2020) l'allemande Julia Von Heinz obtient les moyens de ses ambitions pour son premier long métrage de fiction international en adaptant le roman "Too Many Men" (1999) de Lily Brett, autrice qui s'est inspirée entre autre de ses parents rescapés de Auschwitz. Comme à son habitude la réalisatrice-scénariste co-écrit son scénario avec son époux John Quester avec qui, outre leurs films, elle a créé et écrit la série TV "Eldorado KaDeWe" (2021). La cinéaste avoue que le travail d'écriture a été long et fastidieux car elle voulait essentiellement extraire du roman de 700 pages un récit centré sur la relation père-fille sans perdre l'esprit du livre et de l'histoire ce qui a inquiété l'autrice jusqu'à ce que Lily Brett donne son aval... Une journaliste new-yorkaise décide de comprendre l'histoire de sa famille. Elle propose alors à son père, rescapé des camps de concentration, un voyage en Pologne son pays d'origine. Si le père accepte il est réfractaire à se pencher sur son passé... 

La fille journaliste est interprétée par l'actrice américaine Lena Dunham vue dans "The Innkeepers" (2011) de Ti West, "40 ans : Mode d'Emploi" (2012) de Judd Apatow ou "Once Upon a Time... in Hollywood" (2019) de Quentin Tarantino, tandis que le père est incarné par l'acteur britannique Stephen Fry vu entre autre dans "Un Poisson nommé Wanda" (1988) de Charles Crichton, "Gosford Park" (2001) de Robert Altman, "Love and Frienship" (2016) de Whit Stillman ou "My Dear F***ing Prince" (2023) de Matthew Lopez. Citons ensuite les polonais Zbigniew Zamachowski surtout connu pour "Trois Couleurs - Bleu" (1993) de Krzysztof Kielowski ou "Le Pianiste" (2002) de Roman Polanski et retrouve après "L'Homme du Peuple" (2013) de Andrzej Wajda sa partenaire Iwona Bielska vue dans "La Noce" (2004) de Wojcieh Smarzowski ou "Le Fléau de Breslau" (2020) de Patryk Vega, Tomasz Wlosok vu dans la série TV "Raven" (2018-2022), "Green Border" (2024) de Agniezka Holland puis dans le dyptique "Comment je suis tombé amoureuse d'un Gangster" (2022) et sa suite "Comment je suis devenu un Gangster" (2023) tous deux de Maciej Kawulski retrouvant après ce premier opus l'actrice Klara Bielawka vue dans le film français "Les Innocentes" (2015) de Anne Fontaine, puis Oliver Ewy remarqué dans "Je voulais me Cacher" (2021) de Giorgio Diritti... Le film sort malheureusement après le succès "A Real Pain" (2025) de et avec Jesse Eisenberg qui est également un périple familial à la recherche d'un passé traumatique dans les camps de la mort. Comme souvent le premier qui sort marque les esprits, le second tombe dans l'oubli alors même que, cette fois-ci, le second est bien moins soporifique, bien moins bavard. Nous conseillons donc ce film plutôt que celui de Jesse Eisenberg.

Dans ce film il n'y a pas de palabres qui n'en finissent plus, ni cette judaïté comme un imposée comme couronne d'épine, mais un couple père-fils qui ne communiquent pas ou pas assez bien, un couple touchant qui oscille entre fantaisie et trauma enfoui, dont (justement) la judaïté reste secondaire voir tertiaire car le deuil est universel et la tragédie de la shoah est devenue la mémoire du monde. Ainsi on sent un film plus sincère et authentique que chez Jesse Eisenberg. Le film n'est ni moralisateur ni porte-drapeau,il s'agit avant tout d'un road trip sentimental où un père et une fille vont renouer des liens qui s'étaient étiolés au fil des derniers mois. Certaines séquences restent terriblement émouvantes, d'autres sont plus légères, mais le film a les qualités de ses faiblesses, à savoir la performance des deux acteurs. Lena Dunham et Stephen Fry forment un duo formidable et cohérent, mais étonnamment les scènes alternent entre le meilleur et le moins bon ce qui frustre un temps soit peu. Le film est délicat et tendre, ou tragiquement émouvant mais malheureusement inégal. A conseiller.

Note :