Nouveau film de la suissesse Carmen Jaquier, assez peu connue chez nous malgré des titres comme "Bouffe-Moi" (2004),"Le Tombeau des Filles" (2011), "La Rivière sous la Langue" (2015) ou "Plante un Poète" (2016). Réalisatrice-scénariste elle a eu l'idée après avoir lu un fait divers où deux adolescentes se sont immolés par le feu dans une banlieue de Berlin, alors qu'à la même période elle a découvert une série de petits carnets appartenant à son arrière-grand-mère où elle dialoguait chaque jour avec le Seigneur : "Les mots de ma grand-mère, une femme simple, éloignée de la littérature, étaient passionnés. Sa foi lui permettait d'affronter ses peurs. N'avait-elle jamais été aussi intime avec quelqu'un qu'elle l'avait été avec Dieu ? Dans mon imagination, je la voyais comme une mystique. J'ai pensé à tout ce qui avait été enlevé aux femmes, surtout en ce qui concerne l'autonomie et l'expression. Comment les femmes, aussi différentes soient-elles, ont pu créer des espaces de relations, de connexions, de réflexions intimes et essentielles pour traverser la vie..."...
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Eté 1900, au coeur d'une vallée au sud de la Suisse, Elizabeth, 1è ans, est sur le point de prononcer ses voeux après cinq années passées au couvent. La mort soudaine de sa soeur l'oblige à un retour au sein de sa famille pour assumer son rôle d'aînée. Vite elle se trouve asphyxiée par cette vie de labeur tandis que des mystères entourent la disparition de sa soeur... Elizabeth est incarnée par Lilith Grasmug aperçue dans "Les Passagers de la Nuit" (2021) de Mikhaël Hers, remarquée dans l'excellent "Oranges Sanguines" (2021) de Jean-Christophe Meurisse et vue tout récemment dans "La Morsure" (2024) de Romain de Saint-Blanquat. Citons ensuite Mermoz Melchior qui malgré une apparition dans "Taxi 4" ( 2007) de Gérard Krawczyk écume depuis les séries TV diverses et variées, François Revaclier apparu dernièrement dans "La Voie Royale" (2023) de Frédéric Mermoud, Barbara Tobola vue dans "Presque" (2022) de Bernard Campan et Alexandre Jollien et "Chroma" (2022) de Jean-Laurent Chautems, Marco Calamandrei aperçu dans "Hell" (2021) de Tim Fehlbaum ou "Laissez-Moi" (2023) de Maxime Rappaz, Sabine Timoteo vue dans "L'Affaire Collini" (2019) de Marco Kreuzpaintner, "Tambour Battant" (2019) de François-Christophe Marzal ou "Last Dance" (2022) de Delphine Lehericey... Une jeune nonne revient aidé sa famille après la mort de sa soeur. Ainsi, pour quelques temps elle passe du couvent au dur labeur de la ferme, mais surtout, elle va se confronter à de jeunes hommes de son âge qui semblent en savoir plus sur la mort de sa soeur.
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Tourné dans les magnifiques paysages de la vallée de Binn dans la Haut-Valais en Suisse, la jeune nonne va se révéler et se rappeler qu'elle est aussi une jeune femme dont le désir n'a d'égal que celui de comprendre ce qui a pu se passer pour sa soeur. Ainsi, c'est en cherchant à en savoir plus que Elizabeth/Grasmug va s'éveiller à la sexualité et comprendre par quoi est également passée sa soeur, alors même que sa condition de religieuse lui impose forcément un réflexion identitaire, une frustration ou une réprobation. Si l'enquête est intéressante avec un suspense qui se maintient malgré les doutes légitimes qui nous poussent à deviner l'issue, le vrai intérêt est dans cet éveil sexuel de la jeune religieuse et/ou comment elle va devoir gérer et assumer sa métamorphose. Carmen Jaquier signe un film au féminin pour ne pas dire féministe (la cinéaste se déclare féministe et son oeuvre ne découle), c'est contemplatif sans être ni ennuyeux ni autocentré, la description de la communauté sonne juste et gros point pour la prestation de Lilith Grasmug. Un beau drame émouvant qui ne tombe jamais dans le graveleux ou le pathos.
Note :