“From Paris with love” de Pierre Morel

Par Boustoune

Il y a quelques mois, une petite vidéo humoristique (*) a circulé sur youtube et dailymotion, raillant gentiment les scénarios que Luc Besson écrit à la pelle, comme s’il était obligé de se soulager d’un besoin urgent…
En gros, on y expliquait que dans un script conçu par Besson, du moins dans un de ceux écrit pour ses poulains, il y a des éléments de base immuables : Une intrigue compréhensible par un gamin de dix ans, avec plein de poursuites en voiture, des gentils costauds qu’il faut pas faire ch…, des gentils plus cérébrals (si, si, eux ils écrivent ça comme ça), des méchants très méchants et des traîtres sournois, des poursuites en voiture, des fusillades, des poursuites en voiture, des combats à main nues contre des personnages d’origine ethnique différente, donc forcément suspects, des vannes qui tuent, des massacres pour rire, un peu de romance à l’eau de rose ou de vieux mélo des familles et, ah j’oubliais, des poursuites en voiture…

From Paris with love ne déroge pas à ce sacro-saint protocole, la recette magique pour gagner plein de pognon au box-office. On y trouve les bagnoles, plein de bagnoles, les flingues, le duo de héros aux caractères opposés – le mec cool et le faire-valoir (et une pincée de L’arme fatale, une !).
En gros, on confie une mission à Paris à un agent secret d’élite de la CIA, Charlie Wax, et à un débutant en costard-cravate, Reese. Leur objectif : déjouer un attentat contre les intérêts américains en Europe.

Pas de grand black à qui péter la gueule mais des terroristes pakistanais en plein djihad (ouh les vilains arabes !) et quelques trafiquants de drogue chinois (forcément…) qui jouent aux yamakasis et jouent des flingues. Ce qui donne au héros Charlie Wax de se lancer dans des gunfights qui lorgnent méchamment du côté des classiques avec Chow Yun-Fat.
Sauf que Pierre Morel n’est pas John Woo. Il ne possède pas son style, et ses scènes d’action, hachis de séquences ultra-courtes, mal filmées et montées avec les pieds, n’ont pas une once de l’élégance des ballets balistiques du cinéaste hongkongais…
Cela dit, pas sûr qu’un génie de la mise en scène ait pu tirer quoi que ce soit de positif d’un scénario aussi indigent et truffé d’incohérences…

Taken
, la précédente collaboration de Morel et Besson, n’était déjà pas bien fameuse, mais là, c’est encore un cran en-dessous. Et le pire, c’est que le duo va encore plus loin dans l’idéologie nauséabonde…
Il y a déjà les vieux clichés racistes du script, où tous les méchants sont forcément arabes ou chinois, vu que les européens de l’est sont en vacances, agrémentés de petites répliques d’une kollossale finesse. Par exemple, alors qu’ils viennent de dézinguer une bonne trentaine d’asiatiques en quelques minutes, le petit jeune demande « ils sont encore nombreux ? » et Wax de répondre : « Au dernier recensement, plus d’un milliard ! »… Pas sûr que les relations sino-américaines s’arrangent avec ce trait d’esprit ô combien subtil…

Et puis il y a tout un laïus assez idiot sur la nécessité de sacrifier quelques vies sans remords au nom de l’intérêt supérieur de la nation. Bon après tout, pourquoi pas ? On se doute bien que les agents secrets ne sont pas des enfants de chœur. Mais ici, on a la désagréable impression que tous ceux qui gravitent autour du duo d’agents à la coule ne sont considérés que comme de la chair à canon. Tant de mépris pour le genre humain laisse pantois…

Enfin, même si nous ne sommes pas spécialement d’ardents défenseurs du politiquement correct, on peut quand même s’interroger sur l’opportunité de cette séquence où Wax et Reese se poudrent le nez à la cocaïne dans un film qui vise principalement un public adolescent. Entre les traditionnels messages balourds du style « dites non à la drogue, les enfants ! » et cette apologie à peine masquée des drogues dures, il y avait pourtant de quoi faire plus subtil…
Et puis, à côté de ce discours très limite, histoire de rétablir un peu l’équilibre, Besson a laissé s’exprimer son côté “fleur bleue” avec cette romance d’une niaiserie absolue entre Reese et sa fiancée. Beurk… 

Bref, pas grand-chose à sauver dans ce From Paris with love
Hormis la plastique de la belle Kasia Smutniak, la seule chose à peu près intéressante est le show donné par un John Travolta déchaîné, qui, à défaut de sauver le film, l’oriente vers un ton plus léger, plus comique, et donc plus « agréable ».
L’acteur américain en fait des tonnes, cabotine, imite ses confrères abonnés aux rôles de héros cools et s’auto-parodie. Des clins d’œil à Volte-face et aux autres films d’actions de la star, un autre à Grease, le temps d’une chanson kitsch, et un dernier à Pulp fiction, avec le retour du fameux « Royal with cheese ».

Finalement, ce hamburger est l’objet-clé de From Paris with love.
Il lui ressemble : quelques cornichons qui gravitent autour d’un bovin dopé aux hormones et un peu carbonisé, du « fromage qui pue » comme argument publicitaire, le tout enrobé dans deux grosses tranches de pain – le scénario.
Indigeste…

(*) : « La recette Besson » par Mozinor

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From Paris with love
From Paris with love

Réalisateur : Pierre Morel
Avec : John Travolta, Jonathan Rhys-Meyers, Kasia Smutniak, Richard Durden, Amber Rose Revah 
Origine : France
Genre : bessonnerie agaçante 
Durée : 1h33
Date de sortie France : 17/02/2010
Note pour ce film : ○○○○○

contrepoint critique chez : Critikator

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