Si il y a bien un film d’Hitchcock qui a marqué les esprits et influencé tout un pan du cinéma d’horreur, c’est bien Psychose. Par son inventivité, son audace, le maître du suspens signe l’une de ses œuvres les plus sombres et les plus cultes du cinéma. Retour sur ce chef d’oeuvre sorti il y juste quelques semaines en blu-ray.
Après le succès public et critique de La Mort aux Trousses, Alfred Hitchock se demande bien ce qu’il va pouvoir faire pour effrayer les spectateurs. C’est alors qu’il tombe sur le livre de Robert Bloch, Psycho, inspiré des meurtres d’Ed Gein qui avaient terrorisé et scandalisé l’Amérique des années 50. Il décide d’en faire son nouveau film avec un budget plus serré en utilisant le noir et blanc. Après plusieurs essais de scénario infructueux, il travaille avec le jeune Joseph Stefano qui change alors l’histoire pour 2 parties distinctes mais toujours dans l’esprit du roman d’origine.
Et c’est la la grande réussite du film. En effet, pendant toute la première partie, le réalisateur met en scène la fuite de Marion Crane après un vol d’argent. Nous pensons alors tout repose sur cette fuite, d’autant plus que Janet Leigh est bien présentée comme la star du film. Mais l’impensable se produit ! Marion Crane arrive dans un hôtel et est brutalement assassinée sous la douche ! Le public est sous le choc et prend soudain conscience que l’argent était seulement le macguffin de l’histoire et qu’Hitchock ne s’intéressait pas à son héroïne mais à ce jeune et perturbé Norman Bates qui a du mal à couper le cordon avec sa mère. S’en suit alors l’enquête d’Arbogast et puis de la sœur de Marion et de l’amant de cette dernière, Sam Loomis, qui découvriront alors l’horrible vérité sur le meurtrier de Marion à la toute fin du récit.
Avec un machiavélisme digne de sa réputation, Hitchcock soigne donc son histoire et ne révèle la vérité sur l’identité du tueur qu’à la fin, identité qui sera d’autant plus surprenante que l’on aurait pensé pendant tout le film qu’il s’agissait de la mère dérangée de Norman Bates. La musique de Bernard Herrmann tient ici une place prépondérante. Le compositeur utilise un ensemble de cordes pour un thème stressant qui trouvera son apogée lors de la fameuse scène de la douche. Pendant toute la fuite de Crane, la musique nous place dans l’esprit apeuré de l’héroïne tout en nous indiquant qu’il va lui arriver quelque chose d’horrible que l’on n’aurait pas vu arriver lors d’un instant aussi serein qu’une bonne douche lui permettant de se laver de sa culpabilité (jusqu’au sang du coup !). Le film est d’ailleurs particulièrement fournis en symboles de ce type, que soit soient l’importance des oiseaux qui préfigure le film suivant du Maître ou les sous-vêtements clairs (avant le vol) puis foncés (à l’hôtel) de l’héroïne.
Mais si le film est aujourd’hui à ce point culte, c’est avec la mémorable scène du meurtre sous la douche. En plus d’être un tournant du film, cette scène est d’une violence psychologique intense, de part la multiplicité des plans utilisés, aussi nombreux que les coups de couteau assénés sur la victime mais aussi avec la musique stridente de Bernad Herrmann (devenue aujourd’hui l’un des thèmes phares de l’horreur). Hitchock fait ici preuve d’une incroyable maitrise de la caméra pour suggérer au public ce qu’il croit voir et fait de Janet Leigh la première « scream queen» .
Mais d’autres scènes sont remarquables, comme la mort du détective Arbogast dans les escalier de la sinistre maison typiquement « gothique californien» où les plans sont là aussi soigneusement choisis pour ne pas révéler l’identité du tueur tout en maintenant l’illusion de savoir de qui il s’agit, mais aussi la révélation du cadavre de la mère qui prend vie avec l’éclairage de l’ampoule qui bouge et la révélation de la double personnalité de Norman Bates.
Avec sa volonté de garder le scénario secret jusqu’à la dernière minute, Hitchcock n’a pas montré le film aux journalistes qui l’ont donc découvert en même temps que le grand public (qui avait d’ailleurs la consigne de ne pas dévoiler l’histoire aux personnes ne l’ayant pas encore vu). Agacés les critique ne furent pas tendres avec le film et le jugèrent moins bons que les précédent et beaucoup trop violent. Cela n’a pas empêché le public de se ruer dans les salles.
Avec ce Psychose en 1960, Alfred Hitchcock impose un style et une figure incontournable pour les films d’horreur à venir qui lui doivent tout, de la traditionnelle séquence de douche (que l’on retouvrera régulièrement et plus vulgairement dans le genre), à la révélation finale d’un assassin à la psychologie éreintée. Toutes les bases des films de serial-killer et de slashers sont ici et ne seront jamais surpassées. Même le mémorable Anthony Perkins aura du mal à trouver d’autre rôles tant Norman Bates lui colle à la peau (surtout avec les suites réalisées). Gus Van Sant n’aura même pas le courage de dévier d’un poil la caméra d’Hitchcock en réalisant en 1998 un remake en couleur et plan par plan.
Encore aujourd’hui, et grâce à un blu-ray à la restauration remarquable (et aux bonus très intéressants), Psychose reste l’une des grandes références du thriller et du cinéma américain, régulièrement présent dans les top10. Insurpassé, insurpassable, souvent évoqué (le Halloween de Carpenter), régulièrement parodié et toujours d’actualité, au suspens qui ne prend pas une ride, ce Psychose reste l’une des pièces maitresses d’un Alfred Hitchock au sommet de son art, au sommet du cinéma. Culte tout simplement.