A l’occasion de la rétrospective qui commence mercredi à la Filmothèque du quartier latin, revenons sur l’un des films les plus personnels de David Lynch, le cauchemar caché de Blue Velvet .
Après la débâcle de l’adaptation de Dune qu’il ira même jusqu’à renier, on aurai pu craindre pour la carrière de David Lynch. Heureusement, le réalisateur avait prévu le coup. Il avait accepté Dune à la condition de réaliser ensuite un film plus intimiste. Dino De Laurentiis a accepté le marché et malgré la controverse autour du scénario, a produit ce Blue Velvet.
Un scénario controversé oui, car Lynch y pose tout son univers sensuel, sensoriel et violent que certains qualifieront de quasi-pornographique. Mais le réalisateur ne cède jamais à la facilité ou au choc facile, au contraire. Ici, dans une banlieue américaine, le jeune Jeffrey Beaumont trouve une oreille humaine dans un champs. Menant l’enquête pour trouver à qui elle appartient, il va rencontrer une mystérieuse chanteuse de cabaret alors qu’il commence tout juste à sortir avec la fille de l’inspecteur.
Il est clair qu’après Dune, Blue Velvet a tout du film personnel. David Lynch aborde les thèmes qui reviennent régulièrement dans son œuvre et un univers qui lui est propre. Ainsi, il démonte la vision que nous avions de ces banlieue américaines puritaine des années 50-60 pour y montrer un envers du décor sale, poisseux, porté sur le sexe, la drogue et la perversion. Pas étonnant que le film ai fait débat mais David Lynch aborde toujours ces thèmes avec un grande classe et arrive à rendre envoutante cette atmosphère qui met mal à l’aise. Du coup, impossible de rester indifférent face à ces images qui portent le sexe et la violence aux nues mais jamais gratuitement, au contraire. Encore une fois, David Lynch fait preuve de toute sa maitrise de l’image et du son. Les cadres sont bien travaillés pour mettre mal à l’aise ou révéler toute la sensualité du film et la bande-sonore est envoutante à souhait (en particulier les Blue Star et Blue Velvet interprété par Isabella Rossellini).
On sait que les comédiens de Lynch lui sont fidèles, Blue Velvet en est la preuve. Après Dune et avant Twin Peaks, Kyle MacLachlan incarne le rôle principal de ce jeune qui découvre la sexualité et la perversion et atterri malgré lui dans un enfer auprès d’une Isabella Rossellini suave, perdue, désespérée (elle deviendra d’ailleurs pour un temps la compagne de Lynch)et dominée par un Dennis Hopper plus barjot que jamais en amant violent, drogué, sadique et porté sur des pratiques sexuelles assez douteuses. Face à ce monde, la muse du réalisateur (qu’il fera tourner ensuite dans Sailor et Lula et plus récemment dans Inland Empire), Laura Dern, incarne, en totale opposition avec Isabella Rossellini et l’univers sombre du film, la pureté et l’innocence adolescente et le seul point lumineux qu’il pourra rester dans la vie du héros.
Évidemment, il n’est pas facile pour le grand public de s’immiscer dans cet univers mais les fans du réalisateurs retrouvent là toutes les bases qu’il développera et perfectionnera ensuite dans Lost Highway ou Mulholland Drive. Artiste multi-disciplinaire à l’univers sombre et dérangé, il pose ici réellement son œuvre dans ce film qu’il a revendiqué alors comme le plus personnel.