Contrairement aux dires d’une vieille légende urbaine, être scénariste ne consiste pas à rêvasser à la terrasse d’un café, un calepin à la main ou à passer ses journées vautré devant des films. Non, un auteur professionnel écrit quotidiennement (enfermé chez lui la plupart du temps) et pendant toute la journée. Il ne peut s’offrir le luxe de refuser une proposition, ni d’attendre plusieurs mois d’hypothétiques feux verts, si bien qu’il travaille la plupart du temps sur deux, trois, voire quatre projets à la fois, des sujets qui sont à divers stades de développement (donc d’écriture).
Tout ca c’est bien gentil mais comment faire lorsque cette belle machine se rouille et que surgit la fameuse angoisse de la page blanche?
L’angoisse de la page blanche, ou writer’s block, à ne pas confondre avec une banale attaque de procrastination, est aux auteurs ce que le croque-mitaine représente pour les enfants: le pire fléau qui puisse les frapper.
Il est vrai qu’avec l’expérience, et une sacrée rigueur, la créativité se développe de façon spectaculaire. Une fois qu’on a acquis certains automatismes, l’imagination se libère dès qu’on la sollicite, un peu comme un muscle que l’on fait travailler à l’aide d’une gymnastique adaptée. N’empêche que la tendinite n’est pas à exclure…
Chaque auteur à vrai dire possède son propre rythme, ses propres recettes et rituels d’écriture afin d’anticiper au possible ce genre d’accidents, je vous ai d’ailleurs livré il y a quelques mois mes propres recettes.
Les blogs d’auteurs anglo-saxons regorgeant de conseils pour vaincre le writer’s block, j’ai décidé de vous proposer une petite compilation.
Commençons cette sélection avec le très éminent coach d’écriture Jurgen Wolff qui recommande sur son blog de désacraliser la dénomination du mal. En clair, tout est question d’attitude: on ne souffre pas du « blocage de l’auteur », on est temporairement coincé dans son écriture, vous saisissez la différence? Bon d’accord, c’est très subtil, disons qu’il nous conseille de dédramatiser le problème sous peine de le voir gagner en puissance. Autre conseil du sieur Wolff, bousculer ses rituels d’écritures: changer de lieu de travail, d’horaires, de méthodologie, afin de rebooter sa créativité. Troisième piste à explorer selon lui: revenir aux sources du projets (prémisse de l’histoire, caractérisation/biographie des personnages…) afin d’y chercher les origines du blocage.
Sean M. Conrey et Allen Brizee, du Purdue Online Writing Lab, abordent le writer’s block comme une véritable pathologie, associant symptômes et cures… et enfonçant allègrement des portes ouvertes. Bref, leur analyse est juste mais flotte dangereusement en surface… Dans le même esprit, l’article de Bob Mayer pour le webzine Genreality est plus synthétique.
La blogueuse australienne Lynda R.Young tente une approche plus ciblée et pertinente car il existe divers déclencheurs à ce type de blocage, qui appellent des traitements adaptés.
Le site d’experts eHow met en ligne une leçon vidéo avec Kirk Bowman qui prend des airs de consultation médicale. Entre autres platitudes, le doc nous propose de « ranger son garage » afin de se vider l’esprit. A titre personnel, je préfère de loin ranger mon bureau…
Ginny Wiehardt, journaliste et professeur d’écriture, propose quant à elle une approche plus pragmatique en prenant le mal à la racine, et je dois dire que je partage son point de vue, à savoir que plus un auteur est rigoureux, moins il est vulnérable face au writer’s block.
Le site Publetariat liste « vingt façons créatives de surmonter le writer’s block », plutôt judicieuses au demeurant, qui jouent sur deux tableaux: devenir plus rigoureux dans son écriture et, d’autre part, se ménager des plages de détente inspirantes.
The future buzz n’en recense que quinze, qui manquent un peu d’originalité. C’est d’ailleurs un peu le problème: la plupart des sites proposent peu ou prou les mêmes méthodes…
Je ne sais pas, à vrai dire, si cette avalanche de conseils thérapeutiques vous permet d’y voir plus clair tant les raisons d’un tel blocage sont en définitive personnelles, donc uniques. Ce qui est certain, en revanche, c’est qu’outre-Atlantique, cette angoisse de la page blanche est un eldorado pour toutes sortes de gourous et de compagnies, à l’instar de cet éditeur de logiciel qui nous promet que son joujou est LA réponse au fléau. Si l’un d’entre vous l’a essayé, je serais très curieuse d’avoir son feedback…
Sur ces bonnes paroles, je vous propose d’observer avec une pointe de sadisme un auteur en plein writer’s block:
Ça fout les jetons, hein?
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