Sorti plutôt discrètement sur les écrans, Centurion forme les rangs en DVD pour un spectacle très nature et une randonnée des plus éreintantes.
Péplum britannique comme on en voit que très rarement, Centurion est dans la lignée de La Dernière Légion (beaucoup de similarités), Le Roi Arthur (celui avec Clive Owen et Keira Knightley) ou bien sûr Gladiator (sans la dimension dramatique-romantique). Sorti en été 2010, le film est réalisé par Neil Marshall (Doomsday) et embarque Michael Fassbender, Dominic West et Olga Kurylenko, un casting plutôt correct mais rapidement dépassé par des éléments (naturels mais également économiques) déchaînés. L’imposante production et un tournage au grand-air ne transparaissent pas dans cette boucherie. Sa sortie en DVD le 12 janvier permet de profiter de ces échanges sanglants.
Un Centurion romain est l’unique survivant de l’attaque d’une garnison postée dans le territoire des Pictes (peuple barbare occupant l’actuelle Ecosse, menacée d’invasion par Rome). Les politiciens de l’empire décident d’en finir avec ces sauvages et y envoient la légendaire 9ème légion, une des meilleures unités de l’armée romaine. Celle-ci chevronnée mais fatiguée se fera décimée et une poignée de survivants va traverser le pays de manière erratique pour échapper à ses poursuivants : les redoutables Pictes emmenés par une pisteuse aussi collante qu’un vieux chewing-gum.
La plus grande partie de Centurion n’est qu’une gigantesque poursuite à travers les montagnes d’Ecosse où des personnages bourrus tentent d’échapper aux Pictes, peuple qui naturellement n’apprécie pas de se faire agresser de toutes parts par les Romains, plus si puissants que cela (c’est d’ailleurs le fait de ne pas réussir à calmer certains barbares qui scellera la chute de l’empire romain). Là où les personnages sont sensés être comme des frères, ils ne sont que l’expression d’une caractérisation stéréotypée fait à la va-vite. L’histoire somme toute banale ne survivra pas à des dialogues ridicules et creux, une voix-off agaçante de platitude, un traitement optique continuellement voilé de gris, du sang giclant dans tous les sens à la moindre coupure et le fait que le peuple persécutée est plus légitime dans sa vengeance que des romains se croyants tout permis.
Alors si le début de Centurion est correct, la suite est rapidement ennuyeuse voire insoutenable. De plus, les thématiques de stratégie militaire et des différentes existences humaines sont balayées pour s’attarder sur une course-poursuite usante et inintéressante, dont l’issue nous est complètement égale. L’affiche est partagée tout comme le personnage principal : débutant avec l’histoire du centurion (Michael Fassbender, très physique), une bonne partie du film est consacrée au charismatique général romain (joué par Dominic West) capturé par l’ennemi et son destin scellera le sort de l’histoire du film. Suite à sa déchéance, c’est de nouveau le centurion qui va se retrouver le moteur de l’intrigue, prenant le leadership de la petite troupe tentant de fuir ces contrées hostiles. Cette passation de « leading role » aura pour conséquence une désorientation du spectateur qui aura déjà eu toutes les raisons de décrocher. Les autres frères d’armes seront malheureusement noyés dans une similitude autant physique que psychologique, leur caractère, n’étant pas approfondi du tout. Enfin, là où l’un des aspects importants des films de guerre est d’insister sur les liens quasi-familiaux unissant les compagnons d’infortunes, ces militaires là sont simplement dans la même galère et ne montreront jamais vraiment de réels attachements les uns aux autres. Valeur pourtant mise en avant dans la mythologie de la Légion.
En effet, Centurion repose sur l’ambivalence de la thématique de la neuvième légion, partagée entre mythe et réalité. Si les légions romaines ont bel et bien existé, leur valeur et leur bravoure portées aux nues, leurs hommes avides de gloire et de massacres de barbares, la légende autour de la fin de la 9ème légion est bien… une légende. Disparue annihilée par un ennemi très vorace (non non pas une monstruosité tentaculaire, Cthulhu n’y est pour rien) cette troupe d’élite sensée être le fleuron de l’armée romaine n’a pas assurément connue telle traitrise que ce qui est exposé dans ce film. Le réalisateur le sait et se justifie plutôt bien dans les bonus du DVD, distribué par Cartel, en expliquant qu’il souhaitait raconter cette histoire, inscrite dans le passé britannique, fière d’avoir su autant tenir tête aux romains.
Justement, les bonus apportent une lumière intéressante sur la genèse du projet et le parti-pris de la réalisation. Le film prend d’ailleurs tout son sens lorsqu’on se rend compte des moyens humains et techniques mis en place afin de retranscrire la fuite par monts et par vaux, où les acteurs hors d’haleine en verront des vertes et des pas mûrs. L’implication de ces derniers et le soin apporté à la reconstitution historique sont les principaux intérêts de cette production.
Malheureusement, le montage plutôt cruel ne rend pas justice aux efforts déployés et les scènes coupées apportent réellement un complément d’histoire qui aurait grandement fait pencher la balance de ce Centurion . Celui-ci aurait vraiment été une fresque épique et non pas une course pleine-nature aux personnages stéréotypés dont le destin n’est qu’une fin atroce mais prévisible pour des individus dont la seule existence se résume à détruire l’autre.
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