Sorti le 9 mars Le Rite est un film fantastique et d’épouvante abordant une fois encore le thème de l’exorcisme par des prêtres. Et une fois de plus, difficile de se débarrasser du spectre de l’Exorciste de William Friedkin.
Le jeune américain Michael Kovak (Colin O’Donoghue) est fils d’un préparateur funéraire. Sceptique et un peu blasé de la vie, il se voit offrir soit la possibilité de prendre la suite de son père, soit de devenir prêtre. Petit bond dans l’avenir, à la fin de son séminaire, toujours pas emplit de la foi chrétienne, il part poursuivre ses études au Vatican et suivre une classe spéciale, mention exorcisme. Il fait la rencontre du Père Lucas, joué par Anthony Hopkins, prêtre exorciste iconoclaste plutôt espiègle mais qui obtient des résultats dans un domaine où beaucoup baissent les bras.
D’emblée, le parti-pris du film est d’aborder l’exorcisme comme le pendant spirituel de la psychiatrie, jugeant les cas de possession comme de possibles maladies mentales non traitées comme elles le devraient. On voit aussi donc exprimé le point de vue de l’Eglise sur des situations pouvant être interprétées en fonction des deux disciplines. L’autre élément plutôt discutable du film cependant, c’est le cheminement de ce prêtre aspirant qui malgré une foi ébranlée, parvient à gravir les échelons et se retrouver rapidement dans son parcours (et donc tôt dans le film) confronté à cette unité spéciale de l’Eglise. Si on veut bien accepter le fait que l’Eglise puisse avoir des départements consacrés à la défense et au combat des forces occultes, voir un novice pénétrer ce cercle secret comme si on entrait au Vatican comme dans un moulin nous laissera donc assez sceptique. Et on aura du mal à se défaire de ce sentiment de départ. Le jeune Michael Kovak va ainsi être au troisième jour de la fin de ses études, le stagiaire d’un Anthony Hopkins rigolard qui malgré son assurance est plutôt démuni face aux démons.
On pourrait penser qu’un film nommé Le Rite s’intéresserait vivement au protocole employé pour tenter de désenvouter une personne mais ici point d’ « exorcisme pour les nuls » ! On se retrouve rapidement projeté au cœur du sujet de façon plutôt incohérente où un séminariste incrédule est parachuté au cœur même du combat de l’Eglise contre les démons. Inexpérimenté et muni de seulement quelques restes de foi et possédant quelques bases du métier de prêtre, Michael Kovak va devoir vite procéder à la fameuse séance. Sans vouloir trop « spoiler » l’intrigue, la progression de l’histoire est plutôt évidente, donc voir un jeune prêtre sensé ne croire en rien devoir évidemment exorciser un démon hyperpuissant, laissera pas mal de spectateurs sur le carreau.
Découvrant cet univers souterrain, mais toujours pas bluffé, il va être rejoint par une journaliste qui veut révéler au grand jour les activités de l’Eglise dans ce domaine. Mais son rôle n’apporte rien du tout, juste une touche féminine sensée épauler le jeune héros dans son combat (et dans la restauration de sa foi ?). Ce dernier point est d’ailleurs plus l’enjeu du film que de montrer l’exorcisme sous un nouveau jour.
Et il est très difficile d’ailleurs de choquer, d’épouvanter et d’apporter un angle nouveau sur le sujet de l’exorcisme tant au niveau de la violence des actes lors de la possession ou de l’intellectualisation autour de ces manifestations, tout ayant déjà été fait ! L’horreur et l’angoisse la plus terrifiante ont déjà été atteintes dans le classique L’Exorciste, alors ça n’est pas un Anthony Hopkins cabotinant comme un vieil anglais bon esprit qui va nous faire cramponner à nos fauteuils pour ce combat contre les forces de l’au-delà. Anthony Hopkins dans un grand rôle ? Disons qu’il est sensé offrir un pendant métaphysique au jeune challenger brun mais au final il livre un personnage aussi impressionnant qu’un grand-père plaisantin. Le film s’installe sur ce crédo préférant un pseudo épisode de la série Six Feet Under (ambiance de mort, péchés du père, croire et ne pas vouloir se souvenir) où l’enfance du jeune prêtre va être décortiquée pour comprendre les raisons de son déni de foi (dont on se fout totalement en fait). Tout ça pour se finir sur une progression schématique de : je ne crois en rien, je crois au démon, donc si je crois au démon je crois en Dieu, et bam !
Le Rite était un film attendu mais qui se révèle décevant à cause d’une histoire convenue, qui même si elle a le mérite de rentrer dans son sujet le plus rapidement possible, est assez précipitée, et puis on apprend vraiment rien de plus sur l’exorcisme par rapport à ce qui a déjà été fait. Une montée en puissance du sujet aurait été plus crédible et le simple fait de donner une voix gutturale au possédé, de l’entourer d’un assourdissement d’ondes sonores basses ajoutées aux décharnements et autres dévastations instantanées de la peau du malheureux, ne suffisent pas à créer une ambiance.