Les X-Men s’offrent une cure de jouvence et retombent dans les années 60 pour un retour aux origines des mutants bienvenu. Un Commencement qui relance la franchise avec efficacité sans pour autant tenir toutes ses promesses.
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En reprenant la séquence d’introduction du premier volet, ce Commencement affiche clairement sa filiation. Non, ce ne sera pas vraiment un reboot mais bien une révélation des origines. Nous allons ici apprendre comment Magnéto et Charles Xavier se sont connus, comment ils ont formé les premiers X-Men et en savoir plus sur ce qui les a séparé. Retour donc dans les années 60, en pleine guerre froide, alors que les mutants, et plus particulièrement le dirigeant du Club des Damnés Sebastian Shaw, s’apprêtent à révéler leur existence aux autorités. Matthew Vaughn inscrit donc ses mutants dans un contexte historique fort et politiquement très intéressant, une période de bouleversements que l’on voit trop rarement à l’écran, encore plus dans un blockbuster, ce qui ajoute une pointe de réalisme à la saga.
Toutefois, malgré cette filiation et ce contexte on ne peut plus intéressant, on a du mal à entrer dans le film. En effet, Vaughn et Singer introduisent trop d’intrigues, trop vite, un peu n’importe comment sans vraiment en venir aux enjeux ou s’attarder sur les émois de tous les personnages. On savait que le duo avait mixé les scénarios de deux projets (le First Class et le spin-off sur Magneto) et le travail de multiples réécriture se sent beaucoup sur la première moitié du film qui peine à trouver son rythme et son identité tant que l’équipe n’est pas formée et que les intentions ne sont pas identifiés.
Entre les origines et la soif de vengeance d’Erik Lensherr, l’évolution de Charles Xavier, la crise des missiles de Cuba, la menace de Shaw et l’introduction d’une autre dizaine de personnages, le juste équilibre n’est pas évident à trouver pour le réalisateur qui aurait sans doute été plus à l’aise en mettant de côté certaines intrigues et personnages.
Là où Singer savait recentrer son intrigue sur l’essentiel sans oublier le point de vue global dans les deux premiers volets, ici, avec la multiplicité des informations fournies, Vaughn perd au passage pas mal de choses, surtout dans notre attachement aux personnages qui ne sont qu’effleurés. Oh bien sûr le duo phare de la saga est épargné par ce syndrome. Michael Fassbender et James McAvoy prennent brillamment le relais de Ian McKellen et Patrick Stewart dans les rôles de Magneto et Xavier. Leurs personnages et leur relation évoluent bien durant tout le film, nous montrant bien toute la dualité entre amitié et incompatibilité entre les deux personnages. Les acteurs arrivent même à nous faire entrevoir ce qu’ils deviendront dans les volets de Singer (la haine de magnéto, la sagesse mêlée d’espièglerie de Xavier)Mais face à eux, c’est comme si les autres n’étaient presque plus là, chacun n’ayant que peut de temps pour s’exprimer.
Alors on sauvera bien Mystique (Jennifer Lawrence, sûrement remise en avant suite à sa nomination aux oscars et ici tiraillée entre 3 hommes aux valeurs fondamentalement différentes, entre espoir et rejet) et Beast (dont la transformation est importante, autant physiquement que psychologiquement) qui sont tous deux attachants ou Sebastian Shaw interprété par un machiavélique Kevin Bacon (parfait comme tout premier bad guy des X-Men). Mais Angel, Hurleur, Havok, Darwin, Azazel sont un peu oubliés (n’ayant que quelques instants dans la bataille finale pour éveiller un réel intérêt de la part du spectateur) . Même Emma Frost, normalement monstre de charisme (sexy et sacrément dominatrice dans la BD), passe ici pour une simple potiche (January Jones n’a sans doute pas la maturité nécessaire pour le rôle, à défaut du sex-appeal de Chapeau Melon et Bottes de Cuir). Ce traitement un peu par dessus la jambe nous empêche alors de bien nous identifier à eux et alors, leur destin, leur changement de camp ou leur sacrifice nous indiffère.
Néanmoins, ce n’est pas pour autant qu’X-Men First Class soit un film raté. Au contraire, malgré une mise en place difficile, Matthew Vaughn trouve ensuite un rythme de croisière soutenu et, à partir du moment où les motivations des principaux personnages sont enfin éclaircies on ne voit pas les 2h15 passer. Si des libertés sont prises avec le comics, elles ne gênent en rien la redécouverte de l’univers cinématographique des X-Men. Le réalisateur retrouve ici tout l’esprit original du comic book en y insufflant toute la distance et la fraicheur nécessaires et c’est bien là l’essentiel de ce que nous pouvons attendre d’une bonne adaptation (trahir pour mieux capter l’essence du matériau de base est ici le principe appliqué). Et au milieux de quelques trouvailles de mise en scène intéressantes (et malgré quelques sfx parfois mal foutus pour ce niveau de budget), il va même jusqu’à reproduire les cases de bande-dessinées au travers d’un split-screen assez léché.
Oui, Matthew Vaughn s’accommode d’un script mal équilibré pour redonner tout de même aux X-Men la place qu’ils méritent à travers un final enlevé. Maintenant que ces nouvelles bases sont posées et que le réalisateur s’est approprié l’univers des mutants, on risque d’avoir une suite plus intéressante et maitrisée à raconter.
Au final, on ressort un peu frustré par ce X-Men Le Commencement. Parce que tous les personnages ne sont pas traités comme il se doit et que le film a du mal à trouver son équilibre autant qu’à délivrer des émotions. On se dit même que si Singer était directement impliqué derrière la caméra, il aurait pu gommer les défauts de l’histoire pour en faire des atouts tragiques comme il a si bien su le faire dans les deux premiers volets. Mais en même temps, il est indéniable que la franchise repart sur des bases prometteuses pour l’avenir tout en nous laissant bien entrevoir ce que nous connaissons des mutants.