Avec l’approche de la fête de la musique et la tournée événement de Roger Waters en ce moment, il était bien entendu impossible de ne pas évoquer le film musical et culte des Pink Floyd : The Wall.
C’est ainsi que le groupe débute une série de concerts ambitieux au cours desquels il sera séparé du public par un mur se construisant petit à petit, racontant ainsi toute l’histoire de l’album sur scène. Étant donné les frais engagé dans ces spectacles, peu de dates sont prévues. Ainsi, pour que tout l’esprit de l’album soit compris et ressenti par tout leur public, les Pink Floyd décident d’en faire un film.
C’est ainsi qu’Alan Parker se retrouve à devoir faire face à l’égo de Roger Waters. Le réalisateur est idéal pour ce projet. En effet, il a déjà démontré son savoir faire psychologique sur Midnight Express (et Birdy qui suivra) et a montré sa bonne gestion des séquences musicales sur Fame. Engagé, Alan Parker va donc porter l’univers des Pink Floyd en mettant en avant une lutte schizophrène pendant tout le film. Il s’associe également au caricaturiste Gerald Scarfe pour superviser les hallucinantes et dérangeantes séquences animées, donnant au film sa tonalité de démence sur la musique des Pink Floyd.
Roger Waters écrit donc le scénario de The Wall pour mettre en images les musiques de l’album. Nous allons apprendre à connaitre le jeune Pink, élevé sans père, par une mère possessive et qui va tomber peu à peu dans la folie. Car ce n’est pas son passage à l’école proposant une éducation formatée puis son statut de guest-star qui vont le rendre plus stable.
Oui, The Wall est un peu l’auto-biographie de Roger Waters, son introspection par laquelle il cherche donc sa rédemption. Car le musicien reconnait volontiers s’être coupé de son public à mesure que le succès du groupe prenant de l’ampleur. Dans le film, c’est le chanteur Bob Geldoff qui interprète un Pink à fleur de peau, sombrant toujours plus dans la déchéance.
Ainsi, chaque élément de la vie de Pink construit petit à petit un mur qui va le détacher de la réalité. De l’omniprésence de la mère à un professeur violent, en passant par ses problèmes de couple tout le mènera ensuite à prendre son public pour des légions de soldats dignes des plus grandes dictatures. Il commence à fuir tout ce qui peut être étranger à lui, à sa pensée déformée, à l’univers qu’il se créé et qui se referme sur lui.
De l’enfermement à la drogue en passant par les régimes politiques extrêmes ou l’éducation qui fait perdre toute personnalité, The Wall se présente comme une œuvre complète et fascinante sur la perception du monde par un artiste en perte de repères.
Les séquences animées sont aussi indissociable du film que de la musique. En effet, Gerald Scarfe qui a créé la pochette de l’album va parfaitement intégrer dans le film des images de cauchemar qui représenteront toute l’absurdité de ce monde étrange et malsain qui se développe dans l’esprit de Pink, jusqu’à un procès où le grotesque le dispute à la monstruosité de cette lutte intérieure. Il n’y a qu’à voir cette séquence où le ballet sexuel de deux fleurs devient un carnage, ou ce défilé de marteaux rappelant bien entendu les défilés nazis pour s’en convaincre.
The Wall est certainement l’un des films traitant le thème de la folie de la manière la plus ambitieuse qui soit. Alan Parker et Roger Waters n’y vont pas par quatre chemins et vont au bout de toutes leurs idées de mise en scène et d’illustration de la schizophrénie et de la mégalomanie de son personnage principal.
Une histoire très noire et violente psychologiquement mais incroyablement fascinante où les mots laissent leur place aux chansons des Pink Floyd. Celles-ci sont d’ailleurs aujourd’hui indissociables du film. Impossible d’écouter aujourd’hui Another brick in the wall sans penser à cette marche des enfants masqués vers l’uniformisation des esprits. Cette fusion entre la puissance de la musique et des images est un véritable uppercut pour le spectateur qui est basculé entre les émotions les plus contradictoires.
Même sans être fan des Pink Floyd, The Wall raconte tellement d’autres choses qu’il est donc impossible de ne pas en ressortir bousculé. Alan Parker et Roger Waters y racontent plus que la mégalomanie d’un homme, tout le désespoir d’une génération abandonnée à elle-même, en quête de reconnaissance. Avec la musique d’un groupe culte et les images de personnes engagées, il ne pouvait en ressortir qu’une œuvre atypique, forte et folle. The Wall l’est assurément.