Brocéliande, le film pas très bon du jeudi

Par Fredp @FredMyscreens

Les (mauvais) films fantastiques français, pléonasme : est-ce un problème de budget ? De casting ? De scénario ? De location ? Les 4 à la fois ? En tout cas, Brocéliande, dans la même dite forêt est un beau ratage dans la catégorie thriller/fantastique.

Il faut le reconnaître, lorsque les français réalisent des films qui sont sensés faire peur, soit d’horreur ou de fantastique un peu thriller, on se retrouve pas trop souvent accroché au siège comme face à un film espagnol ou même certains grands spectacles américains. Pourquoi, les films d’horreur tournent souvent au vinaigre dans un scénario simpliste au départ, mal développé ensuite et servi par des acteurs tous droits sortis de Navarro ? Je ne tenterais pas de répondre à cette question ; j’ai regardé Brocéliande, dans la catégorie « films que j’ai raté au ciné en 2003 », et vous en parle de suite.

Pendant toute l’année 2001, le réalisateur Doug Headline, pote à Christophe Gans, n’a pas du arrêter de faire tourner sur sa chaîne Hi-Fi, « Panic Celtique », l’album de Manau, les géniteurs du tube interplanétaire de 1998, « la tribu de Dana« . Et là il s’est dit, pour exploiter la sensibilité bretonnante sans fin : « et si on faisait un thriller fantastique/slasher/horreur/x-files/série tv française gore, avec un accent celtique et se déroulant en France ?» 

Ne cherchez plus, Brocéliande est le nanar français sorti en 2003, victime des envies et des influences débordantes de son auteur !

Dans une université de province (Rennes), une jeune étudiante, Chloé, débarque d’une autre province pour étudier l’archéologie en lien avec la mythologie celte. Elle va se retrouver au beau milieu de ce qui ressemble au départ à un serial killer qui entend bien éliminer toute personne qui lui parle (celte) plus de 5 minutes entre les cours ; l’intrigue se mue ensuite en une tentative de réanimation de démon celte par une société secrète (comme on la voit dans l’épisode Les Cigares du Pharaon), formée par ses nouveaux potes, fans de Nolwenn Leroy.

Le pitch pourrait être pas trop mal si on était sûr de savoir ce qu’on regarde. En effet, il faut bien 45 minutes pour que l’histoire de Brocéliande s’installe et que le spectateur sache vraiment à quoi il a à faire : on est soit dans une variation très Scream/Souviens-toi l’été dernier du Péril Jeune/Quatre garçons plein d’avenir, soit dans un très mauvais épisode de Highlander/X-files ! Au choix. On a d’un côté une gentille petite française pas très souriante, qui fait son étudiante et qui se fait rapidement (mais alors très rapidement) des amis et qui se laisse embarquer dans un trip « est-ce qu’elle a vu le mec se faire assassiner ? »/ « y’a-t-il effectivement un complot Breiz Atao à la Fac ? » ; ensuite, c’est plutôt « mais comment va-t-elle faire pour s’échapper de ce (film) traquenard, fausser compagnie à la vilaine bébête ressuscitée qui élimine tout les acteurs jouant mal ? »… ce qui fait du mal au casting !

Le sentiment cynique que l’on ressent face à Brocéliande une fois qu’il est bien lancé s’explique par le fait que le film accumule un paquet d’erreurs, d’hommages aux ainés, et de clichés. Asseyez-vous, détendez-vous, la musique omniprésente est là pour vous secouer à chaque probable élément perturbateur de l’histoire. Comme dans les teen-slasher américains des années 90, la musique d’ambiance vient fortement ponctuée chaque changement de rythme. Quand elle baisse, des gens surgissent derrière le sujet de la caméra lorsqu’il s’y attend le moins. Mais comme dans un bon épisode de D&CO, des dizaines de débuts de morceaux viennent en permanence casser les oreilles des spectateurs. A la fin on pète un câble !

Chaque début de scène suggère fortement ce qui va se passer ensuite (« oh y a plus de courant, et si j’allais prendre une douche« ). Ou encore : Chloé laisse retomber son postérieur sur une branche pour parler avec Erwan, mais alors qu’elle tente de s’allumer une cigarette, son briquet refuse de fonctionner. Le laissant choir par inadvertance, se baissant pour le récupérer, elle découvre l’entrée secrète de la nécropole Celte qu’ils fouillent depuis le début du film… WTF ! Attendez c’est pas fini. Ni une ni deux, comme ça n’est pas qu’une petite étudiante de rien du tout qui porte des débardeurs à n’importe quelle époque de l’année, Chloé s’aventure dans le tunnel aussi grand qu’un terrier de skons et s’aide de son briquet pour éclairer son avancée. Ah parce qu’il remarche celui-là ? Eh oui, c’est un film français, tout est possible.

Un des personnages, un vieux professeur, se fait attaquer par le serial killer en costume de Wolverine pour Halloween, sauf qu’il doit encore avoir le doigt sur le bouton pour parler à travers l’interphone car la pauvre Chloé, se tape toute la scène à distance. Oui, Chloé se met rapidement à mener l’enquête dans cette histoire de pierre volée et de légendes celtes menaçant de revenir à la vie. Elle a beau être en première année, c’est elle qui semble détenir les clés de ce mystère. Alors elle revêt ses petites lunettes d’intellos et prend quelques Profils dans la bibli de la fac, et fait des corrélations que même les professeurs spécialistes celtes n’ont pas réussi à faire. Et pourtant, on ne verra jamais Chloé étudier, c’est dire la puissance de son cerveau.

L’action s’enterrera malheureusement pour la plus grosse moitié du film, dans la fameuse nécropole où les messes blanches se passent. Les répliques fusent : « Nous allons pouvoir ressusciter le règne des druides, avec ta tête«  interrompu par le jet de lampe torche type cadeau du Magazine Mickey en plein dans l’épaule.

A ne pas louper quand même, le combat à mains nues entre Alice Taglioni et Elsa Kikoïne (l’héroïne), qui s’était déjà opposées dans une séquence précédente (inutile) de lutte dans un cours d’EPS de Fac. Les bruitages à l’opposé de la violence des coups portés vous fera bien rires. Et puis, on a quand même une très belle décapitation numérique d’Alice Taglioni, ce qui vaut peut-être de regarder ce film. Mais, Brocéliande est loin d’être fini puisqu’il va falloir se battre contre le démon ressuscité. Une sorte de Némésis de Resident Evil Apocalypse à la gueule dégoulinante (de bave ?) comme l’Alien. Un combat digne de Buffy contre les Vampires gavera tout le monde, attendant sûrement juste l’issue de ce navet.

A trop vouloir rendre hommage aux films thriller fantastiques, le réalisateur propose avec Brocéliande, un patchwork fake d’emprunts de films ayant faits leurs preuves. Les deux femelles frêles mais survivantes pourront se fendre d’une petite blague avant de repartir main dans la main.

Brocéliande, un film estampillé Produit en Bretagne. Pour ce qui est du film d’horreur/film fantastique français on repassera. Il y a quand même du bon dans notre ciné, et ceci n’était pas un dossier sur les films d’horreur français ou les histoires fantastiques mises en scènes par des frenchies (je vous vois tous arriver avec votre Alexandre Aja ou encore « l’horreur et le fantastique c’est pas pareil » oui mais en ce qui concerne les réalisations, c’est même combat). J’ai une petite liste de rattrapage avec Martyrs, Ils, Captifs ou Humains,… si vous avez plus fantastique que « horrible », je suis preneur.