A l’occasion de l’exposition exceptionnelle concernant le film à la cinémathèque et de sa ressortie dans quelques salles et en dvd/bluray dans sa version restaurée et complète, parlons aujourd’hui du légendaire Metropolis de Fritz Lang. Car c’est tout de même le film matrice de tout le cinéma de science-fiction.
D’une certaine manière, tout le monde connait inconsciemment l’histoire de Metropolis. Dans une mégalopole futuriste, la société est divisée en deux classes, la ville haute avec ses dirigeants et les ouvriers des bas-fonds qui font tourner la machinerie permettant aux premiers de vivre dans le confort. Jusqu’à ce qu’une jeune femme, Maria, rencontre celui qui pourrait rassembler ces deux classes, le fils de Johhan « Joh » Fredersen, dirigeant de Metropolis. Mais lorsque Joh découvre cela, il fait construire par un savant fou un robot à l’image de Maria pour contrôler la révolte grondante.
Metropolis est ainsi déjà à l’époque plus qu’un film de science-fiction, une véritable allégorie sur le monde tel qu’il était à l’époque, une critique du système capitaliste qui divise les classes. Alors que la crise de 1929 n’a pas encore éclaté, Fritz Lang se montre même prophétique et son message « Entre le cerveau et la main, le médiateur doit être le cœur» peut peut-être sembler naïf aujourd’hui mais était tellement juste. Il est même encore plus juste et d’actualité aujourd’hui même si notre société est bien plus cynique.
Lang ajoute à ce message sur les injustices de la société déshumanisée une dimension mythique en incluant dans son film des aspects religieux (la tour de Babel) servant seulement à montrer le fanatisme de populations à la dérive et l’extrémisme des actes de certains. Encore une fois, ce thème est encore d’actualité aujourd’hui, ce qui montre bien la portée universelle du film qui peut ainsi traverser le temps sans ombrages.
Mais non content de produire une œuvre sociétale plus complexe qu’elle n’en a l’air avec des moyens pharaoniques (neuf mois de tournage et 36 000 figurants, des décors grandiose à inonder pour la ville basse, des effets visuels avant-gardistes), Fritz Lang aborde avec Metropolis plusieurs genres. Bien sûr, il y a le film de science-fiction avec cet univers futuriste, cette lutte des classes sans cesse repriset ce robot mythique. Mais à travers ce film expressionniste il y a aussi le fantastique et l’horreur habilement mêlés. L’utilisation du savant, les cadrages et l’utilisation des ombres préfigurent déjà certains films de genre à venir.
A travers ses thèmes, Metropolis est une œuvre puissante et avant-gardiste. Mais c’est aussi son esthétique qui impressionne et a fait école. Le visionnaire Fritz Lang a établi ici tous les codes de la science-fiction du XXe siècle. Les références les plus évidentes sont évidemment Star Wars (dont le design de C-3PO est bien influencé par le robot Maria), Blade Runner (où l’on retrouve la tour de Metropolis filmée de la même manière par Ridley Scott) ou le Cinquième Élément (la cité, les voitures volantes, le laboratoire).
Mais c’est bien toute la SF qui voit Metropolis comme une source d’inspiration inépuisable (Retour vers le Futur, Dark City, THX1138…) mais aussi le fantastique (Frankenstein) ou même tout simplement la culture populaire. Ainsi la musique se l’est approprié comme Madonna ou Muse dans leurs clips tout comme les comics (Superman) et mangas (dont le magnifique Metropolis de Tezuka, Cobra, …) et même les jeux vidéos (Final Fantasy).
Ainsi, non seulement Metropolis était déjà une œuvre d’une puissance folle, mais en plus elle a réussi à traverser les décennie avec ce même pouvoir visionnaire. Fritz Lang a établi là un film matrice, celui qui a défini une esthétique et plusieurs genres dans l’inconscient collectif avec un message universel. Malgré son âge, Metropolis est bien intemporel et les mots « chef d’œuvre» et « culte» ne sont pas de trop pour définir ce film au destin exceptionnel.