Jean-Jacques Annaud est de retour avec Or Noir, une fresque exotique non pas dénuée de maladresses mais au discours passionnant.
Or Noir commence comme si nous avions affaire à un conte des 1001 Nuits, avec deux chefs arabes rivaux, l’un laissant ses fils au vainqueur d’une précédente bataille en gage de paix. L’un des fils, le plus intellectuel, tombera alors éperdument amoureux de la fille de son nouveau père, mais surtout, il est promis à un grand destin qui changera le pays. Cet aspect digne des contes se voit rapidement mêlé à l’histoire de la découverte du pétrole dans ces contrées et qui va rapidement changer radicalement la vie de ces pays, passant de pauvres à riches en quelques années.
Pourtant on a un peu de mal à accrocher au début. Le récit se fait confus et les réactions et objectifs des personnages restent flous pendant un moment, nous laissant dans quelques interrogations. Mais lorsque l’aventure commence à poindre le bout de son nez, on plonge avec plaisir dans l’ambiance exotique qui règne. Il faut dire que le récit se concentre alors à ce moment là sur le fils qui va s’affranchir de ses deux pères et prend l’ampleur d’une fresque qui, dans la grande tradition du genre, lie habilement le destin d’un homme à celui d’un peuple. Avec des images parfois épiques mais bien trop courtes, Annaud retrouve par instants le souffle exotique qui a bercé le cinéma.
Sans manichéisme, Jean-Jacques Annaud arrive à mêler les légendes arabes, l’islam et les nouvelles richesses arrivées avec le pétrole. Jamais les personnages ne sont clairement bons ou mauvais. Chacun doit faire des sacrifices pour gagner l’amour de ce fils et gouverner son peuple de la manière la plus juste tout en prenant en compte les interprétations du Coran. Il découle alors de l’ensemble un message d’une grande sagesse sur la corruption de la simplicité de vie par la richesse. Un message beau et nostalgique quand on sait ce que sont aujourd’hui devenus ces pays qui étaient alors encore remplis de mystères.
Cette vision, sans archétypes du bien et du mal fonctionne aussi grâce au jeu des acteurs. Chacun est susceptible d’être d’une grande bonté comme de commettre des actes horribles. Antonio Banderas et Mark Strong font tous deux jeu égal de ce côté avec pour seul point commun l’amour qu’ils portent à leurs enfants. C’est donc sur les épaules de Tahar Rahim que pèse l’aventure du film et cela lui va plutôt bien, son personnage évolue progressivement du fils bibliothécaire sur qui personne ne compte au chef de clan et de guerre avec un charisme qui prend de l’ampleur à mesure que le voyage s’allonge. Seule Freida Pinto, magnifique princesse digne des contes se satisfera du rôle d’éternelle belle plante au jeu limité.
On ne l’attendait plus vraiment au tournant mais avec Or Noir, Jean-Jacques Annaud retrouve le goût de l’aventure, aussi beau que profond, son film nous apporte la chaleur des contes que l’on avait oublié pour nous interroger sur des problématiques liées au pétrole et à la religion qui sont pourtant encore d’actualité aujourd’hui. Bref, malgré une mise en place un peu laborieuse, on retrouve l’exotisme à l’état pur, saupoudré d’une belle réflexion.