Martin Scorsese se lance dans le conte de Noël pour enfants, mais Hugo Cabret, c’est bien plus que cela, un véritable hommage à Méliès et à la magie du cinéma.
Lorsque l’on a appris que Martin Scorsese allait adapter le roman de Brian Selznick, Hugo Cabret, tout le monde fut surpris. Qu’arrivait-il au maitre du film de mafia New-Yorkais pour se lancer dans le conte pour enfant et en plus en 3D ? Mais à y regarder de plus près, Scorsese est avant tout un cinéphile averti. Aviator était en quelque sorte la démonstration de ce qu’il aime et redoute dans le cinéma Hollywoodien de la grande époque et l’homme, via sa fondation, cherche à tout prix à préserver les grands classiques du cinéma. Finalement, Hugo Carbret découle complètement de cette logique.
Le film débute ainsi comme un pur conte de Noël dramatique, dans la lignée des histoires de Dickens comme Oliver Twist. Hugo est un orphelin qui a trouvé refuge dans la gare Montparnasse, vivant seul avec l’unique objet que lui a laissé son père, un automate qui ne peut fonctionner qu’avec une clé en forme de cœur. Un conte de Noël qui n’est pas sans rappeler ce que Zemeckis abordait avec Scrooge. D’ailleurs, l’introduction de Hugo Cabret n’est pas sans rappeler l’utilisation de la caméra virtuelle que le réalisateur du Pôle Express manie à la perfection, sauf que Scorsese le fait dans un film entièrement live. Le réalisateur ne pose pas sa caméra et va dans tous les recoins de la gare pour nous faire découvrir le décor immense dans lequel évolue le jeune Hugo. Une immersion au cœur de la gare renforcée par une 3D parfaitement maitrisée.
Mais si l’histoire de cet orphelin qui va trouver chez un vieux marchand de jouets grincheux une figure paternelle qui lui permettra de faire son deuil ressemble à du déjà vu et pourra plaire enfants, la suite sera toute différente dès le moment où l’on apprend que ce vieillard est George Méliès. Car c’est là que l’on s’aperçoit que finalement, Hugo Cabret est loin d’être pour les enfants. Il est au contraire plutôt destiné aux cinéphiles … ou au parents désireux de faire connaitre les débuts de la magie du cinéma à leurs enfants (et bien leur en prendra).
Car finalement, à la fois à travers l’histoire de ce gamin qui cherche spirituellement à retrouver son père et à travers le parcours de George Méliès, magicien oublié qui n’a pu trouver sa place dans la France de l’après-guerre, le message du film est bien plus profond que ce à quoi on pouvait s’attendre à entrant dans la salle. On parle ici de création, de magie et de commémoration autour des œuvres d’art que l’on ne doit pas laisser s’effacer avec le temps. A travers cette histoire des dernières années de Méliès, c’est même plus qu’à l’inventeur des effets visuels au cinéma que Scorsese rend hommage. Il nous transmet toute sa passion pour le 7e art et partage avec nous ce qui le rend magique. Logique donc de revenir là où tout à commencer, au studio de verre à Montreuil et aux images du Voyage dans la Lune.
Alors bien sûr, certains trouveront à redire. Le film peut paraitre trainer en longueur, les enfants risque de s’ennuyer ferme, et le Paris carte-postale vu à travers les personnages arpentant la gare sur de l’accordéon en rebutera d’autres. Mais au fond, la mise en scène de Scorsese qui sublime la 3D et l’histoire à tiroirs renfermant plus que l’aventure d’un orphelin font leur effet. La relation qui se noue entre Hugo et Méliès (parfaitement joué par un Ben Kinglsey touchant) nous touche car leur recherche d’un passé perdu (le père pour l’un, la magie pour l’autre) nous rappelle ce que nous pouvons avoir vécu ou désiré, en particulier pour les amoureux du 7e art.
Bien plus qu’un conte de Noël, avec Hugo Cabret, Martin Scorsese a fait un film poétique sur la magie du 7e art, un hommage à Méliès bien plus puissant et sincère que n’importe quel biopic classique n’aurait pu délivrer. Une merveille.