“Turn me on !” de Jannicke Systad Jacobsen
Bienvenue à Skoddeheimen, petit village norvégien perdu au milieu des fjords. Venez découvrir ses routes désertes, parfois égayées par le passage d’un tracteur,ses moutons débiles, sa MJC locale miteuse, ses péquenauds d’habitants et leurs gamins stupides qui trompent l’ennui en sautant sur un trampoline fatigué au fond du jardin…
Alma, elle, a passé l’âge. Elle a quinze ans et n’en peut plus de cet environnement morne et déprimant. Elle n’aspire qu’à quitter au plus vite ce trou paumé et découvrir la vraie vie. Mais en attendant ce moment, elle cherche quelque chose qui puisse pimenter un peu sa vie.
En ce sens, le titre du film est une supplique, un appel au secours désespéré : Turn me on! (“Excite-moi!”).
La jeune fille rêve de sexe, d’étreintes torrides, de baisers langoureux et d’activités hautement coquines. Ses hormones lui mettent le feu aux fesses et elle ne peut qu’essayer d’éteindre l’incendie en s’adonnant frénétiquement à la masturbation. Elle s’excite en faisant appel à un service de téléphone rose ou en fantasmant sur son entourage, mâle ou femelle, et notamment sur Artur, un de ses camarades de classe.
Elle rêve de se faire chevaucher par le garçon et ne se prive jamais de lui lancer des regards enamourés, mais le grand dadais semble totalement hermétique à ses charmes.
Pourtant, lors d’une soirée entre lycéens, Artur lui exhibe son sexe sous le nez avant de rebrousser chemin. A moins que, là encore, Alma ait fantasmé la chose et, l’esprit grisé par l’alcool, ait confondu rêve et réalité.
Elle commet l’erreur de parler de l’incident à sa copine Ingrid, elle aussi amoureuse du garçon… Et devient malgré elle la risée du village, un vrai paria… De quoi déprimer encore plus, et chercher à se consoler encore plus avec des fantasmes érotiques…
Nous aussi, on aurait bien aimé être excités par cette comédie norvégienne débridée, qui parle sans tabou des fantasmes adolescents et de la sexualité des jeunes filles en fleur. Mais si le début du film est réussi, avec son ton singulier, drôle et percutant, le rythme s’étiole au fil des minutes, plombé par des scènes inutilement redondantes et des ressorts comiques assez limités, qui ont toutefois le mérite de ne jamais sombrer dans la vulgarité.
En fait, on a l’impression de voir un court-métrage artificiellement gonflé en format long, ce qui semble corroboré par la durée du film, assez courte (1h15).
Turn me on! n’est donc pas du tout indispensable, mais malgré tout, grâce à la fraîcheur juvénile d’Helene Bergsholm et le potentiel comique de ses petits camarades (mention spéciale à celui qui incarne l’ado rebelle refusant de prendre des douches…), le film se laisse voir gentiment.
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Turn me on !
Få meg på, for faen
Réalisatrice : Jannicke Systad Jacobsen
Avec : Helene Bergsholm, Malin Bjørhovde, Beate Støfring, Matias Myren, Lars Nordtveit Listau, Henriette Steenstrup
Origine : Norvège
Genre : sexe, mensonge et vie d’ado
Durée : 1h16
Date de sortie France : 18/01/2012
Note pour ce film : ●●●○○○
contrepoint critique chez : Silence action !
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“Ma première fois” de Marie-Castille Mention-Schaar
Sujet de philosophie : “Est-ce que changer, c’est être différent?”. Vous avez une heure…
Euh… Déjà, est-ce que l’on change?
L’auteur de cette critique, quasi quadragénaire, doit bien reconnaître que physiquement, il a changé. C’est indéniable…Même si je parais encore plus jeune que mon âge (ce n’est pas moi qui le dit…), je subis comme tout le monde les ravages du temps (c’est moi qui l’admets…) : embonpoint, cheveux plus blancs et plus rares, coups de fatigue plus fréquents et une propension à raconter ma vie alors que vous vous en fichez complètement…
Mais en matière de goûts cinématographiques, il est moins sûr que j’aie beaucoup changé… Adolescent, je n’étais déjà pas client des tribulations de la juvénile Sophie Marceau juvénile (oui, ça fait dinosaure pour les plus jeunes de nos lecteurs, mais j’ai vu la Boum au cinéma lors de sa sortie… ) et de ses succédanés. Les bluettes romantico-existentielles n’étaient pas ma tasse de thé…
Devant un film comme Ma première fois, je m’aperçois que mes goûts n’ont pas changé. Je n’étais pas le public-cible de ce genre de film et je ne le suis toujours pas…
Remarquez, le genre en question n’a pas beaucoup évolué non plus. La cinéaste joue sur les habituels poncifs du genre, empile les situations vues et revues, jouées par des acteurs beaux comme des icones de mode et un brin trop vieux pour leur rôles…
Elle parle des premiers émois amoureux de Sarah (Esther Comar) et Zachary (Martin Cannavo), deux jeunes de 18/20 ans.
La jeune femme est une lycéenne-modèle, genre première de la classe binoclarde et un brin coincée, qui travaille dur pour pouvoir partir aux Etats-Unis et poursuivre ses études dans une prestigieuse université. Un jour, Zach’ débarque dans sa classe. Il est grand, il est beau, il a une allure de mannequin – d’ailleurs, il l’est… – et, encore plus craquant, c’est un bad boy, un rebelle, qui a été renvoyé de plusieurs établissements avant d’atterrir dans ce lycée huppé de région parisienne.
Pour couronner le tout, et faire de lui le cancre-roi du bahut, il ne se déplace qu’en bécane. Une sorte de Fonzie du XXIème siècle, quoi (Hum… Voilà que je cite une série des années 1970, maintenant. Oh, le coup de vieux!)
Au début, il se détestent. Tout commence avec un “Rends-moi mon stylo où j’vais l’dire au proviseur…” assez puéril et se poursuit de blague potache en blague potache. Assez édifiant… Ou alors c’est que je suis effectivement devenu vieux et que je ne peux pas comprendre ces trucs de djeuns’. (c’est possible, hein…)
Puis ils finissent par admettre que ces chamailleries dissimulent un amour pur et beau, du style qui dure pour la vie, et ils se mettent à la colle. Evidemment, tout ne se passe pas sans heurts, du style “elle l’appelle, mais il l’entend pas” (Mon Dieu, de pire en pire, voilà que me revient une chanson de Laurent Voulzy et Véronique Jeannot, du siècle dernier, quand j’étais jeune quoi…). C’est mieux pour le scénario…
Mais ils se transforment l’un l’autre. Le beau gosse devient un peu moins rebelle et roule plus prudemment sur son deux roues, la gamine psychorigide se dévergonde et va au galop vers sa vie de femme (si je peux m’exprimer ainsi…).
En gros, rien de bien nouveau sous le soleil… C’est un film romantique basique qui cible à la fois un public jeune, qui se reconnaîtra dans cette description des émois adolescents – et plus âgé – pour la nostalgie qu’il suscite.
Le cinéma évolue, les moyens techniques évoluent, mais l’approche de la réalisatrice, Marie-Castille Mention-Schaar, elle, emprunte des sentiers ultra-balisés. Non, avec Ma première fois, le genre n’a pas changé…
… Mais pourtant, c’est différent. Car là où bien des films auraient joué la carte du happy-end de rigueur, la cinéaste cueille son public à froid avec un final mélodramatique en diable. Une grosse pointe d’amertume qui, selon les goûts pimente un peu la soupe ou gâte la guimauve.
Et là, je m’aperçois que non, décidément, je n’ai pas du tout changé…
Je n’étais pas non plus un inconditionnel des mélos larmoyants du type Love Story et je ne le suis pas plus maintenant. Mais en même temps, ça marche toujours ce genre de truc pour m’arracher une petite larmichette. Ah mince, encore piégé…
Bon, tant mieux, finalement, ça veut dire que je ne suis pas si blasé que ça en entrant dans une salle obscure…
En fait, c’est comme si chaque nouvelle projection était comme une première fois…
(Bon oui, c’est facile… Vous m’excuserez c’est l’âge… Je deviens gâteux…)
[P.S. : Pour ceux qui voudraient apprécier une belle histoire d’amour de jeunesse, il y a la possibilité de (re)découvrir le film de Mia Hansen-Love, Un amour de jeunesse, qui va sortir le 7 février en DVD. On en reparle bientôt…]
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Ma première fois
Ma première fois
Réalisatrice : Marie-Castille Mention-Schaar
Avec : Esther Comar, Martin Cannavo, Vincent Perez, Judith El Zein, Lilly-Fleur Pointeaux, Lolita Chammah, Anne Loiret
Origine : France
Genre : Love story meets La Boum
Durée : 1h35
Date de sortie France : 18/01/2012
Note pour ce film : ●●●○○○
contrepoint critique chez : L’Express
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“The Darkest hour” de Chris Gorak
Ben dites-donc, il s’en passe des choses à Moscou! Dans les films américains du moins…
Dans le dernier Mission : Impossible, un psychopathe (russe, forcément) faisait sauter le Kremlin en rejetant la faute sur les “gentils” (américains, forcément) avant de chercher à tirer un feu d’artifice atomique.
Dans The Darkest hour, la ville est envahie par des E.T. invisibles (ça coûte moins cher en effets spéciaux) composés d’énergie pure, ce qui les fait ressembler à des lucioles ou des restes de feu d’artifice atomique (si, ça coûte quand même un peu cher en effets spéciaux, finalement…). Les vilains aliens sont venus nous pomper toutes nos ressources en minerai précieux et pour ne pas être dérangés pendant leur basse besogne ouvrière, ont décidé de désintégrer tout le monde.
Et pour couronner le tout, calamité des calamités, figurez-vous que Moscou la majestueuse, garante de “l’âme russe” est aussi envahie par un truc horrible : les enseignes américaines ou occidentales!
Ah, ça vaudrait le coup de redémarrer une guerre froide, ça… Parce que pendant la moitié du film, il n’y a pas un plan sans que soit placé une pub déguisée pour un produit occidental – marques de voitures, enseignes de fringues…
Et quand les protagonistes débarquent à Moscou et que démarre l’inévitable montage touristique speedé de rigueur, une enseigne pour une célèbre chaîne de fast-foods vient se glisser entre la Place Rouge et la Maison de Gorki. C’est sur qu’une enseigne lumineuse à la gloire de Mac-Ducon, c’est si typique de la Russie…
Voilà un exemple parfait de placement de produit pas du tout discret, agressif et complètement irrespectueux de la culture du pays hôte…
Une attitude hautaine et stupide qui se retrouve dans certaines situations du scénario (la rencontre avec des guerriers russes au Q.I. assez limité et aux biscottos bien rembourrés) et même dans les dialogues du film. Je cite un des personnages “Le cyrillique, ça ressemble au klingon” (le langage des E.T. de Star Trek).
Ah oui, parce que les héros, évidemment, sont américains – et neuneus, certes, pour compenser. Ben oui, coco, sinon le public-cible, genre boutonneux bouffeur de popcorn, ne se reconnaîtra pas dans les personnages.
Quand Moscou est attaqué, les deux personnages principaux, un inventeur naïf qui s’est fait escroquer par son partenaire russe et son pote d’enfance, un boulet glandeur, sont en train de draguer deux minettes – américaines elles-aussi, c’est fou ça…- dans une boîte de nuit.
Ils s’enferment à la cave et sont les seuls à survivre à l’attaque (n’importe quoi… Les aliens lumineux font exploser des voitures mais ont peur d’entrer dans une cave obscure?) et tentent de trouver de l’aide dans une ville sinistrée et envahie par les invisibles.
Et c’est parti pour un grand jeu de cache-cache dans Moscou, entre six ou sept types du troisième type (euh…) et nos héros, aidés par un vieillard russe inventif, qui a transformé son appartement en cage de Faraday et a conçu un canon à micro-ondes pour dézinguer les E.T. , et une jeune moscovite astucieuse.
Le résultat est assez plat, les ficelles utilisées pour faire monter le suspense étant redondantes et le scénario ne proposant que peu de péripéties haletantes. Les acteurs s’impliquent mollement, à l’image d’Emile Hirsch, pas encore remis de son trip Into the wild, ou d’Olivia Thirlby. La mise en scène est bêtement linéaire et manque d’inventivité. Quant aux effets spéciaux, ils n’ont rien de vraiment transcendant. Bof, quoi…
Le seul truc qui sort un peu de l’ordinaire du blockbuster américain de base, c’est que pour une fois, les scénaristes dérogent à la sacro-sainte loi du happy-end hollywoodien – où tous les héros survivent et sortent plus fort de l’aventure – et choisissent de n’épargner personne. Préparez vos mouchoirs, il va y avoir des morts dans ce film, y compris parmi les les protagonistes principaux…
… mais pas assez, hélas, pour nous prémunir d’une suite éventuelle, en fonction des résultats de ce film au box-office.
On peut encore s’attendre à des heures sombres pour le cinéma.
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The Darkest hour
The Darkest hour
Réalisateur : Chris Gorak
Avec : Emile Hirsch, Olivia Thirlby, Max Minghella, Rachael Taylor, Joel Kinnaman, Dato Bakhtadze, Veronika Ozerova
Origine : Etats-Unis
Genre : Triste again à Moscou
Durée : 1h29
Date de sortie France : 11/01/2012
Note pour ce film : ●●○○○○
contrepoint critique chez : Ecran Large
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