Quelques mois à peine après son spectaculaire Tintin, Steven Spielberg est de retour dans les salles obscures et change encore de registre en s’intéressant cette fois à la première guerre mondiale. La bande-annonce de ce Cheval de Guerre nous faisait redouter un trop plein de sentimentalisme mais c’était sans compter sur la maîtrise de Spielberg qui sait raconter une histoire comme personne.
Tout commence dans la campagne anglaise filmée à l’ancienne par Spielberg. Entre le tableau et l’illusion de se retrouver en décor de studio bien que filmé dans en milieu naturel, le réalisateur pose son récit dans un univers réaliste mais qui a tout du conte. Albert se lie d’amitié avec le cheval Joey qui va lui permettre de sauver la ferme familiale jusqu’à ce que le cheval soit réquisitionné pour partir à la Grande Guerre. Dès lors, Spielberg choisi son héros. Ce ne sera pas le jeune Albert mais bien le cheval qui vivra la guerre, passant d’un camp à l’autre, alternant les périodes de dur labeur et de danger et les périodes de repos plus méritées mais pourtant si courtes.
Avec Cheval de Guerre, Spielberg se distingue donc dans un nouveau genre, aussi à l’aise ici dans les instant légers du débuts que dans les heures les plus graves. De nature profondément optimiste et sachant pertinemment qu’il s’adresse à un public familial, il ne faut pas s’attendre ici à ce que Spielberg nous fasse revivre les scènes du Soldat Ryan. Il nous le rappelle dès le départ, il faut voir Cheval de Guerre comme un conte, un chemin détourné pour parler d’horreur du conflit. C’est ainsi qu’il trouve des moyens détournés remplis d’émotion pour évoquer la mort brutale des soldats ou des compagnons de Joey.
Car la réussite de Spielberg est tout de même de faire en sorte que l’on s’attache à ce cheval, chose qui n’était pas gagnée puisque ce n’est pas l’animal le plus expressif. A mesure que le récit avance, on se lie d’amitié avec lui comme l’a fait Albert et comme le fera un autre cheval et l’on comprend tout le chemin qu’il parcours, les terribles épreuves qu’il doit affronter.
D’ailleurs, le parcours de Joey permet à Spielberg d’évoquer de nombreux thèmes passionnants. Il parle à la fois de la fin de la guerre à dimension humaine au profit de l’utilisation de la machine, de l’espoir de paix qu’il peut y avoir entre les peuples, … Mais le parcours de Joey est aussi une métaphore de ce qu’on pu vivre ces soldat au front, la marche, la maladie, la peur, la perte d’un camarade. Tout cela traité avec l’humanité de Spielberg donne un film rempli d’émotion jusqu’aux dernières images enflammées d’une beauté à couper le souffle et qui disent tellement de choses sur le chemin parcouru et rappelant les grands jours du technicolor.
Bien évidemment, en plus de son aspect de conte, certains reprocheront au film son sentimentalisme (critique facile des détracteurs de Spielberg), l’approximation dans le jeu du jeune Jeremy Irvine (en celà, ce n’est pas totalement volé) ou cette manie à vouloir faire parler tout le monde anglais (là dessus on regrette le réalisme du traitement des langue d’un Tarantino sacrifié au tout familial US). Mais il faut encore une fois reconnaitre une maîtrise technique impeccable de Spielberg qui livre encore des plans magnifique appuyés par la lumière de son compère Janusz Kaminski et le score à pleurer de John Williams et nous immerge comme personne dans les tranchées aux côtés de Joey.
Avec ce Cheval de Guerre, Spielberg arrive à faire passer à travers de l’équidé des sentiments plus intenses qu’à travers bien des humains dans un récit d’une ampleur impressionnante comme d’une intimité émouvante. Une histoire complète, captivante qui retrouve l’esprit des grandes fresques du cinéma d’antan comme on ne l’avait pas vu depuis bien longtemps.