[DVD] “Mineurs 27” de Tristan Aurouet

[Critique initialement publiée sur Cinétrafic ]

Qui a dit que les films noirs devaient obligatoirement se dérouler dans des ambiances nocturnes et pluvieuses? Ou qu’un thriller devait impérativement être mené tambour battant? Ou encore qu’il était nécessaire de montrer explicitement les scènes de violence ou de sévices sexuels pour rendre compte de leur côté horrible?
Mineurs 27 se déroule essentiellement de jour, dans une lumière assez crue… Son metteur en scène, Tristan Aurouet (Narco) prend le temps de s’attacher à ses personnages, développe son intrigue sur un tempo assez lent, lancinant même. Comme si chaque seconde suspendue était une seconde de vie gagnée. Comme si le cinéaste accordait à ses protagonistes un ultime moment de répit avant la tempête…
Et quand la violence finit par éclater, elle reste cantonné hors-champ ou dans la pénombre, comme n’est qu’effleuré le passé douloureux des deux jeunes héros du film et les événements qu’ils essaient tant bien que mal de refouler…
On est bien loin des conventions du genre, mais qu’on ne s’y trompe pas, Mineurs 27 est bien un vrai film noir, qui entraîne ses personnages dans un voyage sans retour possible, pendant lequel des vies vont se retrouver brisées, si elles ne l’étaient pas déjà depuis de longues années…

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Le premier plan donne le ton : Un flic ripou du nom de Vincent Descharnes (Jean-Hugues Anglade) contemple la façade d’un centre aéré où gambadent innocemment quelques enfants. Un adolescent taggueur y a inscrit, en lettres tachées de rouge, “L’enfer est ici”.
Le jeune voyou, qui laisse des inscriptions similaires sur d’autres bâtisses de cette petite ville proche de Royan, est Stan (Finnegan Oldfield), le fils du maire. Il exprime ainsi son profond mépris, sa haine même, à l’encontre des notables de cette ville de province dont le calme apparent dissimule de honteux secrets. Des faits dont il a été la victime, tout comme d’autres enfants du voisinage.
Alors qu’il n’avait que neuf ou dix ans, il est en effet tombé entre les mains d’un ou plusieurs pédophiles opérant dans le secteur. Ses parents ne l’ont jamais su. De toute façon, ils ont toujours été trop occupés par leurs professions respectives pour se soucier de lui. Ils ne se rendent même pas compte du malaise de l’adolescent, profondément introverti et restant à l’écart des autres jeunes de son âge.

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Pourtant, il va oser aborder Deborah. On le comprend… La jeune femme, jouée par Marie-Ange Casta, la jeune soeur de Laetitia Casta, est particulièrement charmante… Mais si Stan a surmonté sa timidité, c’est autant pour profiter de la douceur de Deborah que pour se rapprocher du petit ami de celle-ci, Wilson (Nassim Si Ahmed).
Les deux jeunes hommes partagent le même et douloureux passé. Ils ont été violés par le(s) même(s) personnes.

Les retrouvailles sont violentes. Wilson est surtout furax de le voir rôder ainsi autour de sa copine. A vrai dire, il ne se souvient plus de Stan, sans doute parce qu’il a réussi à occulter une partie de ce qui s’est passé il y a dix ans.
Stan est admiratif de voir comment Wilson a surmonté son traumatisme pour mener une vie normale – en apparence, du moins. Lui n’a rien oublié et ce drame est un fardeau dont il souhaite se débarrasser une bonne fois pour toutes.
Il rafraîchit la mémoire de son ancien compagnon d’infortune avec des clichés pris par les pédophiles qu’il a réussi à subtiliser et il lui annonce son intention de révéler l’affaire au grand jour…
Mais plusieurs personnes ont intérêt à ce que ce scandale ne refasse pas surface, à commencer par le père de Stan, dont la réélection pourrait être menacée, et Descharnes, qui avait à l’époque étouffé l’affaire…
Une terrible machination se met en place, destinée à enfouir la vérité… ad aeternam…

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Encore un thriller utilisant la pédophilie en toile de fond!”, vont penser certains. A tort, car finalement, les films traitant du sujet ne sont pas légion. Le sujet est encore tabou, et rares sont ceux qui savent l’aborder frontalement. Ici, Tristan Aurouet use de délicatesse en mettant le problème au coeur du film, en le centrant autour des victimes plutôt que des bourreaux, et en refusant de mettre des images sur les faits, que le spectateur devra imaginer lui-même. Ce qui intéresse le cinéaste, ce n’est pas de réaliser un film voyeuriste sur des actes pervers mais de montrer les conséquences psychologiques de ces actes sur les victimes.
Stan et Wilson essaient de se reconstruire, mais leur vie s’est brisée ce jour-là, de façon irréversible.

Ce qui séduit, dans ce film, comme dans tous les bons films noirs, c’est avant tout le cheminement dramatique qui pousse inéluctablement les personnages vers leur perte. Il y a un côté cruel dans cette intrigue dont tous les protagonistes – bourreaux et victimes – se retrouvent confrontés à une situation qui leur échappe, un engrenage de violence et de mort.
La mise en scène traduit cette sensation d’étau qui se resserre par le passage de cadrages larges à des plans de plus en plus rapprochés.

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Autre point fort, l’aspect atypique de ce polar, dont l’ambiance reste globalement très lumineuse, très solaire – c’est du moins l’impression que laisse le visionnage. Ainsi, le cinéaste caractérise la lutte qui se joue entre l’obscurité/le secret et la lumière/la vérité étalée au grand jour. Le rythme, très lent joue aussi un rôle non-négligeable dans le résultat final. Il indique l’imminence du drame, crée une certaine tension autour des personnages.

Cela dit, tout le monde ne supportera pas le tempo du film, quand même très lent, d’autant que les explications sont rares et que la partie thriller à proprement parler met du temps à démarrer.
C’est ainsi : Mineurs 27 ne cherche absolument pas à évoluer dans le registre de l’action pure et préfère se concentrer sur ses personnages. Et de ce point de vue, personne ne trouvera à redire sur les performances des acteurs.

Côté salauds : Jean-Hugues Anglade compose avec talent un personnage de flic pourri jusqu’à l’os sous l’apparence d’un type ordinaire, un brin paumé. Patrick Descamps incarne le père de Stan, notable ayant accepté de dissimuler des choses atroces pour conserver sa fonction. Et les frères Lellouche (Philippe et Gilles) s’amusent à jouer des hommes de main brillant plus par leur force physique que par leur finesse d’esprit.

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Côté “héros”, un trio de jeunes comédiens épatants qui se sont totalement investis dans leurs personnages.
Nassim Si Ahmed joue sa partition de façon très physique, à fleur de peau. Il est semblable à une cocotte-minute sous pression, la violence verbale ou physique agissant comme une soupape de sécurité.
Finnegan Oldfield, lui, joue plus sur l’intériorité. Son personnage est à jamais brisé par le drame vécu, il n’a plus vraiment la force de continuer. Les seuls moments où l’on sent la vie reprendre le dessus sont ceux qu’il passe avec Deborah, qui lui apporte sa douceur et son attention.
Marie-Ange Casta incarne parfaitement ce personnage qui possède à la fois la candeur d’une enfant, les charmes d’une jeune fille et la maturité d’une femme. Un alliage qui apaise les deux jeunes personnages masculins unis par ce douloureux passé.

Pour eux, pour le côté singulier de la mise en scène, le film vaut le coup d’oeil.
Il est désormais disponible en DVD chez BAC Vidéo, agrémenté de quelques bonus appréciables, dont une vidéo où Jean-Hugues Anglade se penche sur sa propre filmographie.

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Mineurs 27 Mineurs 27
Mineurs 27
Réalisateur : Tristan Aurouet
Avec : Nassim Si Ahmed, Finnegan Oldfield, Marie-Ange Casta, Jean-Hugues Anglade, Aïssa Maïga

Origine : France
Genre : film noir
Durée : 1h36

Note :

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BONUS

- Bnade-annonce
- Découverte de trois jeunes talents : mise en avant des trois jeunes acteurs du film. Vaut surtout pour l’interview de Finnegan Oldfield et de Nassim Si Ahmed. (environ 10 mn)
- Rencontre avec Marie-Ange Casta : interview “people” de la jeune actrice (environ 5 mn)
- La BO du film : tous les titres de la bande-originale accessibles depuis le menu DVD.
- Bio commentée de Jean-Hugues Anglade : L’acteur revient sur les films marquants de sa carrière et sur sa traversée du désert dans les années 2000. Passionnant. (environ 10 mn)

Note globale des bonus :

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DVD9 – Zone 2 – PAL – Couleur – Format 4/3 – 1.33  – Durée totale : 120  mn

Langues : Français Dolby 5.1 Sous-titres : -


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EDITION / DISTRIBUTION

Bac Films VidéoSortie le : 02/02/2012Maintenant disponible en DVD, Blu-Ray et VOD sur www.bacboutique.com

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