De Rouille et d’Os, critique

Par Fredp @FredMyscreens

Après l’ouverture du Festival avec Moonrise Kingdom, un deuxième film très attendu au festival se dévoile aujourd’hui, De Rouille et d’Os, de Jacques Audiard avec Marion Cotillard. Place donc à un mélo qui se prend vraiment comme un uppercut.

Après la reconnaissance cannoise et le triomphe aux César de Un Prophète, Jacques Audiard était attendu au tournant. Jamais là où on l’attend, c’est en adaptant De Rouille et d’Os de Craig Davidson, gros mélo sentimental à base de personnage brisés qui vont se trouver pour donner un sens à leur vie, que le réalisateur le plus intéressant du cinéma français actuel nous revient. Et la seule chose que l’on peut dire c’est que le choc émotionnel est bien là en sortant de la salle devant la force de ses personnages, l’intimité de la réalisation et la puissance de son récit.

Dès le départ il imprime complètement sa patte au récit en mettant en scène son mélo comme un polar mâtiné de drame social, caméra au point, au plus près des personnages, captant leurs moindres émotions, doutes, brefs moments de bonheur et nombreux coups durs que l’on se prend en pleine face avec une rare brutalité. Une mise en scène toute au service d’un récit qui dégage une puissance émotionnelle phénoménale car Audiard n’est jamais là où on l’attend et un moment de bonheur peut rapidement basculer dans le drame le plus violent tandis qu’une réplique pourra faire sourire en étant dans un décalage parfaitement dosé rapidement contrebalancé par l’intensité de l’histoire. On reconnaît alors ici la maîtrise scénaristique du réalisateur.

Mais surtout, ce qui se dégage de De Rouille et d’Os, c’est bien la force de ses deux personnages principaux. Alors que leur relation évolue, ils prennent en épaisseur et en assurance tout en révélant complètement leurs failles. Audiard y imprime des caractères forts qui ne demandent qu’à se confronter et vont pourtant se tourner autour sans vraiment le savoir. Marion Cotillard se révèle alors encore une fois émouvante en transmettant toute la détresse de Stéphanie, handicapée après son accident au Marineland, mais aussi la force de caractère qu’elle va acquérir grâce à Ali.
Ali, c’est Matthias Shoenaerts qui, après Bullhead, reprend le rôle du grand dur au cœur tendre. Mais loin des clichés, il est une brute adepte des sports de combats et un père assez indigne qui va trouver chez Stéphanie celle qui révèlera toute sa sensibilité.

La rencontre de ces personnages ordinaires et en même temps assez extra-ordinaire fait des étincelles et Audiard la filme de manière brute, sans fioritures, sans en rajouter non plus, ni dans le misérabilisme ni dans les violons et la guimauve, laissant toute la force du récit se dérouler sous nos pied alors que l’on est en train de se prendre un uppercut émotionnel comme on en prend que trop rarement au cinéma. Sans doute l’un des plus beaux moments de ce festival.

Suivez mes aventures dans une équipe de blogueurs au festival de Cannes au jour le jour sur le blog live Orange