Andrew Dominik refait équipe avec Brad Pitt pour s’embarquer dans les états d’âmes des tueurs à gage. Killing The Softly (Cogan – la Mort en Douce en VF) présenté en compétition est bien le film noir attendu, bavard et à l’humour sombre et violent et délivrant surtout un sous-texte politique particulièrement agressif.
Après le sublime L’Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford, le néo-zélandais Andrew Dominik débarque en pleine compétition cannoise en changeant complètement de registre. Du western contemplatif, il passe aujourd’hui au film noir violent qui brille par son scénario écrit avec une plume acérée.
Cogan – la Mort en Douce s’intéresse à Jackie, qui doit retrouver les braqueurs d’une partie de poker entre gangsters. Il va alors s’engager dans un jeu de massacre qu’il ne soupçonnait pas. Mais plus que cette intrigue somme toute assez classique dans le genre, ce qui intéresse ici le réalisateurs, ce sont les personnages. Plutôt que filmer des scènes d’action et fusillades, il va s’axer sur les états d’âme des tueurs à gage, de leur préoccupation sur les contrats avec leur tarifs à leurs envies plus personnelles, que ce soit de la petite frappe de quartier au mogul qui s’offre leurs services.
Servis par un casting impeccable (Brad Pitt toujours au top et particulièrement cynique, James Gandolfini et même Ray Liotta qui s’en prend plein la tête), les dialogues se révèlent particulièrement savoureux. L’auteur se révèle là un expert dans l’humour noir et, tel Tarantino ou les frères Coen (dont on sent clairement l’influence), arrive à décrire ses personnages en quelques lignes avec un certain décalage. Il en résulte un film d’une noirceur implacable mais aussi d’un recul salvateur sur le genre, montrant clairement les tueurs à gages sous un autre jour.
Également technicien de l’image, Andrew Dominik adopte une mise en scène particulièrement soignée, parfois m’as-tu vu, mais qui offre aux séquences d’assassinat d’une beauté et d’une brutalité qui rompent d’un coup les séquences plus bavardes qui précèdent, appuyés par des choix musicaux en décalage bienvenus sur la bande-originale.
Mais ce que l’on retiendra le plus finalement de ce Killing them softly, à côté des crises existentielles des tueurs à gages et des séquences violentes, c’est surtout son discours politique particulièrement appuyé qui n’hésite pas à mettre au pilori tout le système américain basé plus sur le business que l’humain dans une diatribe finale d’un cynisme absolu et pourtant tellement vraie.
Film noir et cynique particulièrement acéré, Cogan – la Mort en Douce est certes sous influences (et en cela, ses détracteurs donneront surement de la voix) mais Andrew Dominik s’approprie tellement le discours et les personnages que l’on ne peut que saluer son écriture servie par une mise en scène impeccable.
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