La fresque de cet été sur France 2 se nomme Inquisitio. On remonte le temps jusqu’au moyen-âge pour mener l’enquête en pleine période de trouble religieux et de maladie.
C’est une tradition, chaque été, les grandes chaînes diffusent un grand feuilleton pour essayer de garder les téléspectateur devant l’écran plutôt que sur la plage. Les recettes sont en générales connues : un grand secret de famille, un meurtre, une enquête et une grande révélation avec un casting regroupant le « meilleur» des comédiens des fictions télévisuelles de l’année. Depuis quelques temps, le concept a tendance à s’essouffler et France 2 a décidé cette année de laisser sa chance au projet de Nicolas Cuche (David Nolande, Flics, Le Chasseur) : Inquisitio.
Cette série en 8 épisodes de 45 minutes va nous emmener directement au moyen-âge, alors que la peste ravage les contrées et que 2 papes se disputent la tête de l’église catholique. Un contexte finalement assez peu utilisé dans le cinéma français et encore moins à la télévision qui a donc l’avantage donner à Inquisitio une véritable originalité. D’autant plus que cette période étant peu traitée, cela laisse une marge de manœuvre au réalisateur-scénariste pour donner sa propre interprétation de cet univers. Loin de revendiquer une quelconque exactitude historique, il va se servir de ce contexte pour nous emmener dans une enquête terroriste d’époque et … évoquer un inévitable secret de famille.
Dans le moyen-âge d’Inquisitio on retrouve un peu toutes les figures imposées, des machinations de l’Eglise pas si catholique, une sorcière rousse qui ne cherche pas à faire le mal, un nain détrousseur de cadavres, des scènes de torture, un grand inquisiteur mystérieux et son timide apprenti qui mènent l’enquête sur une vague de meurtres. Et au milieu de tout cela, un médecin juif qui tente de trouver un remède contre la peste. Religion contre science, catholiques contre juifs et croyances païennes, parallèle avec les attentats terroristes ici à base de bombe pestilentielle, les thèmes ne manquent pas pour rendre Inquisitio plutôt intéressant, d’autant plus que les auteurs n’ont pas oublié la dimension personnelle en explorant les dilemmes de ses deux héros nous permettant ainsi de nous attacher un peu à eux.
Mais alors qu’il y a un contexte passionnant à explorer et, sur le papier, des situations et personnage très intéressants, la série a pourtant du mal à décoller. D’un côté parce que le récit tourne régulièrement en rond autour des multiples rencontre entre Barnal (l’inquisiteur) et Samuel (le médecin). Les deux protagonistes se font face à face tellement souvent dans la série que finalement leurs réunions sont évacuées de toute tension. En cela les rebondissements sont aussi convenus que prévisibles et n’apportent pas vraiment de dynamique au récit, y compris dans la « grande révélation» . Ajoutez à cela, malgré des effets de style, une réalisation finalement peu inspirée (avec un filtre bleu-gris et des guitares électriques dans la bande-originale pour créer l’ambiance) tournant toujours autour des mêmes décors et certains acteurs au style un peu trop théâtral et manquant de spontanéité (à ce titre, le contraste entre le naturel d’Aurélien Wiik et la démonstration de charisme forcé de Vladislav Galard est percutant) et l’on a du mal à s’immerger dedans.
C’est dommage car on sent bien une réelle volonté de Nicolas Cuche de sortir du carcan habituel des productions télévisuelles françaises. On ne fera évidemment pas l’affront de comparer Inquisitio avec le niveau de Game of Thrones en termes de reconstitution médiévale, nous savons très bien que les moyens ne sont pas les mêmes, mais il faut reconnaitre que l’aspect « téléfilm» est trop marqué et qu’il manque une vision, un savoir-faire cinématographique qui nous aurait emmené complètement dans l’univers sombre, violent et poussiéreux du moyen-âge. Il n’en reste pas moins une série originale, posée et plutôt agréable à suivre qui aura au moins le mérite de proposer aux spectateurs du service public une autre proposition de fiction.