Voilà, enfin, Christopher Nolan donne livre la conclusion de son interprétation de Batman avec The Dark Knight Rises. Un final impressionnant et dense qui manque tout de même d’un supplément d’âme pour briller de tout son éclat.
Dire que The Dark Knight Rises était attendu est un euphémisme. Après le triomphe de The Dark Knight, certainement l’un des films les plus forts intéressants de ces 10 dernières années, l’impatience était à son comble au moment de découvrir la conclusion de la vision de Christopher Nolan. Allait-il pouvoir faire au moins aussi bien ? Comment dépasser le fantôme du Joker ? Comment échapper à la fameuse malédiction du 3e volet ? Le pari est des plus risqués mais le réalisateur se devait bien d’apporter une réponse après avoir laissé le chevalier noir endosser les crimes du déchu Harvey Dent pour apporter la paix à Gotham City.
[à noter : si j'ai essayé au maximum d'éviter les spoiler, il se peut que certains événements inédits de l'histoire soient ici révéler afin de justifier le ressenti exprimé ici]
8 ans plus tard, Gotham a bien été nettoyée de la pègre, mais à quel prix ? Bruce Wayne vit depuis tout ce temps reclus dans son manoir tel un ermite boiteux dont le seul contact avec le monde extérieur est le fidèle Alfred. Mais la paix ne peut jamais durer éternellement et l’arrivée d’un nouveau terroriste, Bane, va l’obliger à endosser à nouveau le costume de Batman … peut-être pour un dernier baroud d’honneur ? Mais il serait bien trop simple de réduire cette grand conclusion à ce simple affrontement tant attendu par les fans du comics.
Car sur 2h45 de film, Christopher Nolan va imposer un récit dense dans lequel une galerie de personnages ne va cesser d’évoluer. Si la première partie peut sembler trainer un peu pour remettre en place tous les pions sur l’échiquier, nous rappeler le contexte et faire revenir Batman sur le devant de la scène, on ne voit ensuite plus le temps passer tant le réalisateur a de choses à raconter. Que ce soit les destinées ou les origines des personnages, la figure du héros ou évidemment la menace implacable de Bane sur Gotham. Si Batman était la vedette d’un Batman Begins traitant de la peur et Joker la star du chaos dans the Dark Knight, ici c’est à Bane de mener la révolution à Gotham.
Mais Bane n’est pas forcément le personnage principal de cette conclusion. Pas plus que Batman, Gordon ou la nouvelle venue Selina Kyle d’ailleurs. Non, la véritable héroïne de The Dark Knight Rises, c’est bien la cité de Gotham. C’est à travers la ville, les menaces qui l’atteignent, les plaies qu’elle devra panser que Christopher Nolan traite des thèmes de notre société malade. Et après la paranoïa causée par le terrorisme dans le précédent volet, c’est de crise économique et de révolution politique dont il est question ici. Ou comment la peur, le désespoir, la pauvreté et bien d’autres facteurs de sociétés perdant leurs repères peuvent mener de nouveaux leaders à s’octroyer le pouvoir sur un peuple réduit au silence.
En cela, Nolan poursuit et vient conclure le discours qu’il avait brillamment entamé dans les deux précédents volets. Cependant, c’est ici parfois bancal, souvent traité de façon assez grossière et si le sujet d’étude est passionnant, c’est cette fois trop maladroit pour accrocher pleinement.
A côté de Gotham qui prend autant de coups que Batman (le second étant d’ailleurs l’esprit de la première, leurs destins ne peuvent être que liés), Nolan nous montre toutefois un certain espoir au travers de Gordon et du jeune flic John Blake. Mais ce n’est pas pour autant qu’ils sont simples. Au contraire, entre dilemme moral et secrets enfouis, ils se révèlent plus complexes qu’il n’y parait. C’est d’ailleurs aussi et surtout le cas de Bane ou Selina Kyle.
En ce sens, les personnages sont particulièrement bien écrits et passionnants, Catwoman la première (mention spéciale à Anne Hathaway particulièrement à l’aise dans la combinaison de la voleuse faisant taire toutes les rumeurs et montrant un investissement physique et psychologique étonnant) mais aussi Alfred (Michael Caine sacrément touchant) et évidemment Bruce Wayne (Christian Bale dans une sobriété et en même temps une intensité qui lui vont particulièrement bien).
Avec une telle ambition et une galerie de personnages foisonnante, Nolan s’est donné les moyens de mettre en place sa vision, l’ampleur du récit qu’il a imaginé. En cela le film est vraiment impressionnant, de l’ouverture aux poursuites en passant par la destruction d’un stade comme on a pu le voir dans la bande-annonce. Le réalisateur, avec l’appui de la musique d’Hans Zimmer maintient une tension à tout instant, pendant 2h45 dont on ne décroche pas. Pourtant quelque chose ne colle pas et nous empêche d’apprécier le spectacle et la destinée du héros.
En effet, on savait Nolan peu à l’aise avec les scènes de bagarre mano à mano et ce défaut nuit ici grandement au choc qu’imposait l’un des tournants du film et qui ne se produit que moyennement. De même, l’utilisation de facilités scénaristiques, d’ellipses temporelles mal gérées, de flashbacks sans intérêt, d’allusions pour les fans et surtout de recettes ramenant la profondeur du récit à une histoire déjà vue dans mille blockbusters dans la dernière partie déçoivent.En effet, alors que le réalisateur avait amené ses films dans des terres presque inexplorées du blockbuster, il y revient d’un seul coup et c’est bien dommage.
Du coup, the Dark Knight Rises n’atteint pas le niveau de son prédécesseur. Il lui manque pour ça cette âme chaotique qui le caractérisait et une construction narrative vraiment aboutie. Mais même sans cela, Nolan arrive tout de même à conclure une histoire ambitieuse qu’il déroule avec panache depuis Batman Begins, nous offrant l’une des trilogies héroïques les plus fascinantes du cinéma.