Rien ne nous en apprend plus sur un auteur que d’examiner le lieu où il travaille. Si quelques scénaristes se vantent de pouvoir écrire n’importe où, la plupart d’entre eux ont besoin de se réfugier dans un lieu dédié. C’est dans ce sanctuaire qu’ils passent de longues heures solitaires à créer leurs histoires, coupés du reste du monde…
En attendant que les confrères et consoeurs qui ont accepté de nous ouvrir les portes de leurs bureaux rendent leurs copies, je vous propose de nous faufiler dans celui de l’illustre romancière britannique.
Inutile je présume de vous présenter Agatha Christie (1890 - 1976), l’une des plus célèbres (et prolixes) romancières britanniques, grande papesse du récit policier. On lui doit… plus de quatre-vingt ouvrages (romans, nouvelles et pièces de théâtre), dont un certain nombre ont été, sont et seront adaptés pour grand et petit écrans, notamment les aventures des mythiques Hercule Poirot et Miss Marple.
Il faut dire qu’elle a magnifié l’art du whodunit (littéralement »qui a fait le coup? »), intrigues qui fonctionnent particulièrement bien en télévision.
Elle se confiait peu en public mais a décrit ses rites d’écritures dans son autobiographie. On l’y découvre lectrice avide dès sa plus tendre enfance, avec des goûts très éclectiques allant de Charles Dickens à P. G. Wodehouse, Lewis Carroll ou William Shakespeare. Elle considérait l’écriture comme « un grand réconfort » dans la mesure où elle manquait cruellement d’assurance dans la vie de tous les jours, peinant pour s’exprimer oralement.
Elle se disait particulièrement influencée par les aventures de Sherlock Holmes qu’elle découvrit à l’âge de huit ans, et celles d’Arsène Lupin. Elle commença à écrire à la suite d’un pari avec sa soeur Madge, qui partageait son goût pour ces récits policiers. La jeune Agatha les connaissait tellement par coeur qu’elle se déclara capable d’en écrire à son tour. Il lui faudra cependant atteindre la trentaine avant de les faire publier.
Cela peut sembler paradoxal de la part d’un auteur aussi prolixe mais Agatha Christie redoutait le writer’s block, considérant la genèse de chaque histoire comme une véritable « agonie ». A la fin de chaque récit, elle se déclarait d’ailleurs incapable d’en écrire jamais un autre. Elle notait dans des carnets ses idées d’intrigues, mais aussi des détails sur les modus operandi de crimes parfaits, elle classifiait le tout par association d’idées à l’aide d’étiquettes, jusqu’à ce qu’émerge une histoire qui tienne la route. Ses histoires étaient extrêmement planifiées avant qu’elle n’en attaque l’écriture, pour une raison évidente: le lecteur ne devait pas deviner l’identité du coupable avant la fin.
Même chose pour la création de ses personnages, qui devaient exister à part entière avant qu’elle les fasse interagir dans une intrigue. Elle s’est amusée à se mettre elle-même en scène à travers quelques personnages, notamment celui, récurrent dans son oeuvre, d’Ariadne Oliver.
Agatha Christie prisait particulièrement les crime stories parce que ce genre se décline à merveille avec tous les autres: romance, thriller, humour… Elle se servit beaucoup de sa prime expérience d’infirmière, notamment ses connaissances pharmacologiques, pour ses histoires, et se documenta énormément, tout au long de sa carrière, sur la psychologie des criminels.
Agatha Christie écrivait partout et en toute heure. Maints de ses ouvrages furent rédigés lorsqu’elle accompagnait son second époux, archéologue, dans ses voyages. La dernière étape se déroulait cependant au calme et via une machine à écrire. Elle n’eut pas de vrai bureau avant un âge tardif et prit l’habitude d’écrire deux livres en parallèle, pour éviter de bloquer sur une intrigue.
Si vous souhaitez en savoir plus sur Agatha Christie, son oeuvre et son rapport à l’écriture je vous invite à visiter les excellents sites Hercule Poirot Central et The Christie Mystery. Je vous recommande également un article du site Envie d’écrire qui nous enseigne comment créer un roman « à la Agatha Christie ».
Rendez-vous dans quinze jours pour visiter un nouveau bureau d’auteur…
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