Alors qu’un nouveau volet faisant plutôt office de spin-off débarque sur les écrans, il était temps de revenir sur la trilogie Jason Bourne qui, d’une certaine manière, a révolutionné le cinéma d’action et d’espionnage pour les années 2000.
Au début des années 2000, seuls deux espions règnent en maîtres au cinéma : James Bond et sa bonne vingtaine de films et le tout frais Ethan Hunt qui remplit chaque Mission impossible. Mais Doug Liman va changer la donne en adaptant La Mémoire dans la Peau de Robert Ludlum qui date de vingt ans plus tôt. Un vrai questionnement sur l’identité et sur les moyens employés par les services secrets, voilà la recette de la franchise en devenir. Car Jason Bourne est amnésique et la recherche de son passé va lui révéler des éléments qu’il aurait sans doute préféré ne pas savoir. Alors la traque commence. Recherché par les services qui l’employaient, il va devoir retrouver ses réflexes d’espion pour les affronter et enquêter sur sa personnalité.
Pour ce personnage complexe avec une réelle profondeur psychologique mais demandant également une grande implication physique, le réalisateur choisit Matt Damon. Un casting malin de la part du réalisateur qui mise alors sur l’aspect « monsieur tout le monde» de l’acteur pour que le public puisse s’y identifier facilement. Mais une aubaine également pour Damon qui manquait encore d’un premier rôle fort pour creuser son trou à Hollywood. Il y a ainsi une véritable alchimie entre le personnage filmé par Liman et Matt Damon qui est pour beaucoup dans la réussite du film.
De son côté le réalisateur reste plutôt sobre dans sa réalisation. Ne cherchant jamais la surenchère, il assume même un rythme plutôt posé mais assez malin dans les scènes de tension tandis qu’il imprime une patte bien européenne à son film en évitant soigneusement les clichés de carte postale. Il rend alors son film plus réaliste et percutant, mettant alors encore plus en relief la quête de son personnage. Malgré les retards de tournages dus à une mésentente entre le réalisateur et le studio et à quelques remaniements suite aux événements du 11 septembre, le film finira par sortir en 2002 et, si il ne casse pas la baraque, se révèle assez rentable et intéressant pour envisager une suite.
Si Doug Liman reste au poste de producteur exécutif de la suite, La Mort dans la Peau, c’est le britannique Paul Greengrass qui prend la relève derrière la caméra. Sur le scénario sous tension de Tony Gilroy qui n’hésite pas à tuer dans les premières minutes le personnage de Marie afin de redonner un but à Bourne et l’emmener à nouveau à la recherche de son passé, le réalisateur fait preuve d’une grande maitrise de l’action. En fait, le style quasi-documentaire qu’il avait développé sur Bloody Sunday et Vol93 sert ici complètement le film pour lui apporter une dose de réalisme et de paranoïa supplémentaire sans jamais oublier ses décors européens.
Ainsi, en plus d’approfondir le personnage de Matt Damon (qui augmente encore en intensité), le réalisateur ne nous offre pas des scènes d’action spectaculaires mais leur découpage est d’une redoutable efficacité, nous laissant presque le souffle coupé après une course poursuite à Moscou. Si bien que ce style sera adopté par beaucoup d’autres réalisateurs de films d’action mais jamais avec le même talent et la même lisibilité. Pour une fois, la suite se révèle supérieure au premier volet. A la fois plus complexe et plus rythmé, le film cartonne et laisse une brèche ouverte pour une suite.
La trilogie Jason Bourne s’achève alors sur la Vengeance dans la Peau. Avec Paul Greengrass toujours derrière la caméra et un Matt Damon toujours à fond dans le rôle, nous voici donc prêts pour la conclusion d’une quête d’identité qui a fait du réalisme un mot d’ordre. Mais le scénariste Tony Gilroy va encore compliquer l’histoire en imbriquant cette suite à un instant T du second volet, renforçant ainsi la cohérence de la trilogie et jouant habilement avec les fans. Il créé un nouveau programme secret à démentielle et Bourne va alors voyager de Londres à New-York, perdant alors son identité européenne dans la dernière partie. Suspense, action et poursuites endiablées filmées avec savoir-faire et adrénaline, la recette fonctionne toujours et Bourne va enfin avoir réponse à toutes ses questions.
Dès lors, il est clair qu’une suite est inutile, la boucle étant bouclée. Mais vu le carton de ce 3e volet qui était une conclusion parfaite pour le personnage, les producteurs ne pouvaient pas s’arrêter là. Place donc maintenant à son héritage, l’espion Aaron Cross campé par Jeremy Renner.