Myrtille et Dimitri, un couple d’amants criminels, fouille dans le bureau du défunt Boris Polianoff, en quête du magot que celui-ci possédait. Mais leur forfait est interrompu par une succession d’arrivées dans les locaux. Le bonhomme venait d’ouvrir un centre de formation et, manque de chance pour les malfaiteurs, les enseignants et les élèves débarquent pour commencer leur stage. Comme ils n’ont pas eu le temps de trouver ce qu’ils étaient venus chercher, Myrtille et Dimitri n’ont pas d’autre choix que de se faire passer pour les gérants du centre et de s’occuper des nombreux arrivants, tous hauts en couleurs…
Sur cette trame, Francky Martini livre un vaudeville alerte dans lequel, pour une fois, il n’est pas question d’amants dans le placard et de chassés-croisés amoureux, mais qui contient néanmoins de très nombreuses scènes de ménage. Et pour cause ! Le centre de formation où se déroule l’action est en effet un centre de formation pour… domestiques!
Les stagiaires sont là pour apprendre à manier la serpillère, le plumeau et l’aspirateur, à dresser une table correctement et à apprendre à obéir aux ordres de leurs patrons… Facile? Eh bien non, pas tant que cela… Surtout pour certains des élèves, qui sont, disons… limités. Ou du moins néophytes en la matière.
Il y a l’ancienne domestique d’une comtesse décédé, la petite jeune que ses parents ont inscrite là faute de mieux, le chômeur en fin de droits porté sur la bouteille, la mère de famille venue des quartiers populaires, qui s’exprime comme un charretier, une femme ordinaire envoyée par le Pôle emploi et une bourgeoise qui vient de se faire plaquer par son mari, parti avec la bonne (hé oui…).
Si l’ancienne domestique maîtrise naturellement tout ce qu’il faut savoir pour tenir correctement une maison, les autres rament un peu, pour ne pas dire beaucoup, pour réaliser les exercices imposés. Car il ne suffit pas seulement de faire le ménage, il faut le faire avec distinction, fluidité, grâce… Des notions qui échappent totalement à certains élèves…
Cela donne des scènes souvent drôles, où ballets de balais et concours de vaporisateurs lave-vitres (conseil d’ami, évitez le premier rang…) rythment cette Star Academy du ménage. On peut déplorer quelques longueurs et des situations redondantes, et regretter que l’auteur n’ait pas été plus loin dans le délire burlesque, mais dans l’ensemble, la pièce tient la route et n’a pas à rougir face aux vaudevilles proposés dans certains théâtres parisiens.
Les comédiens amateurs de la troupe du Théâtre de l’Eveil semblent beaucoup s’amuser sur scène et communiquent leur plaisir aux spectateurs. Même si on note quelques trous de mémoire sans conséquence et quelques bégaiements, tous s’en sortent plutôt bien et se donnent sans retenue.
Mention spéciale à Estelle Mathieu, qui incarne Myrtille et qui réussit une bien meilleure sortie de scène que Marion Cotillard dans le dernier Batman (pas bien difficile, en même temps…). Bon, j’avoue être un peu de parti-pris, puisque c’est une amie et que cette critique théâtrale (chose rare sur Angle[s] de vue) obéit à un principe de pur copinage…
Cela dit, tout ce que j’ai affirmé plus haut est on ne peut plus sincère. “Pris de court” est un vaudeville bien structuré, assez drôle et joué avec un enthousiasme communicatif.
Si vous habitez à proximité de Sartrouville, vous pouvez assister à la dernière représentation de la pièce aujourd’hui, dimanche 14 octobre à 15h, à l’Espace Gérard Philippe – 80 rue Louise Michel – 78500 Sartrouville.