Si il est une histoire d’amour qui a marqué le Hollywood et a révélé toute la mégalomanie de son producteur avec des images inoubliables, c’est bien Autant en emporte le Vent. Retour sur l’un des plus grands succès de l’histoire du cinéma et ce qui l’a rendu culte.
Fruit de la mégalomanie et du perfectionnisme de Selznick, Autant en emporte le Vent voit chaque jour son budget grossir tandis que les réécritures s’enchaînent pendant le tournage. Mais surtout, le producteur aura épuisé trois réalisateurs pour arriver à ses fins. Car après avoir engagé George Cukor avec qui avait l’habitude de travailler et qui s’entendait très bien avec les actrices, le producteur se rend compte qu’il ne pourra pas porter le projet et qu’il s’entend très mal avec la star Clark Gable. Ce dernier impose alors Victor Flemming à la caméra. Tout juste sorti du Magicien d’Oz, il apportera beaucoup de tension dramatique au film mais aussi un certain savoir-faire technique. Toutefois, le tournage étant épuisant, Sam Wood viendra l’épauler. Pourtant, le film ne souffrira pas beaucoup de cette valse des réalisateurs, notamment grâce à la main de fer avec laquelle Selznick dirige le projet.
Le succès n’était pourtant pas garanti pour le film. En effet, le contexte historique de la Guerre de Sécession n’a jamais très apprécié par le public. Toutefois, la renommée et le succès du film font toute la différence et suscite une attente fébrile du film. D’ailleurs, l’immense casting pour le rôle principal de Scarlett O’Hara qui n’en finissait pas (le tournage débutait alors que le rôle n’était pas encore distribué) alimentait sans cesse les revues people et chacun y allait de son pronostic alors que toutes les stars de l’époque passaient les essais avant d’échouer finalement à la presque inconnue Vivien Leigh. Elle seule arrivait à faire face au caractère de Rhett Butler incarné par Clark Gable.
Si la fabrication assez épique du film est entrée dans les annales, le film lui même est tout autant reconnu. Les amours contrariés, les rendez-vous manqués de Scarlett et Rhett sur fond de Guerre de Sécession et de reconstruction du pays font ainsi d’Autant en emporte le Vent une épopée romanesque couvrant, sur 4h de film, presque toute la vie de ses personnages et une partie de l’histoire des États-Unis. Ainsi, en filigrane de l’histoire d’amour, le film parle de la guerre, des traditions sudiste, du racisme et de l’esclavage, d’un pays en feu et en reconstruction, du capitalisme et se révèle même particulièrement féministe pour l’époque.
Car il ne faut pas croire que Scarlett O’Hara soit une jeune fille éperdument amoureuse écrite comme dans les romans à l’eau de rose. Au contraire, si elle est guidée par les sentiments amoureux au début du film, elle évolue rapidement et passe par de nombreuses émotions pour révéler un sacré caractère face aux situations qu’elle va rencontrer. La garce du début du film va affronter la mort de ses proches, la perte de son foyer, la guerre, transformant son héroïne en battante qui créera son entreprise pour subvenir aux besoin de sa famille. A elle seule, Vivien Leigh porte ainsi sur ses épaule presque tout le film avec un force impressionnante et donne une image de femme battante comme on en voit peut dans le cinéma de l’âge d’or d’Hollywood. Ainsi, même la légendaire réplique assassine de Rhett Butler à la fin du film poussera encore Scarlett à se battre.
Grande fresque romanesque, Autant en emporte le vent ne manque pas de grands moments de cinéma et propose certaines images particulièrement marquantes. Décomposé en 4 grands actes chacun d’une tonalité particulière (de l’innocence colorée à la mort sombre en passant par le rouge sang et feu de la guerre et du marron de la désolation) c’est sans doute la deuxième partie qui se révèle la plus passionnante, plongeant Scarlett dans la guerre, magnifiée par le feu du technicolor, fuyant Atlanta prise par les flammes et aidant comme elle le peut les victimes de la guerre. Les 3e et 4e parties faisant étant moins intenses mais toutes aussi intéressantes pour la destinée des personnages liés à jamais par l’amour ou l’amitié (la relation entre Scarlett et Mélanie est d’ailleurs très touchante) et l’évolution de la société après la guerre.
Avec une portée finalement bien plus large qu’une simple amourette et un drame assez loin de la niaiserie que l’on pourrait s’imaginer, Autant en emporte le Vent est donc bien un grand film d’amour mais aussi sur une vie révolue, une certaines période de l’histoire américaine balayée d’un coup. Face à cette réussite, le succès populaire et critique du film est immédiat et il devient alors très vite le plus grand succès de l’histoire du cinéma, battant tous les records d’entrées (record aujourd’hui toujours imbattu en tenant compte de l’inflation). Si il faudra attendre 1950 pour le voir en France, sa sortie en période de trouble aux USA permet à la population de garder espoir en des jours meilleurs. Et, finalement à juste titre, la profession récompensera le film à la hauteur de la mégalomanie de son producteur et de l’investissement de ses équipes artistiques en lui décernant 10 oscars. Dès lors Selznick n’aura de cesse de tenter de refaire aussi bien sans jamais y arriver mais restant le créateur de l’une des plus belles légendes du cinéma.