“Stars 80” de Frédéric Forestier & Thomas Langmann

Par Boustoune

Salut les p’tits clous…
Pour les plus de vingt-cinq ans, écouter de vieux tubes musicaux des années 1980 permet généralement de se replonger avec délice dans ses souvenirs de jeunesse. Avec une petite pointe de nostalgie, on se remémore ainsi ses premières boums, ses premiers baisers, ses premiers chagrins d’amour, ses vacances en famille ou entre amis, et plein d’autres évènements rythmés par la musique pop qui avait le vent en poupe. On se rappelle aussi des copains de classe, de leurs looks et du nôtre – il faut assumer – copiés sur les cadors du Top 50.
A vrai dire, c’est plutôt agréable… Mais est-ce que cela suffit à faire un film?
Oui, Stars 80, de Frédéric Forestier et Thomas Langmann, qui empile les hits français des années 1980 pendant près de deux heures.
Euh… D’accord. Reformulons la question. Est-ce que cela suffit à faire un bon film ? Non, hein…

Pour faire un bon film, il faut quand même un semblant de scénario, ou une sacrée dose de génie, de bons acteurs, une mise en scène avec un tant soit peu d’allure. Autant de qualités qui font cruellement défaut à Stars 80

Le scénario? Il s’inspire vaguement de la success-story de Hugues Gentelet et Olivier Kaefer et de leur RFM Party 80 : Vincent (Richard Anconina) et Antoine (Patrick Timsit), deux loosers qui gèrent tant bien que mal une société de spectacles employant des sosies de célébrités, sont sur le point de faire faillite quand ils ont l’idée un peu folle mais géniale de réunir sur scène d’anciennes gloires de la musique des années 1980 – les vraies, cette fois – et de montrer le spectacle dans tout l’hexagone, au cours d’une longue tournée.

Le premier tiers du film les envoie à la recherche de leurs vedettes, dont la plupart ont complètement abandonné la chanson, et les montre en train d’essayer de les convaincre de reprendre du service, au moins le temps de quelques concerts, juste pour voir si la mayonnaise prend.
On les voit ainsi essayer de sympathiser avec Jean-Luc Lahaye dans sa boîte de nuit – la vraie, hop, petit coup de pub au passage… – et être obligés de lire à haute voix son bouquin – hop, second coup de pub… – , aller repêcher les Début de Soirée dans les cuisines d’un vendeur de kebabs, réconcilier Peter et Sloane ou rouler à tombeau ouvert avec François Feldman. Tout ceci se veut drôle, mais ne débouche que sur des gags anémiques (la voiture qui fait des tonneaux sur “Valses de Vienne”, arf, trop bidonnant…) ou débiles.

Le second tiers relate la tournée et, entre deux sketchs affligeants (Gilbert Montagné, reconverti en prêcheur afro-américain qui fait un salto arrière, Cookie Dingler qui utilise une plante verte comme cache-sexe…), donne à chaque chanteur la possibilité de faire son numéro et rappeler au spectateur quel était son plus grand tube. Comme ils sont une bonne quinzaine à avoir accepté de jouer le jeu, les séquences musicales s’enchaînent presque non-stop, comme dans une anthologie de clips. Ca fait passer le temps, mais au bout d’un moment, on ressent le vide scénaristique d’un script laissé à l’abandon.
A quoi bon amorcer des pistes de situations comiques – fussent-elles dépourvues d’originalité – si c’est pour les bazarder en cours de route? Les auteurs n’exploitent pas – ou très mal – les apparitions du patron de la maison de disques qui a snobé les deux associés et leur lucrative idée de tournée, la potentielle romance entre Vincent et Sabrina (la bombasse de “Boys boys boys”, toujours sexy…) ou entre Antoine et Lio (qui ne compte pas pour des prunes non plus) ou les problèmes bancaires du duo…

Aucune péripétie digne de ce nom, aucune aspérité. Rien qui donne matière à rire ou à s’émouvoir. Et encore moins à s’émoustiller (quand Sabrina sort de la piscine, on ne voit plus sa poitrine sortir du soutien-gorge. Autre époque, autre moeurs…Ah, nostalgie quand tu nous tient…).
Zéro inspiration. Aucun enjeu scénaristique…

… à l’exception de la dispute peu crédible entre les deux amis, pour une histoire absurde de leadership et de notoriété, qui occupe le troisième tiers du film. Antoine et Vincent se reparleront-ils? Leur amitié sera-t-elle plus fort que le succès? 
Ah, l’insoutenable suspense! On ne peut pas deviner que le duo finira par se réconcilier devant des milliers de spectateurs, au Stade de France, pas vrai? Surtout avec “On va s’aimer” en fond musical, hein?

Si encore c’était correctement joué, on pourrait encore faire semblant d’y croire. Mais non, même pas…
Anconina et Timsit passent 90% du film à se sourire bêtement et se toper dans la main, sans doute contents de la bonne blague qu’ils sont en train de jouer aux spectateurs. Bruno Lochet, qui joue le chauffeur (de bus/de salle) retombe dans du Deschiens de base, la poésie décalée en moins. Eric Naggar pète un câble en banquier fan de Johnny et de… Sabrina (on peut comprendre…). Venant de la part d’acteurs professionnels bien rôdés, c’est assez affligeant.
On sera un peu plus indulgents avec les chanteurs, moins habitués à déclamer des répliques qu’à chanter, mais force est de constater qu’ils sont de bien piètres comédiens. Mention spéciale, dans la nullité, à Jean-Luc Lahaye, qui semble vraiment se croire irrésistible en parrain de boîte de nuit aimant les(très) jeunes femmes, dans un pathétique numéro d’autodérision. Et aussi à Gilbert Montagné, qui joue totalement faux et semble ânonner son texte. Bon OK, il est aveugle et n’a pas pu lire son texte, mais on aurait pu lui écrire ses répliques en braille, non?

Cela dit, sa scène de gospel est la seule à venir mettre un peu de vie dans ce film plan-plan. Avec la scène où les artistes, dépités par leur premier concert devant une salle vide, reprennent confiance en transformant leur dîner d’après-spectacle en boeuf d’enfer, soulevant l’enthousiasme des clients du restaurant. Là, le charme opère un peu. Succinctement, hélas.  

Deux ou trois scènes potables pour près de deux heures de film, le bilan est bien maigre, d’autant que la mise en scène du duo Forestier/Langmann ne relève en rien le niveau. En même temps, on n’attendait rien de bon du duo coupable de l’infâme Astérix aux jeux olympiques… 
Certes, on ne s’ennuie pas vraiment, avouons-le. Et certains se laisseront emporter par la musique et les chansons, omniprésentes. Il paraît qu’il y a de l’ambiance à certaines séances, avec des spectateurs qui chantent en même temps que les artistes… Mais bon, si c’est juste pour ça, il y a les karaokés. Ou la possibilité d’aller voir les artistes jouer en live, au cours des tournées RFM Party 80. C’est quand même plus sympa…
Enfin, pour ceux qui aiment, hein. Parce que, si “c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes”, il faut bien dire que la soupe reste toujours de la soupe… 
 

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Stars 80
Stars 80

Réalisateurs : Frédéric Forestier, Thomas Langmann 
Avec : Richard Anconina, Patrick Timsit, Bruno Lochet, Sabrina, Lio, Jean-Luc Lahaye, Gilbert Montagné,…
Origine :France
Genre : karaoké pas OK 
Durée : 1h50

Date de sortie France : 24/10/2012
Note pour ce film : ●●○○○○

Contrepoint critique : Ecran large

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