Critique Cinéma : Amour

Par Nivrae @nivrae

Amour est le nouveau film de Michael Haneke, sorti le 24 octobre 2012.

Amour a été récompensé par la Palme d’Or au festival de Cannes en 2012. Le réalisateur avait déjà obtenu le même prix pour le Ruban Blanc en 2009.

Synopsis : Georges et Anne sont octogénaires, ce sont des gens cultivés, professeurs de musique à la retraite. Leur fille, également musicienne, vit à l’étranger avec sa famille. Un jour, Anne est victime d’une petite attaque cérébrale. Lorsqu’elle sort de l’hôpital et revient chez elle, elle est paralysée d’un côté. L’amour qui unit ce vieux couple va être mis à rude épreuve.

Casting : Jean-Louis Trintignant, Emmanuelle Riva, Isabelle Huppert

Du silence, quelques notes de musique classique sur un piano, et une grande économie de mots, rien d’autre. La bande son est quasiment vierge, les génériques sont muets à l’image de ces deux vies tournées vers la musique classique qui sont mises en sourdine par la maladie. Amour dure deux heures et sept minutes, une durée qui semble s’étirer de manière interminable, les minutes sont longues et pesantes, non pas que l’on s’ennuie, loin de là, mais la lenteur dépose sur nos épaules de spectateurs le poids de la vieillesse.

On a reproché à Haneke de tourner un film quelque peu malsain, avec des scènes finales peu compréhensibles et n’apportant pas de véritable aboutissement. Je ne suis pas d’accord. Emmanuelle Riva nous offre un spectacle terrifiant, celui d’une femme cultivée, intelligente et parfaitement maîtresse d’elle même qui devient peu à peu sénile, dépendante des autres comme un enfant mais conservant de rares éclairs de lucidité. Ce n’est pas malsain mais juste terriblement réaliste, l’humiliation ressentie par cette femme qui ne peut plus rien faire par elle-même nous frappe en plein visage. Les mots, les gestes, à son encontre sont autant de couteaux qui semblent blesser notre propre fierté.

Le cinéma actuel nous offre du dynamisme, des péripéties à tout bout de champ, une histoire avec un début et une fin faite de mille actions. Ici rien de tout cela. Certaines critiques disent trouver le temps long, et alors ? Ce n’est pas ça d’avoir 80 ans, trouver le temps long ? ‘Rien de palpitant’, ce sont les mots du personnage de JL Trintignant pour qualifier les aléas que la vie lui fait subir. Rien de palpitant non, si ce n’est notre coeur qui bat et notre gorge qui se noue pour réprimer les sanglots. Quelqu’un crie dans notre tête qu’Haneke n’a pas le droit de nous obliger à regarder ça, à souffrir pour Trintignant qui ne montre rien et avance vaille que vaille au rythme que ses vieux genoux veulent bien supporter. On pleure intérieurement toutes les larmes qu’il n’exprime pas.

J’ai lu quelque part que le film n’avait rien à voir avec son titre, ou que des flash-back montrant des souvenirs heureux du couple auraient été les bienvenus. Non, non, non et non ! Haneke n’a pas signé pour nous vendre un énième compte de fée niaiseux, où tout va mal mais que des parades sont trouvées pour que tout aille mieux. Pas de paillette, pas de sourire inutile, même pas de musique pour adoucir nos esprits torturés. L’amour est présent dans chaque scène, dans ce vieil homme qui souffre et se tait, dans les derniers éclairs de lucidité de la vieille femme mourante, dans la retenue de ce couple qui ne peut même pas se dire adieu. Lorsque la vieillesse malmène à ce point la dignité humaine, l’amour est le seul et unique rempart. L’amour est le fil conducteur de cette histoire certes, mais il est lié à la vie et celle-ci finit mal. Ajouter du bonheur à ce drame aurait été surfait et raté.

Note de Waterely : 9/10 – A déconseiller aux personnes âgées sensibles et à ceux qui ne veulent aller au cinéma que pour rêver et avoir des étoiles dans les yeux.


Amour