Antiviral, critique

Par Fredp @FredMyscreens

Après ses passages à Cannes, Toronto et l’Etrange Festival, Antiviral, l’étrange film de Brandon Cronenberg est enfin arrivé dans les salles. Une chose est sûre, il est bien le fils de son père et nous offre un film malade et dérangeant.

Difficile parfois pour un jeune cinéaste de passer après son père lorsque celui-ci a déjà un univers bien marqué et rares sont ceux qui arrivent finalement  à se faire un prénom. Dans la famille Cronenberg, nous demandons cette fois le fils, Brandon, qui nous présente son premier long-métrage. Partant du principe que les gens sont devenus assez fous pour s’inoculer les maladies que contractent les stars, le jeune réalisateur nous propose une histoire de trafic de maladie dans un univers froid et hypnotisant. Employé par la clinique Lucas, Syd March revend à tour de bras les dernières infections de la superstar Hannah Geist. Mais pour arrondir ses fins de mois, il transmets aussi des souches de virus à un dealer du coin. C’est ainsi qu’il se retrouve porteur du virus qui vient de faire mourir la star. Il va alors tout tenter pour trouver un remède.

Évidemment, la filiation avec le père David est indéniable tant le fils semble obnubilé par les mêmes thèmes. Obsédé par la chair, le sang et la fusion avec la machine mais aussi par les dérives des médias, Brandon Cronenberg réalise avec Antiviral un film riche qui met sur la table tout ce qu’il a hérité de son père. Évidemment, c’est parfois bancal et ça aurait mérité un rythme un peu plus poussé, mais le résultat, pour un premier film, c’est sacrément prometteur.

A travers cette histoire de science-fiction malade, le réalisateur pose une critique acerbe sur notre société de consommation médiatique. Les stars sont complètement déifiées et en même temps dépersonnalisées pour répondre à la demande de la masse zombifiée de fans (qui mangent des steaks de cellules de stars).
Brandon Cronenberg étoffe petit à petit son univers mais va surtout nous emmener dans ses bas-fonds avec son histoire de trafic digne d’un film noir mais placée dans la clarté et la froideur clinique d’Antiviral. Il nous impose ainsi une patte graphique (l’image et le son sont particulièrement travaillés) dont le sang et l’idée de la mort qui approche sont les composantes phares.

Pour servir cette vision dérangeante, le réalisateur a trouvé en Caleb Landry Jones le cobaye idéal. L’acteur qui incarnait le mutant Banshee dans X-Men First Class fait ici parler l’étrangeté de son physique blafard et la rage de son regard à son personnage. Syd est ainsi présenté comme un vampire, obsédé par le sang malade des stars qu’il s’inocule pour le trafiquer. Une vision qui donne un aspect plus fantastique et étrange à Antiviral et qui prend toute sa consistance et son mordant dans la dernière scène du film.

Avec Antiviral, le fils Cronenberg marche donc sur les traces ensanglantées de son père avec un film viscéral portant les mêmes obsessions et discours. Pour autant il trouve tout de même sa propre personnalité avec une étrangeté léchée qui fait froid dans le dos. Premier essai parfois bancal mais incroyablement intriguant et hypnotisant, cet Antiviral est le premier pas d’un jeune cinéaste à suivre et qui devrait s’affirmer dans ses prochains films pour se faire un prénom. Fascinant.