Voici les avis de Gorbak sur quelques films vu Hors Compétition lors du Festival du Cinéma Asiatique de Deauville 2013.
I’m Sono Sion et Love :
Deux courts métrages (31 et 36 minutes) de Sono Sion, ses deux premiers films réalisés en amateur, dont il ne semble pas très fier au vu de ses commentaires durant l’hommage que lui a rendu le festival. On peut le comprendre aisément. Ce sont deux œuvres de jeunesse qui filment une ribambelle de scènes où Sono Sion hurle, s’agite, renverse tout, se fait tondre la tête en continuant de hurler, projette de la peinture sur des statues, va récupérer des poissons morts dans une sortie d’égout, se masturbe sous la douche,… Après ce calvaire, votre serviteur avait la très forte impression que ce type était fou à lier.
Note : Ce n’est pas notable, regardez le si vous ne tenez pas à votre santé mentale, sinon fuyez ces deux choses comme la peste.
I’m Keiko :
Plus abouti, c’est un film concept d’1h 1min et 1sec sur le temps qui passe. Keiko est une jeune fille qui va bientôt fêter son anniversaire, obsédée par le temps depuis la mort de son père, elle le contemple sur l’horloge, compte les secondes. Nous l’observons lors de longs plans fixes vivre une vie d’ennui, d’inaction, l’idée du temps la paralysant complètement, la rendant prisonnière, incapable de vivre sa vie. Il n’y a pas d’action dans ce film, tout ou presque est immobile, on ne voit pas d’amis, personne d’autre. Souvent dans les plans fixes, rien ne bouge excepté la trotteuse d’un réveil ou le pendule d’une horloge, pendant que Keiko est figée à une fenêtre. La fin du film est un long travelling pendant lequel nous suivons Keiko aller déposer ses poubelles, puis marcher dans la neige, un pas par seconde, pendant qu’en voix off elle compte les secondes, pendant dix bonnes minutes. C’est éprouvant à regarder, mais l’idée est très intéressante et reflète l’une des grandes obsessions de Sono Sion.
Note : 4/10
Dragon Gate : La Légende des Sabres Volants :
Perdue en plein désert, l’Auberge du Dragon serait bâtie sur une ancienne cité cachant un fabuleux trésor que seule une gigantesque tempête se produisant tous les soixante ans pourrait révéler. Partant de cette idée déjà fumeuse, Tsui Hark réalise un véritable festival d’effets spéciaux foireux dans une histoire sans queue ni tête. Tout y est mal foutu, des décors aux effets spéciaux, le jeu des acteurs, le scénario, dans une ambiance complètement foutraque qui transforme le film en un très cher nanard (35 millions de dollars de budget). J’ai vu le film en 2D, mais c’est normalement un film 3D. Je doute que cela sauve quoi que ce soit. La seule solution pour apprécier tant bien que mal ce film raté c’est de le regarder avec humour en se moquant de toutes les tentatives pitoyables de Tsui Hark d’ajouter des scènes spectaculaires.
Note : 0/10, beaucoup plus si vous voulez voir un nanard.
Mekong Hotel :
Apichatpong Wheerasethakul n’essaie même plus. Ce film de 57 minutes se fout complètement de son spectateur. On y voit des comédiens abandonnés par leur réalisateur en train de faire des répétitions d’un vieux scénario de Wheerasethakul dans un hôtel au bord du Mekong. De temps en temps ils parlent des inondations en Thaïlande, parfois ils jouent des scènes en ânonnant leur texte. Le tout sans aucun scénario, aucun jeu d’acteur et aucun réalisateur, qui semble avoir simplement posé sa caméra sur un pied et être parti faire autre chose. Peut-être qu’il tente de recycler un vieux scénario qu’il n’arrive pas à adapter, ou bien dont personne n’a voulu. Ou peut-être qu’il veut simplement insulter son spectateur, si c’est le cas c’est réussi. La musique est une bande enregistrée d’un ami de Wheerasethakul en train de jouer de la guitare en discutant, on le voit d’ailleurs au début du film assis à côté du réalisateur avec qui il parle. Toujours en plan fixe. Si on veut des plans fixes d’un guitariste et l’entendre jouer un morceau en boucle pendant 57 minutes on va sur Youtube et on aura la même chose, avec une qualité identique, mais avec au moins un intérêt, que le guitariste explique comment jouer son morceau. Tout sera en tout cas préférable à cette purge honteuse qui se termine sur un plan large immobile du Mekong la nuit, sur lequel quatre jet-ski font des ronds dans l’eau pendant une dizaine de minutes.
Note : -5000/10
Thy Womb :
Tourné dans les villages sur pilotis des communautés musulmanes des Philippines, Brillante Ma. Mendoza nous transporte durant 1h46 au cœur de cette communauté. Il suit Shaleha, qui n’a jamais pu avoir d’enfant et qui, la cinquantaine passée, décide de se mettre en quête d’une nouvelle femme pour son mari qui lui donnera cet héritier tant désiré. Le portrait de la condition de la femme est effroyable, rien ne viendra dévier Shaleha de sa route, elle est entièrement soumise à vouloir faire le bonheur de son mari, au prix de son propre malheur. Toutes les femmes autour d’elle semblent avoir le même comportement, y compris la toute jeune Mersila qui sera l’élue. Au milieu de couleurs magnifiques, le film tâtonne, se perd, devient long et ennuyeux, oublie son sujet et semble se transformer en documentaire. Au final nous avons le droit à une sorte de très beau documentaire de Thalassa, long et sans voix off.
Note : 3/10
Bouddha, le grand départ :
Quand Osamu Tezuka, une légende du manga parfois surnommé « le Dieu du manga », est adapté par une légende de l’animé. Kozo Morishita a dirigé ou produit Capitaine Flam, Saint Seya et les différentes séries Dragon Ball. Il est actuellement vice président de Toei Animation (Goldorak, Candy, Albator, Galaxy Express 999, Capitaine Flam, Saint Seya, Ken le survivant, Sailor Moon, Dragon Ball GT, Lucille amour et rock n’ roll,… et plus récemment One Piece, Digimon, Xenosaga, Air Gear, Les Super Nanas Zeta,…). En clair, Toei Animation et monsieur Morishita ont produit quasiment toutes les séries d’animation que les geeks comme moi ont vues pendant leur enfance. Nous retrouvons dans Bouddha toutes les caractéristiques du style manga du début des années 80 en gros traits, armures dorées dont les reflets rappellent Saint Seya, personnages aux têtes familières (Chapra ressemble énormément à Pégase, Tatta se rapproche beaucoup d’Astro Boy, créé par Osamu Tezuka), nous sommes en terrain connu. L’histoire avance bien et ses 1h51 passent sans encombre dans une adaptation très classique qui paraîtra probablement vieillotte à certains plus jeunes que moi.
Note : 6/10
The Thieves :
The Thieves est le Ocean’s Eleven coréen. Réalisé par Choi Dong-Hoon (Woochi, The High Rollers, The Big Swindle), c’est le plus gros succès de l’histoire du cinéma coréen. Le réalisateur réunit un cast de stars coréennes et chinoises dans le rôle de malfrats préparant un casse dans un casino. Sur un scénario improbable garni de rebondissements de moins en moins crédibles, nous avons le droit à un film d’action sans prise de tête. Divertissant, sans plus.
Note : 5,5/10
Les films que j’ai pu voir hors compétition :
I’m Sono Sion (1985) et Love (1986) de Sono Sion (Japon)
I’m Keiko de Sono Sion (1997, Japon)
TheLandofHope de SonoSion (Japon)
The Grandmaster de Wong Kar Wai (Hong Konget Chine)
Dragon Gate:La Légendedes Sabres Volants de Tsui Hark (Chine)
Caught in the Web de Chen Kaige (Chine)
Shokuzai – Celles qui voulaient se souvenir de Kiyoshi Kurosawa (Japon)
Shokuzai – Celles qui voulaient oublier de Kiyoshi Kurosawa (Japon)
Mekong Hotel d’Apichatpong Wheerasethakul (Thaïlande)
Pieta de Kim Ki-Duk (Corée du Sud)
Thy Womb de Brillante Ma. Mendoza (Philippines)
Bouddha, le Grand Départ (animation) de Kozo Morishita (Japon)