La sortie du 4e tome est l’occasion de se pencher sur l’une des séries comics les plus inventives du moment en comics, j’ai nommé Locke & Key.
Le talent est parfois héréditaire. C’est en tout cas ce que l’on peut dire en parlant de Joe Hill, fils de l’illustre Stephen King. Écrivain à succès, l’auteur s’illustre aussi depuis quelques années dans les comics avec sa création Locke and Key. Une série évidemment fantastique et mystérieuse, assez sombre mais surtout remplie d’idées et aux personnages incroyablement touchants.
Tout commence lorsque la famille Locke se fait attaquer par des voyous. La bagarre tourne très mal et le père est tué. La famille endeuillée (la mère Nina et ses 3 enfants Tyler, Kinsey et le petit dernier Bode) va alors déménager dans l’ancienne demeure familiale remplie de mystère. Et pour cause, nommée Lovecraft ou encore Keyhouse, la maison renferme plusieurs clés donnant accès à des pièces secrètes ou à des pouvoirs inattendus. Les enfants vont les découvrir petit à petit mais ils ne sont pas les seuls à vouloir percer le secret de la maison.
La première force de Locke & Key est de nous prendre aux tripes dès les premières scènes. L’auteur ne se refuse rien lors du meurtre du père et à partir de là on se dit que tout est possible, mais surtout, l’expérience et tellement viscérale qu’on se prend d’affection pour les personnages qui vont devoir surmonter le deuil chacun à leur manière, avec plus ou moins de difficultés. Ainsi, Tyler cherchera à se montrer à la hauteur du courage de son père alors que Kinsey va tenter de cacher ses émotions tandis que Nina va noyer son chagrin dans l’alcool et que Bode, plus jeune et plus réceptif, va partir à la conquête des clés. Avec une écriture vraiment touchante, Joe Hill décrit une famille comme toutes les autres qui doit faire face à un malheur vraiment personnel et qui va alors surmonter cette absence en se matant contre les éléments fantastiques qui vont faire leur apparition.
En effet, le fantastique et l’irruption des clés et de leurs pouvoirs mettent ici en relief les sentiments des différents personnages et sont pour chacun une manière de faire face au deuil. C’est grâce à ces éléments qu’ils vont grandir et s’accomplir, trouver leur place dans la famille et dans la petite ville qu’ils découvrent. Mais Joe Hill sait aussi créer une vraie menace qui plane tout au long de l’intrigue et qui se révèle au fur et à mesure au grand jour. L’auteur nous maintient en permanence sous pression et nous émerveille en même temps par le nombre d’idées qu’il met en place. Des clés qui font grandir d’un coup, d’autres qui transforment les personnages, réparent des objets ou ouvrent la tête, l’imagination de l’auteur parait sans limite et c’est pour notre plus grand plaisir de lecture.
D’ailleurs, dans le 4e tome, il multiplie les clés mais expérimente également d’autres codes narratifs qu’il n’utilisait pas auparavant (les récits parallèles, les flash-backs, l’agenda, …), afin que le lecteur ne se repose jamais. C’est quelques fois déstabilisant car moins linéaire mais c’est aussi plus excitant car on se demande toujours quels coups de théâtre peuvent bien nous attendre.
Mais tout le mérite ne revient pas au seul auteur Joe Hill. En effet, à ses côté le dessinateur Gabriel Rodriguez s’en sort comme un chef pour restituer une ambiance de mystère légèrement cartoony dans laquelle les effets chocs prennent place. Mais surtout, il trouve toujours un moyen de mettre en image les idées dingues de l’écrivain et ce n’était pas donné à tout le monde. On sent qu’il y a ici une véritable association et que l’un n’irait pas sans l’autre.
Remplie d’idées, de mystères, de coups de théâtre mais aussi de personnages profondément attachants, Locke & Key est certainement l’un des comics fantastiques les plus excitants depuis longtemps. Indispensable.