Critique Cinéma : L’Intervallo de Leonardo Di Costanzo

Par Nivrae @nivrae

L’Intervallo est un film de Leonardo Di Costanzo qui sortira en France le 1 mai 2013.

Synopsis Dans un immense bâtiment désaffecté d’un quartier populaire de Naples, Salvatore, un adolescent timide et mal dans sa peau, est contraint par des boss de la Camorra à surveiller Veronica, une jeune fille effrontée. Il ignore totalement les raisons de cette détention. Au cours de la journée, la relation entre les deux adolescents évolue et une certaine complicité s’instaure. Veronica entraîne Salvatore dans l’exploration de leur vaste prison.

CastingCarmine Paternoster, Salvatore Ruocco, Antonio Buíl, Jean-Yves Morard

L’Intervallo est la première fiction de Leonardo Di Constanzo, qui avait auparavant réalisé trois documentaires, centrés sur Naples. Le film se déroule encore une fois à Naples. Dans des quartiers populaires gangrenés par la mafia, un jeune homme est forcé de surveiller une jeune fille dans un grand bâtiment désaffecté, en attendant l’arrivée d’un cadre de la Camorra.

Les deux jeunes gens sont laissés seuls et s’ignorent, se rapprochent, s’apprivoisent. Entre Salvatore le taciturne et Veronica la forte tête, une complicité s’installe peu à peu, sans que beaucoup de mots soient nécessaires. Beaucoup de choses passent par le regard, particulièrement celui de Salvatore, qui observe Veronica. On reconnaît en lui à la fois cette attirance et cette peur irrationnelle qu’ont les adolescents pour les filles de leur âge.

A la fois tout les deux prisonniers et libérés du monde des adultes, ils se découvrent dans un univers où les règles établies n’ont plus cours. Le reste du monde semble ne plus avoir d’emprise sur eux alors qu’ils explorent ce bâtiment immense qui tombe en ruine et ses jardins envahis par une végétation luxuriante. La main de la Camorra se relâche, elle qui contrôle la vie de tous les habitants de ce quartier n’a plus de pouvoir ici. Seules leurs discussions font réapparaître cette menace invisible. Face à elle, il y a deux façons de réagir, se rebeller, comme Veronica, ou se soumettre, comme Salvatore. Mais comme Salvatore en fera l’expérience, se rebeller est bien plus difficile si l’on ne fait pas partie de la bande.

Le bâtiment est un personnage à part entière. Tentaculaire, nous l’explorons des sous-sols jusqu’au toit, en passant par les jardins, une étrange cave, son mur d’enceinte, les restes des chambres de ses anciens pensionnaires et des enfilades de pièces vides dont les adolescents prennent possession au détriment des quelques rats qui s’y promènent.

Du peu qu’ils disent on devine beaucoup sur la pression qu’exerce la mafia sur eux, leur famille, leur environnement. Mais dans ce paradis perdu hors du monde, ils sont seuls. Si l’on peut faire un parallèle avec Adam et Eve, Romeo et Juliette se révèlera être une référence très proche.

Tourné caméra à l’épaule et en lumière naturelle, le film offre de beaux jeux de contrastes entre l’extérieur et l’intérieur et capte les rais de lumière traversant les fenêtres de ce bâtiment hors du réel, éclairant les personnages par intermittences. Leonardo Di Constanzo les suit de près, s’en éloigne, les observe à travers les arbres, leur laisse parfois leur intimité, court derrière eux, parvient à faire oublier la caméra. Le décor est surnaturel par sa diversité et son gigantisme, Di Constanzo a tourné son film dans l’ancien hôpital Leonardo Bianchi de Naples, qui était dédié à la psychiatrie. Laissé à l’abandon, l’édifice de plus de 200 000m² devient un immense terrain de jeu pour les deux acteurs.

Ce film qui décrit une attente faite de peu d’évènements n’est cependant pas ennuyeux, les deux personnages exprimant beaucoup de choses, par le regard de Salvatore, par le corps de Veronica.

Note : 8,5/10, deux adolescents s’apprivoisent dans un immense bâtiment désaffecté en attendant la mafia. Les deux jeunes acteurs sont très bons dans un décor gigantesque qui offre des vues et une lumière irréelle.